Tunisie : condamné à de la prison pour homosexualité avec le «test de la honte»
Le jeune homme avait été convoqué début septembre par un commissariat de Tunis comme témoin d’un litige. En fouillant dans son téléphone, les policiers ont découvert «des textos explicites quant à ses choix amoureux», rapporte Jeune Afrique.
Un test anal, appelé «test de la honte» par ceux qui le dénoncent, a alors été réalisé en milieu hospitalier par un médecin légiste. Un examen qui permet «de se passer d’aveux dans une inculpation pour sodomie». Cette accusation est réprimée par l’article 230 du Code pénal tunisien pour qui la sodomie «est punie de l’emprisonnement pendant trois ans».
La traque des homosexuels continue en #Tunisie Un jeune de 23 ans vient d'être jugé aujourd'hui pour 1an de prison https://t.co/ePNHTTgUbR
— LiliaWeslaty (@Liliopatra) September 22, 2015
Afin qu’il accepte le test, la police a menacé l’étudiant et l’a frappé, selon l’association de défense des minorités sexuelles Dami citée par Rue89. Par la suite, il a fini par reconnaître son homosexualité.
«Cette pratique est en opposition flagrante et choquante avec la Convention internationale contre la torture ratifiée par l’Etat tunisien», a fait savoir l’Association tunisienne de soutien des minorités dans un communiqué.
Pour le juriste Wahid Ferchichi, «le recours au médecin légiste dans les affaires liées à l’homosexualité est une pratique courante et taboue en Tunisie». Alors que l’article 23 de la Constitution consacre la protection de la «dignité de la personne et son intégrité physique» et «interdit la torture morale et physique».
En théorie, il est «possible de refuser cet examen au moment de la confrontation avec le médecin légiste», mais «la réalité est tout autre», précise l’association Shams (cité par Paris Match), qui lutte contre l’homophobie. «Les victimes ‘‘acceptent’’ par peur de la torture ou en raison de leur jeune âge et (de la) méconnaissance de leurs droits», précise l’association qui a lancé une campagne contre le test anal.
Manifestation
Pourtant, paradoxalement, les choses commencent (un tout, tout petit peu) à bouger en matière de prise en compte des droits des homosexuels. Le 26 mars 2015, une première manifestation a ainsi réuni une trentaine de personnes à l’appel de l’association LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels et Transsexuels) pour protester contre les discriminations dont ces derniers font les frais. Et demander la dépénalisation de l’homosexualité en Tunisie.
«Il est possible de changer les choses, de faire évoluer les mentalités et de casser les préjugés, mais pour réussir, nous devons bouger et être unis. En Tunisie, nous sommes traités comme des pestiférés et beaucoup d’entre nous ont été victimes d’agressions gratuites», raconte «Sam» (23 ans), un homosexuel tunisien habitant la banlieue nord de Tunis, cité par le site kapitalis.com.
L’organisation de la manifestation du 26 mars a eu lieu après l’initiative lancée en 2014 sur Facebook et intitulée «Pour la dépénalisation de l’homosexualité en Tunisie». Autre petit signe d'espoir: l'association Shams a été légalisée le 18 mai, comme le signale Courrier International. «Les réactions négatives à cette nouvelle ont foisonné et la levée de boucliers est loin d'être terminée», relève l'hebdomadaire français.
«Les préjugés et les idées reçues ont la vie dure en Tunisie. C'est tellement plus facile que de réfléchir et de tenter de comprendre», observe le journaliste Marouen Achouri sur le site BusinessNews dans une chronique intitulée «En Tunisie, il vaut mieux être pédophile qu'homo». Comme quoi dans ce pays, les choses avancent et reculent en même temps. Et comme souvent, c’est la société civile qui va de l’avant.
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