Crise en zone anglophone : le Cameroun banni par les Etats-Unis
Yaoundé a été écarté par Washington de l'AGOA, l'accord de libre échange Afrique-Etats-Unis, pour ses exactions en zone anglophone.
Rien ne va plus entre Washington et Yaoundé. Les Etats-Unis ont retiré le Cameroun de la liste des pays bénéficiaires de l’AGOA à partir de janvier 2020. L’AGOA, pour " African Growth Opportunities Act " (loi sur les possibilités de croissance en Afrique), a été votée par le Congrès américain en mai 2000. Elle permet aux pays éligibles d’exporter vers les Etats-Unis sans droit de douane. 6300 produits sont concernés : pétrole, textiles, artisanat, agriculture…
Le geste des Etats-Unis vis-à-vis du Cameroun vise à sanctionner l’attitude de Yaoundé dans le conflit des Etats anglophones. "Des violations grossières et répétées des droits humains internationalement reconnus", explique l’administration Trump.
Une sanction relative
Selon l’ambassade américaine au Cameroun, citée par Jeune Afrique, le pays a exporté vers les Etats-Unis pour 220 millions de dollars de biens en 2018, mais seulement 63 millions rentraient dans le cadre de l’AGOA.
Les Etats-Unis sont loin d’être un client essentiel dans les 2,8 milliards d’euros d’exportation du Cameroun. Ce dernier est plutôt tourné vers l’Europe : Pays-Bas (21,4%), Belgique (9,3%), Italie (7,8%) et France (7,7%) sont les principaux clients. Il est vrai que le mécanisme de l’AGOA patine. Loin de booster les échanges commerciaux comme espéré, on assiste au contraire à un repli depuis 2008, année faste. Le congrès d’Abidjan en août 2019 avait planché justement sur la relance du mécanisme.
Négociations
Malgré tout, Yaoundé négocierait pour retrouver les bonnes grâces de l’oncle Sam, croit savoir Actu Cameroun. "Une mission conduite par Félix Mbayu, ministre délégué auprès du ministre des Relations Extérieures, a rencontré le sous-secrétaire d’Etat américain chargé des affaires africaines, Tibor Nagy", écrit le site internet. Et c’est bien sûr la situation des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui est au cœur des discussions. Tibor Nagy prône un "vrai dialogue" et un "transfert de pouvoir" vers ces régions. "Il n’y aura pas de victoire militaire", martèle le diplomate américain.
Le Cameroun au ban des nations
Pour René Emmanuel Sadi, le ministre camerounais de la Communication, les Etats-Unis ignorent "la réalité des faits sur le terrain" dans ces régions. Car plus que la sanction économique, c’est la mise au ban politique qui inquiète Yaoundé. Le Cameroun est désormais classé parmi les pays peu fréquentables. "Le Cameroun n’a pas répondu à nos préoccupations concernant les violations persistantes des droits de l’Homme commises par ses forces de sécurité. Ces violations comprennent les exécutions extrajudiciaires, les détentions arbitraires et illégales, et la torture", avait expliqué Donald Trump pour justifier sa décision.
Redoutables accusations déjà partagées par l’ONG Human Rights Watch qui, en août 2019, évoquait des cas de torture notamment sur des militants de ces régions anglophones.
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