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Avec le pont de Maputo, la Chine s’affirme comme premier investisseur en Afrique

La construction du pont suspendu de Maputo, le plus grand d’Afrique, s’achève. Cette infrastructure hors norme est financée et construite par la Chine. Une enveloppe de 750 millions de dollars qui réaffirme l’intérêt de Pékin pour le continent.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Le pont suspendu de Maputo sera livré à la fin de l'année 2017. (JOHN WESSELS / AFP)

Au-dessus de l’estuaire de l’Espirito Santo se dresse la silhouette du pont de Maputo. Son tablier domine l’estuaire de 60 mètres, afin de laisser passer les cargos. La construction s’achève, mais cela n’éteint pas la polémique. L’investissement s’élève à 750 millions de dollars. Un gâchis pour certains qui verraient cet argent mieux employé dans la construction d’écoles ou d’hôpitaux. Sauf que ce n’est pas cela qui attire l’argent chinois.

Une nouvelle fois, les observateurs s’interrogent sur l’appétit de la Chine, qui finance et construit cette infrastructure. Les investissements de Pékin sont souvent dénoncés comme étant des formes de colonialisme. Mais la Chine et les Etats africains se retrouvent sur l’intérêt commun à construire les infrastructures dont le continent a besoin.

Pour la Chine, ces infrastructures sont indispensables pour sortir du continent les matières premières dont Pékin est gourmand. En 2015, lors du 6e forum sur la coopération sino-africaine, Pékin a promis d’injecter 60 milliards de dollars dans les économies africaines entre 2016 et 2018 sous forme d’investissements de prêts et de dons.
 
L’Empire du Milieu lorgne ainsi sur le port de Maputo. Une situation géographique exceptionnelle aux yeux des Chinois. «Il est à portée, en étant à moins de 450 kilomètres des provinces sud-africaines du Mpumalanga, du Limpopo et du Gauteng, ainsi que des pays voisins du Swaziland et du Zimbabwe», écrit Marie-Annick Lamy-Giner dans Urbanités. Le projet comporte également la construction de routes. La ville de Ponta do Ouro à la frontière Sud du Mozambique sera reliée à la capitale. Cela améliorera le trafic avec l’Afrique du Sud.
 
 
ICA, le consortium pour les investissements en Afrique, annonce une augmentation de 12% des investissements dans le continent pour l’exercice 2015. Les financements s’élèvent à 83,4 milliards de dollars dont plus de 20 assurés par la seule Chine, soit 25% des investissements. Le bond de la Chine est impressionnant. Son investissement a été multiplié par sept par rapport à l’année précédente.

«Les Chinois, à l’inverse des Occidentaux, insistent systématiquement à l’adoption d’une position de neutralité et de non-ingérence dans les affaires internes des pays où ils font des affaires. Cela rend l’alternative chinoise plus attractive aux yeux des pays africains, les interactions étant facilitées par un sentiment de respect et d’égalité», écrit Peterson Nnajiofor, enseignant à l’université de Metz. Ceci peut expliquer l’accueil qui leur est réservé.
 
Energie et transport
Les secteurs privilégiés par les investisseurs ne sont pas surprenants. Energie et transport sont, à égalité, les secteurs les plus financés. Près de 35 milliards de dollars pour l’exploitation pétrolière ou les ports, loin devant le secteur de l’eau, avec 8 milliards de dollars. Sans faire de distinguo entre les investissements vertueux (éducation, santé, service public) et les autres, cette manne ne bénéficie pas directement, ou très rarement, à la population.
 
Or, un rapport de 2016 de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (Cnuced) estime que l’Afrique a besoin de 600 milliards de dollars par an pour répondre aux objectifs de développement durable. Dans le même temps, les financements étrangers venus de Chine ou d’ailleurs peuvent vite devenir un fardeau. Le poids de la dette extérieure ne cesse de s’alourdir. Au début des années 2010, la dette extérieure des pays d’Afrique s’est accrue de 10% chaque année. Elle a atteint 443 milliards de dollars en 2013. «Etant donné que ces obligations sont libellées en devises, les pays deviennent vulnérables aux fluctuations monétaires», indique le rapport.

Le baiser du dragon pourrait ainsi s'avérer mortel pour l'Afrique.

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