Afrique du Sud : l’alcoolisme, une tragédie sociale et un gouffre financier
Toutes les études menées depuis 2011 par les spécialistes de l’Organisation mondiale de la santé aboutissent à la même conclusion : l’alcoolisme est devenu un problème de santé publique en Afrique du Sud. La consommation annuelle moyenne est estimée à 20 litres d’alcool pur par personne et par an, l’équivalent de 220 bouteilles de vin.
Troisième cause de décès dans le pays
Les autorités sud-africaines le reconnaissent, l’alcool est la troisième cause de décès dans le pays. La ministre du Développement social comptabilisait 130 morts par jour en septembre 2013. Les jeunes, garçons et filles, sont de plus en plus touchés. «Plus d’un tiers des Sud-Africains (37%) consomment de l’alcool du vendredi au lundi matin et sont donc saouls tout le week-end», reconnaît l’autorité sud-africaine des drogues qui a effectué des recherches. Le pire, ajoute-t-elle, «ce sont les lundis matins où 10% des gens sur les routes ont des chances d’êtres saouls». L’Afrique du Sud compte plus de 7000 morts annuels liés à la consommation d’alcool.
Une consommation excessive d’alcool que nous a confirmée le docteur Alexandra Fleischann du département santé mentale et toxicomanie de l’OMS à Genève : «48% de l’alcool consommé dans le pays le sont sous forme de bière, 18% sous forme de vin, 17% sous forme de spiritueux. Les 17% restants comprennent d’autres types de boissons alcoolisées telles que les boissons fermentées à partir de sorgho ou de maïs.»
L’alcoolisme fœtal fait des ravages
Toutes les occasions sont bonnes pour se retrouver autour d'une bouteille. Cette drogue légale a attribué à l’Afrique du Sud un autre record : celui de présenter le plus fort taux mondial d’alcoolisme fœtal. Un facteur de risques prénatals pour les Sud-Africaines grandes consommatrices d’alcool. «En fonction de la quantité consommée, l’alcool peut causer des fausses couches, des mort-nés, des malformations cardiaques, des troubles de la vision ou de l’ouïe ou des malformations squelettiques et des déficits du langage», explique à Géopolis le docteur Alexandra Fleischmann. De nombreux enfants souffrent de déficience mentale notamment dans la région viticole du Cap.
Là bas, dès le 17e siècle, des milliers d’ouvriers agricoles dans les vignobles recevaient une partie de leur salaire en alcool. Selon le site de Courrier International, les femmes pouvaient boire trois ou quatre bouteilles de vin par jour. Une dépendance à l’alcool qui a eu des effets néfastes sur leur progéniture.
La publicité sur les boissons alcoolisées fait débat
L’objectif est de faire passer l’âge légal de consommation d’alcool de 18 à 21 ans et de restreindre les heures de vente dans les débits de boissons. «Il est important de réglementer le contenu et le volume du marketing liés à l’alcool dans les médias», insiste le docteur Alexandra Fleischmann.
Il faut s'attaquer au grand marché de la publicité, estime l'OMS. L'organisation onusienne fait remarquer que le marketing de l’alcool fait appel à des techniques publicitaires et promotionnelles de plus en plus élaborées. Des stratégies qui associent les marques d’alcool à des activités sportives ou culturelles. Ce qui favorise la consommation.
L’industrie de l’alcool a d’ores et déjà prévenu: le gouvernement sud-africain pourrait provoquer la suppression de plusieurs dizaines de milliers d’emplois en interdisant la publicité sur l'alcool.
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