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Exposition: Mohammed Kacimi, un "artiste des deux rives" qui a construit un nouvel imaginaire pour les générations futures

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
Publié
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"Kacimi: 1993-2003, une transition africaine" réunit plus de 300 œuvres (peintures, dessins, photos, sculptures…) de l’un des plus grands artistes marocains, Mohammed Kacimi (1942-2003). Cette exposition inédite, consacrée aux travaux de ses dernières années, "sa période africaine", se tient jusqu’au 3 mars 2019 au Mucem à Marseille.  

Mohammed Kacimi est un autodidacte, plasticien majeur de la scène contemporaine africaine. Lors de ses nombreux voyages, il visite un grand nombre de musées européens pour se confronter à l’art occidental. Il côtoie artistes et intellectuels. Indépendant, curieux d’esprit, doté d’une intelligence rare, novateur et engagé, il est extrêmement productif. Il "s’appuie sur l’écoute d’un ressenti intérieur et sur l’observation de la réalité qui l’entoure", précise l’historien d’art Brahim Alaoui au magazine d’art contemporain Diptyk, cité par l’OBS.

Son mélange d’abstraction et de figuration a permis "aux nouvelles générations d’artistes issus du monde arabe de sauter le pas vers une contemporanéité nouvelle, nourrie par ses propres ancrages culturels", explique Nadine Descendre, commissaire de l’exposition, historienne et auteure du catalogue (4.500 pièces recensées) de ses œuvres (Art'Dif éditions). Aujourd’hui, beaucoup de ces artistes sont reconnus sur la scène internationale.

La décennie choisie pour l'exposition, 1993-2003, est l’une des plus prolifiques de l’artiste. Cette "période africaine est l’apogée de son œuvre, qui le voit rompre avec l’art occidental et les différents courants esthétiques l’ayant influencé durant son parcours, pour ouvrir une nouvelle voie, beaucoup plus personnelle, caractérisée par une expression sans contrainte, libre, et de plus en plus transdisciplinaire. (…) D’abord influencé par l’Ecole de Paris, par les courants esthétiques occidentaux, il se tourne résolument vers l’Afrique en quête de vérité et d’authenticité", explique Nadine Descendre. (COLLECTION PRIVEE, CASABLANCA)
"Kacimi est l’un des seuls artistes marocains à avoir dans les années 90 des expériences au Mali, au Sénégal, au Bénin… En compagnie d’artistes du continent, il a inventé une passerelle entre le Maroc et l’Afrique, entre le Nord et le Sud. Et comme en même temps son art a évolué aux côtés d’autres artistes africains, il est reconnu comme l’un des pères de la transition contemporaine dans le continent", déclare Hicham Daoudi qui représente les ayants droit de Mohamed Kacimi et président d’Art Holding Morocco, cité par l’agence maroraine Maghreb Arabe Presse (MAP). (JEAN GRELET - LE LABO PHOTO BORDEAUX)
"Les œuvres de Kacimi sont saisissantes, leurs expressivités franches et leur spontanéité leur octroient une incroyable puissance. Figuratives ou non, ses toiles nous transportent au cœur d’une réflexion en construction où les mots, les symboles, les corps et le geste artistique se rencontrent. Ainsi ses œuvres oscillent entre la sculpture, le dessin, la peinture sur toile, sur goudron, sur boîte ou autre… Il transgresse les codes et tout peut devenir une pièce d’art, tout est support à création", explique Nadine Descendre sur le site Magma. (JEAN GRELET - LE LABO PHOTO BORDEAUX)
"L’académisme des écoles le rebute. Il comprend qu’avec son vécu, cela s’expérimente ailleurs et autrement. Sensible à tout ce qui l’environne, il cherche comment exprimer sa vérité, être au plus près du réel, et comprend que cela se passera pour lui entre deux cultures. La sienne, arabe et africaine, et celle de cet Occident qui lui fournit un premier matériau qu’il va falloir transformer", précise la commissaire de l'exposition. (ARCHIVES KACIMI)
 "Peintre de la couleur, chantre du bleu et des ocres tenté par le noir, Mohammed Kacimi s’inscrit dans l’histoire de l’art comme un interprète de l’existence et de la condition humaine. En rassemblant toute son énergie dans ses œuvres, il a tenté une réconciliation entre une vision tragique de son époque et son appétence au bonheur quelque peu désespérée. Il restera à tout jamais cet être lumineux mais paradoxal, tourmenté par de sombres musiques qui lui tournent dans la tête. En s’appuyant sur l’art, il contourne le désespoir qui l’assaille, pour reconquérir l’éclat de la vie…", note Nadine Descendre, citée par ABC24. (ATELIER DE L’ARTISTE + COLLECTION PRIVEE, CASABLANCA)
"Assoiffé de justice, de paix et de démocratie, il est convaincu qu’en tant qu’artiste, il y a un moyen de créer et de défendre ses engagements eu égard au Maroc et plus largement au monde arabe (…). Il avait un véritable engagement humain mais pas religieux, de même qu'il n'était pas soumis à la tradition. Il était aussi très engagé politiquement et en faveur des Droits de l'homme, il n'avait pas peur, la reconnaissance par ses pairs, sa notoriété, le rendaient intouchable", déclare Nadine Descendre dans un entretien à My Provence. (ATELIER DE L’ARTISTE)
En 1997, Kacimi écrit le texte suivant: "L’artiste africain n’est pas seulement le représentant, le transmetteur de l’exotisme et des rites ancestraux qui alimentent les imaginaires en perte de sens. Le créateur en Afrique est le passeur de sa propre histoire avec tout ce qu’elle a de complexe, d’ascendant, de rituel, d’éclatant. Face à des mutations, des répressions locales et internationales, des misères et des aberrations politiques. Face à la tyrannie de toute forme y compris celle de sa propre tradition". (ATELIER DE L’ARTISTE)
Mohammed Kacimi poursuit: "L’artiste africain contemporain est l’archéologue de la succession du temps, des strates, des signes et de la matière depuis le temps de la Belle Lucie (et de la découverte des origines) à nos jours. Un état d’être en prise directe avec les événements. L’Afrique n’est pas seulement un lieu géographique producteur de signes, de rites et de safaris comme elle l’est souvent dans l’imaginaire occidental, mais aussi celle de la mort, du déboisement culturel, de la désertification, et de manipulations de toutes sortes".  (ARCHIVES KACIMI)

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