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Rome de retour en Libye pour contrer Daech?
Des terroristes islamistes ont revendiqué l’assassinat, le 15 février 2015 en Libye, de 21 Egyptiens. Des chrétiens coptes, enlevés en janvier dernier, décapités pour leur simple appartenance religieuse. La Libye déchirée entre factions, voit apparaître à son tour le nom de Daech. Quand certains en Italie songent à intervenir.
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Un pas de plus dans l’horreur. Une nouvelle vidéo, où une fois encore, l’exécution d’innocents est savamment orchestrée, a été publiée le 15 février. Des hommes se revendiquant de Daech vont, devant la caméra, froidement égorger 21 otages.
La raison en est simple. Ces hommes sont des chrétiens coptes, « gens de la Croix, fidèles à l’Eglise égyptienne ennemie » revendiquent les assassins dans une logorrhée d’un autre temps. Au bord de la mer, là où le message prétend que le corps de Ben Laden a été immergé, le chef des bourreaux poursuit : « cette mer… nous jurons devant Allah que nous allons la mêler à votre sang ».
Daech pour la première fois en Libye
Les attentats se multiplient en Libye, devenu l’un des plus dangereux pays de la région depuis la chute de Khadafi en 2011. Le pays est dirigé par deux parlements et deux gouvernements. L’un reconnu par la communauté internationale tient Tobrouk. Il est composé d’anciens du régime.
L’autre, est dirigé par les islamistes à Benghazi.
En janvier 2015, comme nous le rappelions dans cet article, le président nigérien Mahamadou Issoufou réclamait déjà une intervention internationale chez son voisin libyen, inquiet du dérapage terroriste.
Or avec cette vidéo, c’est désormais Daech qui s’invite dans les sables libyens. Le premier ministre italien, Mattéo Renzi, précise que l’Etat islamique n’est pas entré en Libye, mais que désormais des combattants se revendiquent de l’organisation. Ce que les média occidentaux qualifient de «franchise».
L’Italie au premier rang
Avant l’annonce de ces assassinats, l’Italie, l’ancienne puissance coloniale, appelait à une coalition pour lutter contre les djihadistes en Libye, s’inquiétant de la poussée du califat qui, selon la ministre de la Défense Roberta Pinotti, «est parvenu à 350 km de nos côtes». Et la ministre de préciser que si l’Italie avait été capable d’envoyer 5000 hommes en Afghanistan, elle pouvait en faire autant «dans un pays comme la Libye qui nous concerne de bien plus près et où le risque de dégradation est bien plus préoccupant pour l'Italie».
Il faut dire que la problématique pour Rome est double. D’une part, il lui faut gérer un flot incessant de réfugiés, venus pour une grande partie de Libye, chassés par la guerre. Pas plus tard que le 14 février, 600 migrants ont été secourus près des côtes libyennes. Ils avaient embarqué sur des canots pneumatiques pour tenter de rejoindre la Sicile. En 2014, 160.000 migrants sont arrivés en Italie. 80% étaient Libyens. La communauté internationale a très peu soutenu l’effort de l’Italie pour prendre en charge ces réfugiés.
Des djihadistes dans les bateaux ?
Dans le même temps, le second souci de l’Italie est de savoir qui est qui dans cette immigration. Peuvent en effet s’immiscer, parmi les candidats au départ, des dizaines de terroristes prêts à tout y compris à une traversée très risquée pour porter le djihad sur le territoire européen.
Enfin, la problématique est aussi géostratégique. L’Italie ne veut pas voir un califat «qui gouverne sur la côte d’en face» selon les propos de la ministre Roberta Pinotti. Et voici que, suite à ces assassinats, l’Egypte emboîte le pas de Rome, et réclame à son tour une intervention militaire d’une coalition en Libye.
Pourtant, le premier ministre Matteo Renzi a calmé le jeu le 16 février. «Il faut de la sagesse, de la prudence», a-t-il déclaré. En tout cas, la situation doit sembler très dangereuse à l’Italie. Son ambassade à Tripoli a fermé ses portes le 15 février et la quasi totalité du personnel a été rapatrié. C’était la dernière ambassade occidentale ouverte dans le pays.
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