L'érosion côtière fait des ravages, plusieurs capitales africaines menacées
De Dakar à Abidjan, de Cotonou au Cap, la mer grignote les côtes africaines à raison d’un à six mètres par an, estime une étude d'Ibrahima Faye. C’est sur le littoral que sont concentrées la plupart des capitales (Nouakchott, Dakar, Conakry, Freetown, Monrovia, Lomé…). C’est là aussi que vit l’essentiel de la population. A Rufisque, au sud de Dakar, la ligne de côte a reculé à certains endroits d’une centaine de mètres, à Cotonou cela peut atteindre 200 mètres. Le Togo a perdu sa route côtière pour la troisième fois en 40 ans et une bonne partie de sa mangrove.
Certains estuaires sont devenus tellement instables que Keta au Ghana ou Banjul en Gambie font l’objet d’importants travaux pour ne pas être séparées du continent. «La majeure partie du littoral se caractérise par des formations sableuses offrant peu de résistance à l'action des courants... Sans grands travaux d'adaptation, plusieurs capitales ouest-africaines sont menacées de disparition», affirme une étude menée par l'UICN. L'Afrique fait partie des régions du monde dont les zones littorales et les deltas sont les plus exposés aux risques d'inondation liés à l'élévation du niveau des mers (Nicholls and Tol).
Un scénario inquiétant
L’érosion côtière est un phénomène naturel, causée par les vents, les tempêtes, les courants, les glissements de terrains. Cette avancée de la mer sur les terres est habituellement contrebalancée par l’apport de sédiments charriés par les fleuves et les courants marins. L’extraction de sable pour la construction, dans les fleuves ou les fonds marins, perturbe la morphologie des côtes …
Les grands barrages (sur le fleuve Sénégal, par exemple), l’urbanisation intensive du littoral, ont contribué à l’accélération de l’érosion depuis 20 ans. Les scientifiques affirment que le phénomène est aggravé par l’élévation du niveau de la mer due au changement climatique. Les satellites mesurent cette hausse en continu depuis 1992, et le niveau monte en moyenne de 3 mm par an. Le dernier rapport du Giec prévoit une hausse de 26 cm à 98 cm d’ici à la fin du siècle, et plus encore après 2100 si aucune mesure n’est prise pour le ralentir.
Pour établir ses prévisions, le GIEC prend en compte deux facteurs majeurs : la fonte des glaciers de montagne, des calottes du Groenland et de l’Antarctique d’un coté, et la dilatation thermique de l’eau de l’autre.
Le réchauffement en cours va encore accentuer les phénomènes climatiques intenses: tempêtes, cyclones, houle plus forte qui risque encore de désagréger les côtes. Lorsqu’une tempête coïncide avec une grande marée, comme pour l’ouragan Katrina en Louisiane en 2005 ou la tempête Xynthia en France en février 2010, des milliers de vies sont menacées.
Des villes s'enfoncent dans la mer
Mais cette élévation du niveau de la mer n’est pas uniforme. «La terre n’est pas une boule rigide, elle se déforme sous l’influence de son propre poids», affirme Anny Cazenave, professeur au collège de France. Une déformation due à la surcharge des sédiments accumulés dans les deltas des grands fleuves, au pompage des eaux souterraines ou des nappes de pétrole.
Cette élévation dépend également de la morphologie des côtes (baies ou côtes rocheuses). New York serait plus menacé que Brest. Autre inquiétude, l’affaissement de certaines zones littorales urbanisées. Un phénomène que l’on connaît à Venise, mais que l’on constate aussi à Osaka, Tokyo, Manille ou Shanghai qui s’enfoncent dans la mer.
Certaines grandes villes proches du niveau de la mer risquent la submersion en cas de surcote. Il suffirait d'un mètre d’augmentation du niveau de la mer pour que la ville de New York soit exposée à des inondations régulières, affirment les chercheurs de l’université de Columbia.
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