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La mort de Kadhafi évite-t-elle un procès gênant ?

La mort du "Guide" libyen à Syrte met fin à la perspective d'un long procès, qui risquait de diviser le pays et de gêner certains gouvernements étrangers, et des compagnies pétrolières, qui ont signé de nombreux accords depuis le retour de la Libye dans le concert des nations au début des années 2000. Mais elle empêche les nouvelles autorités de démontrer leur capacité à mettre en place des structures judiciaires démocratiques.
Article rédigé par franceinfo
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La Libye ne connaîtra pas de long procès à la Milosevic ou à la Saddam Hussein. La mort de l'ex-“Guide” de la révolution libyenne dans la ville de Syrte ce matin éteint automatiquement toute procédure éventuelle.

Un procès qui s'annonçait fleuve et à haut risque. Le cas d'Hosni Moubarak en Egypte montre les tensions que provoquent les audiences et celui de Kadhafi aurait risqué de rallumer des divisions dans un pays déchiré. Mais d'un autre côté, sa mort empêche le nouveau pouvoir de démontrer sa capacité à mettre en place une structure judiciaire démocratique. Le procès de Saddam Hussein, en Irak, avait été reconnu, même si les conditions de son exécution avaient été contestées.

Cynisme

La perspective de voir révélées des informations potentiellement gênantes pour certains gouvernements ou pour des compagnies pétrolières s'éloigne aussi. En effet, depuis que la Libye kadhafiste est sortie de son isolement, par le truchement de sa lutte conte al-Qaïda, au début des années 2000, des milliards de dollars de contrats ont été signés. Ils concernaient la reconstruction du pays et de ses infrastructures pétrolières. Entre les négociations menées avec plusieurs Etats occidentaux et les accords conclus avec des compagnies pétrolières telles l'Italienne ENI, la française Total ou la britannique BP, un Kadhafi dans le box des accusés aurait pu faire des révélations peu souhaitées par les différents protagonistes.

Sa mort pose aussi une autre question, après l'élimination de Ben Laden et les “attaques ciblées” portées contre des chefs talibans ou d'Al Qaïda : “Prétendre qu'il vaut mieux pour tout le monde qu'il ait été tué et non capturé revient à dire que la voie légale présente des désavantages, ce qui équivaut à rendre les armes face au cynisme”, dénonce Rosemary Hollis, qui dirige les études proche-orientales à la City University de Londres. Et tout comme Ben Laden, sa mort violente risque, pour certains, d'en faire un martyr.

Grégoire Lecalot, avec agences

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