Négociations de paix au Mali: l'Algérie appelée à la rescousse
Depuis l’élection du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en août 2013, les pourparlers de paix piétinent et les groupes armés continuent à mener des actions meurtrières dans le nord du Mali. Après des revendications indépendantistes, aujourd'hui officiellement abandonnées, certains des groupes rebelles réclament désormais une forme d'autonomie ou un statut particulier pour le nord qu'ils appellent Azawad.
MNLA et MAA représentés à Alger
Réunis à Alger, le gouvernement et les groupes armés maliens vont tenter de se mettre d'accord. Les pourparlers se déroulent sous l’auspice d’un «collège de médiateurs», composé de l’Union africaine, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao), l’Algérie, les Nations Unies. Et d’un «collège de facilitateurs» qui comprend l’Union européenne, la France, la Suisse, la Mauritanie, le Niger, le Tchad et le Burkina Faso.
Exit le Maroc qui, à la demande du président Keïta, était entré dans la ronde des nombreuses médiations déjà en cours. Le Premier ministre malien Moussa Mara lui a toutefois demandé «de continuer à jouer de son influence» en vue d'une solution. Pour Moussa Mara, «un processus de paix nécessite des efforts» et «des compromis de part et d'autre». Il sous-entend des concessions du gouvernement qui a déjà tracé «la ligne rouge» à ne pas franchir: la remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali et la laïcité de l'Etat.
Selon un expert de la mission de l'Onu au Mali, la Minusma, il faut faire vite car «la situation se dégrade de plus en plus dans le Nord: à côté du différend gouvernement malien/groupes armés, des affrontements inter-communautaires sont en cours et c'est plus dangereux que tout le reste». Malgré le cessez-le-feu obtenu par le chef de l'Etat mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, président en exercice de l'Union africaine (UA), des affrontements continuent entre le MNLA et une branche du MAA. Ces groupes sont représentés à Alger mais pas ceux liés à Al-Qaïda qui ont occupé pendant plus de neuf mois le nord du Mali avant d'en être partiellement chassés par une intervention armée internationale lancée le 11 janvier 2013 par la France, toujours en cours via la Minusma.
«Situation très complexe»
La manœuvre d’Alger est «étroite», analyse un diplomate algérien, sous couvert de l’anonymat. «La situation n'a pas bougé depuis dix mois» et «c'est ce qui a amené le gouvernement malien à solliciter l'Algérie», explique-t-il. Selon lui, le président Ibrahim Boubacar Keïta «est convaincu que seule l'Algérie peut faire bouger les choses. C'est un fait inédit qu'un pays demande à un autre de s'associer à la gestion d'une partie de son territoire». Mais, ajoute-t-il, «la situation est très complexe» car «il ne faut pas perdre de vue que le Mali n'a pas les moyens de surveiller son territoire de 1,2 million de km², l'un des dix pays les moins avancés au monde». «Les mouvements armés viennent à Alger en position de force», constat-t-il.
Du côté de l’opposition et d’une partie de la presse malienne, le choix de l’Algérie ne convainc pas. «A chaque fois, on accourt vers elle et c’est le même résultat: aucun (…). L'Algérie a le plus été impliqué dans la résolution de la crise malienne et n’a jamais pu trouver de solution», analyse l’hebdomadaire Nouvelle Libération.
Pourparlers en «trois phases»
Ces négociations à Alger sont les premières à rassembler l'ensemble des parties prenantes au conflit depuis celles qui avaient abouti à un accord intérimaire le 18 juin 2013 à Ouagadougou, au Burkina Faso. Ces dernières avaient ouvert la voie à la tenue d'élections présidentielle et législatives.
Les pourparlers vont se dérouler en «trois phases»: «Valider une feuille de route des négociations», puis les «négociations proprement dites (...) pour aller au fond des problèmes et obtenir un pré-accord», avant la signature d'un accord de paix définitif, selon l'ancien Premier ministre malien, Modibo Keïta, représentant du chef de l'Etat pour le dialogue inclusif intermalien.
Les discussions ont débuté le 16 juillet 2014, date de la visite à Bamako du ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, pour y signer un accord de défense avec le Mali après l'annonce par Paris de la fin de son opération Serval.
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