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Libye : ce que l'on sait de l'attaque d'un hôtel qui a fait neuf morts dont un Français

L'Etat islamique a revendiqué cette attaque meurtrière menée mardi. Le gouvernement de fait à Tripoli donne une autre version.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'hôtel Corinthia, à Tripoli (Libye), après l'explosion d'une voiture piégée, le 27 janvier 2015. (HAZEM TURKIA / ANADOLU AGENCY / AFP)

L'attaque illustre le chaos qui règne dans la capitale libyenne. Neuf personnes, dont cinq étrangers, ont été tuées, mardi 27 janvier, dans une attaque de plusieurs heures revendiquée par le groupe Etat islamique (EI) contre un hôtel du centre de Tripoli. Francetv info revient sur ce que l'on sait de cet attentat.

Qui sont les victimes ?

Cinq étrangers sont morts au cours de cette attaque : "Un Américain, un Français, deux femmes de nationalité philippine et un Sud-Coréen", a affirmé le porte-parole des opérations de sécurité à Tripoli, Issam Al-Naass.

L'Américain, David Berry, travaillait pour la société de sécurité américaine Crucible. Le Français était pilote d'une compagnie aérienne géorgienne travaillant pour le compte d'une entreprise libyenne. Le Sud-Coréen occupait le poste d'assistant du pilote et les deux Philippines étaient des hôtesses.

Une sixième personne, de nationalité inconnue, prise en otage par les assaillants, a péri plus tard, lorsque les hommes armés se sont fait exploser. Trois membres des services de sécurité ont également été tués, et cinq personnes blessées.

Comment s'est déroulé l'assaut ?

L'assaut contre l'hôtel Corinthia a commencé le mardi matin par l'explosion d'une voiture piégée devant l'établissement.

Trois hommes armés ont ensuite pénétré dans l'hôtel avant d'être pourchassés par les forces de sécurité relevant du gouvernement pro-Fajr Libya, qui détient le pouvoir à Tripoli. Les cinq étrangers ont été tués par balle pendant l'assaut.

Selon une autre source, citée par Libération, le groupe d'assaillants comptaient cinq membres. "Ils sont entrés dans le lobby et ont fait feu abondamment. Les rares clients présents et une partie du personnel ont pu fuir par une porte de derrière donnant sur le parking souterrain", relate le journal.

L'attaque s'est achevée en milieu d'après-midi avec la mort des trois assaillants, qui ont fait exploser leurs ceintures alors qu'ils étaient "encerclés" au 24e étage, selon le porte-parole des opérations de sécurité à Tripoli. Cet étage est normalement réservé à la mission diplomatique du Qatar, mais aucun diplomate ne s'y trouvait au moment de l'attaque, selon une source de sécurité.

Qui est derrière cette attaque ?

La branche libyenne du groupe Etat islamique a affirmé, dans un message sur Twitter, que ses membres avaient pris d'assaut l'hôtel. Elle a ensuite diffusé la photo d'un des auteurs de l'attaque, présenté comme "Abou Ibrahim Al-Tounsi ["Al-Tounsi" signifie "le Tunisien"], le premier kamikaze à avoir lancé l'attaque contre l'hôtel Corinthia". 

Cependant, les autorités qui contrôlent de fait Tripoli livrent une autre version. La capitale libyenne est tenue par Fajr Libya, une puissante coalition de milices notamment islamistes, qui a installé un gouvernement parallèle après avoir chassé le gouvernement reconnu par la communauté internationale.

Le chef du gouvernement autoproclamé en Libye, Omar Al-Hassi, se serait trouvé à l'intérieur de l'hôtel au moment de l'assaut, mais il aurait été évacué sain et sauf. Dans un communiqué, le gouvernement parallèle affirme que "les auteurs de l'attaque voulaient tuer Omar Al-Hassi". Ils imputent cet attentat non pas à l'EI, mais au "criminel de guerre Khalifa Haftar", un général controversé qui a lancé ces derniers mois une opération pour reprendre Benghazi aux groupes armés islamistes contrôlant la ville. "Le but de Haftar est de montrer que Tripoli vit dans l’insécurité. Pour cela, il utilise le label de l'Etat islamique, mais c’est un leurre", commente un porte-parole du gouvernement parallèle cité par Libération.

De son côté, le gouvernement officiel, retranché à Al-Baida, dans l'est du pays, a condamné "l'attaque terroriste revendiquée par des takfiris [extrémistes sunnites]". Il a estimé dans un communiqué que "les milices qui régnaient sur Tripoli étaient responsables de l'état d'anarchie et de l'absence de sécurité".

Dans quel contexte a-t-elle été perpétrée ?

Depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, les autorités de transition n'ont jamais réussi à imposer leur pouvoir face aux nombreuses milices, formées d'ex-rebelles.

Le gouvernement et le Parlement reconnus par la communauté internationale, chassés de Tripoli, siègent dans l'est de la Libye. Les milices rivales pro et antigouvernementales continuent à se disputer les territoires et la manne pétrolière au prix de combats meurtriers.

Malgré la trêve annoncée par les milices en vertu d'un accord conclu à Genève (Suisse) en janvier, les combats meurtriers continuent, notamment à Benghazi, dans l'est du pays, où le général Haftar, soutenu par les forces gouvernementales, tente de reprendre la ville. Les violences ont fait 22 morts et 68 blessés à Benghazi en 24 heures, a affirmé, lundi soir, une source de sécurité.

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