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Tunisie: aide militaire occidentale contre les djihadistes

L’information est sortie le 26 mars 2015 sur les réseaux sociaux et internet: un avion américain a été repéré effectuant une mission d’observation au-dessus de la Tunisie, plus particulièrement au-dessus de la région du mont Chaambi (centre-est), qui abrite des foyers djihadistes. Mais les Occidentaux ne se contentent pas de simples missions aériennes…
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des membres des forces spéciales tunisiennes montent la garde à Kasserine, près de mont Chaambi, le 7 mai 2013.  (AFP - ABDERRAZEK KHLIFI)

L’avion en question est «un bi-propulseur Beechcraft Super Air King 350 (B300) appartenant à la société Aircraft Logistis Group LLC, basée à Oklahoma City» (Etats-Unis), rapporte le site tunisien 7our.

L’affaire a fait le tour de Twitter. D’aucuns parlant d’«avion espion». Quoiqu’il en soit, celui-ci menait une mission d’observation de la zone du mont Chaambi, près de la frontière algérienne, dans le gouvernorat de Gafsa (centre-est de la Tunisie). Une zone connue pour héberger des éléments djihadistes.


Dans une enquête très fouillée, le site inkyfada.com revient longuement sur cette affaire. Laquelle pourrait avoir un lien avec une opération dans la région de Gafsa contre le groupe djihadiste Oqba Ibn Nafaa, qui a apparemment fait 9 morts… le 26 mars 2015, jour de la mission d’observation de l’avion américain. Et huit jours après l’attaque contre le musée du Bardo à Tunis (22 morts, dont 21 touristes). Le chef du groupe, l’Algérien Lokmane Abou Sakhr, accusé d’avoir dirigé l’attentat du Bardo, figure parmi les djihadistes abattus, selon Tunis. Les extraits du communiqué publié par Oqba Ibn Nafaa à la suite de l’action des forces de l’ordre, semblent confirmer que la mission aérienne et l’action de Gafsa ne sont pas forcément liées à un simple hasard du calendrier…

Interrogées par inkyfada.com sur le mystérieux avion, les autorités américaines expliquent : «Le survol de l’espace aérien tunisien est conduit avec l’autorisation du gouvernement tunisien». Et de préciser : «Nous partageons continuellement des informations et des ressources pour répondre aux appels d’assistance». Ce qui, logiquement, laisse entendre qu’il y a effectivement eu un «appel d’assistance» émanant de Tunis…

Aide tous azimuts
De son côté, l’armée italienne a expliqué que l’aéronef US intervient sur la base d’«accords bilatéraux entre les deux pays» et qu’«il s’agit d’un appareil américain basé à l’aéroport de Pantelleria». Cette île italienne, qui se trouve entre les côtes sicilienne et tunisienne, est proche de la base américaine de Sigonella (Sicile).

Militaire tunisien dans la région du mont Chaaambi le 6 juin 2013. (AFP - ABDERRAZEK KHLIFI)

Au départ, les autorités tunisiennes parlaient  «d’intox», rapporte inkyfada.com. Le ministre des Affaires étrangères, Taieb Baccouche, a fini par reconnaître que le survol de l’avion américain «était une mission de surveillance menée dans le cadre de la coopération militaire et d’intelligence avec l’Union européenne dans le domaine de la lutte contre le terrorisme».   
 
Visiblement, l’aide occidentale à la Tunisie semble donc assez large. Ainsi, «la France souhaiterait que les Emirats financent l’acquisition de matériels (militaires français) destinés à Tunis», révèle ainsi Le Figaro. Objectif : «renforcer l’appareil sécuritaire» de la Tunisie, dont l’attentat du Bardo «a montré les failles». L’aide occidentale est également humaine. Ainsi, «depuis l’attentat du Bardo, des membres des forces spéciales américaines sont intégrées dans les unités des forces spéciales tunisiennes», selon un expert militaire cité par Le Figaro.

La coopération avec les Etats-Unis pourrait s'accroître. Le 21 mai 2015, le président Béji Caïd Essebsi a discuté d'une hausse sensible de l'assistance américaine avec son homologue américain Barack Obama à la Maison blanche. Cette dernière a demandé au Congrès d'approuver une aide de 138 milliards de dollars pour 2016. Les Etats-Unis ont par ailleurs annoncé la livraison à l'armée tunisienne de 52 véhicules de type Humvee et d'un navire de patrouille.

De son côté, Paris aimerait bien renforcer sa coopération avec Tunis en matière de renseignement. Problème : lors de la récente présidentielle, la France aurait affiché, selon les termes du président Béji Caïd Essebsi rapporté par Le Figaro, «un soutien explicite» à son adversaire, Moncef Marzouki. Bilan des courses : la DGSE n’a pas pu installer un centre d’écoutes dans le sud tunisien. Renseignement et politique ne font pas forcément bion ménage…

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