Nigeria : une campagne sur Twitter réclame justice pour les femmes violées
#Justice pour Uwa, pour Jennifer, pour Tina. Le mot dièse "justice" se répand sur la toile nigériane, révoltée par une succession récente de viols et de meurtres qui restent souvent impunis.
Le viol et le meurtre d'Uwa Omozuwa, le 13 mai dernier, ont été le moteur d'un mouvement de protestation sur les réseaux sociaux. La jeune femme de 22 ans, étudiante à l'université de Bénin City, au sud du pays, a été retrouvée dans l'église où elle se rendait pour étudier au calme, "à moitié dévêtue et baignant dans son sang". Elle est décédée 18 jours plus tard à l'hôpital où elle avait été transférée.
Stop raping women!
— ÀKÀNKÉ (@Titilope__xo) June 1, 2020
Stop killing women!
You do not have any right to our bodies!#JusticeForUwa #EndThisRapeCulture! pic.twitter.com/JMOakYWjMA
("Arrêtez de violer les femmes, arrêtez de tuer les femmes, vous n'avez aucun droit sur nos corps")
Un meurtre qui fait suite au viol de Jennifer, 18 ans, à Narayi dans l'Etat de Kaduna. Elle avait été piégée sur Facebook par ses agresseurs en avril dernier. Un viol collectif perpétré par cinq individus. L'information a circulé sur les réseaux sociaux que ces hommes n'étaient pas poursuivis par la justice et qu'ils voulaient payer un dédommagement à leur victime en échange de l'abandon des poursuites.
Information non recoupée, mais qui a soulevé l'indignation. Et finalement deux des agresseurs présumés ont été arrêtés, grâce à la pression populaire, avancent certains.
Laxisme policier
Le mouvement lancé sur Twitter veut dénoncer le sentiment d'impunité qui favorise toutes les violences faites aux femmes. Car selon les ONG, le laxisme de la police et de la justice, mais aussi la corruption ou l'intimidation, découragent les victimes de porter plainte.
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"Au Nigeria, les gens croient qu’ils peuvent toujours s’en sortir en soudoyant tellement la police que les victimes potentielles s’inquiètent d’aller devant les tribunaux, parce qu’en fin de compte, soit la justice ne sera pas rendue, soit elle sera retardée", explique Betty Abah, la responsable d'une ONG de Lagos au site internet Sahara reporters.
Sentiment d'impunité
Une critique que reprend également Amnesty International. "L'augmentation des cas de viols au Nigeria est le résultat de l’incapacité des forces de l’ordre à garantir que les violeurs soient traduits en justice. Nous sommes profondément préoccupés par le fait que les auteurs de viols au Nigeria échappent invariablement à la punition."
#We are tired# say no to rape pic.twitter.com/fSUzvg7m54
— joeddreamer (@joeddreamer1) June 1, 2020
Selon le réseau Women supporting Women (WSWN), une femme sur trois au Nigeria a subi des violences sexuelles, ce qui fait des milliers de victimes chaque année, dont beaucoup gardent cela secret. "Cette culture du silence rend difficile de faire cesser les violences à leur encontre."
"Nous sommes fatigués"
Et si le mouvement #Justice pour Uwa s'en prend d'abord aux violeurs, les critiques ont de plus en plus ciblé l'incurie de la police et plus largement des autorités du pays. Un nouveau mot dièse est apparu porté par Tiwa Sawage, artiste très en vue dans son pays. #We are tired (nous sommes fatigué(e)s) énumère tous les maux du Nigeria. "Fatigués de ces tueries incessantes, des camions qui se renversent et tuent des innocents, de ces jeunes filles violées et de ces diplômés sans emploi."
Et l'artiste de conclure que la liste de ces frustrations est longue. L'image d'un pays qui serait à la dérive.
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