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Afrique : doper l'entrepreneuriat féminin pour booster le commerce en ligne

L'e-commerce est en plein boom sur le continent, notamment du fait de la crise sanitaire liée au Covid-19. Plus d'inclusion lui serait encore plus bénéfique.

Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une entrepreneure fait ses comptes. L'e-commerce se développe en Afrique, et faire plus de place aux femmes contribuerait davantage à son expansion. (CAIA IMAGE/SCIENCE PHOTO LIBRARY / NEW)

L’essor de l'e-commerce sur le continent africain, favorisé par la pandémie du Covid-19, serait lié à l’entrepreneuriat féminin. Selon une étude de la Société financière internationale (SFI), combler les écarts entre les hommes et les femmes d’ici à 2025 pourrait apporter 14,57 milliards de dollars supplémentaires au commerce en ligne en Afrique en 2030. La condition : "Augmenter le nombre d'entrepreneuses opérant sur des plateformes en ligne" en leur apportant la formation et le financement "leur permettant d'égaler le chiffre d'affaires de leurs homologues masculins". Le marché du commerce électronique pesait 20 milliards de dollars en 2020 et le nombre d'acheteurs en ligne a augmenté en moyenne de 18% par an depuis 2014, contre une moyenne mondiale de 12%, selon la SFI.

La double contribution des femmes

"Le commerce électronique est en plein essor en Afrique, mais nous constatons déjà un creusement de l'écart entre les sexes dans ce secteur", analyse Sérgio Pimenta, vice-président de la SFI pour le Moyen-Orient et l'Afrique. Le rapport de la SFI, publié en mai 2021, note ainsi que si les femmes constituent la moitié des vendeurs actifs dans le commerce électronique, elles dirigent toutefois des structures de plus petite taille et occupent "une place prépondérante dans les segments à forte concurrence et à faible valeur ajoutée"

Pourtant, le commerce électronique représente une véritable opportunité pour les femmes quand il s'agit de réaliser leurs ambitions entrepreneuriales. Sur la plateforme Jumia, un des leaders du commerce en ligne sur le continent africain, 51% des entreprises au Kenya et au Nigeria sont détenues par des femmes, indique l'étude de la SFI. Elle montre aussi, en comparant leur présence au sein des propriétaires d'entreprises formelles entre la plateforme Jumia et les statistiques nationales, que les femmes sont mieux représentées au Kenya et au Nigeria dans le commerce en ligne. Pour valoriser ce vivier, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) a décliné son initiative d'aide à l'e-Commerce (eTrade for all), lancée en juillet 2016, en un volet spécifique pour les femmes en 2019 baptisé eTrade for Women. 

Les femmes peuvent également contribuer au développement de l'e-commerce en tant que consommatrices. Elles sont généralement les principales acheteuses de leur foyer, constate le Centre du commerce international (ITC) dans un rapport paru en décembre 2020. Cependant, elles ne disposent pas toujours d'un compte bancaire, de cartes de crédit ou d'argent mobile. Leur donner l'accès aux solutions de paiement serait un autre moyen de dynamiser le commerce en ligne. 

"Moins de 10% du trafic sur Amazon.com"

Selon les chiffres de l'ITC, le continent compte 631 places de marché en ligne qui ont enregistré 2,2 milliards de visites en 2019. Le trafic sur ces plateformes représentait cette année-là "moins de 10% du trafic sur Amazon.com". Dix pays concentrent 94% de l'ensemble du commerce en ligne en Afrique et l'Afrique du Sud, l'Egypte, le Nigeria, l'Algérie et le Kenya enregistent 78% du trafic. De même, "seuls trois des dix marchés internationaux analysés" sont accessibles aux vendeurs d'une cinquantaine de pays africains. En dehors de l’inclusion, bien d’autres obstacles restent à surmonter pour profiter en Afrique des opportunités de développement offertes par le commerce en ligne. 

En 2017, par exemple, seuls 30% des Africains pouvaient se connecter à Internet. En plus du coût élevé et l’accès limité à Internet en Côte d’Ivoire, une évaluation de la Cnuced publiée en avril 2021 sur les potentialités du développement commerce électronique dans ce pays, note que "près d’un tiers de la population (35%) n’a pas accès à l’électricité, principalement en zone rurale".

En outre, selon l'ITC, 60% des Africains utilisent des téléphones portables pour surfer et les paiements en ligne nécessitent généralement des comptes bancaires et de la confiance. Ainsi, par exemple, en Côte d'Ivoire, d'après la Cnuced, "l’essentiel des paiements est effectué à la livraison, en espèces ou via les paiements mobiles, tandis que les paiements en ligne restent marginaux". Les raisons : "la faible bancarisation de l’économie" et "le manque de confiance tant des consommateurs que des producteurs et prestataires de services". 

D'après une autre enquête de la Cnuced, les entrepreneurs numériques hésitent également à s'engager dans le commerce intra-régional sur le continent parce qu'ils se disent "confrontés à plusieurs défis" : faiblesse de la connectivité et des infrastructures de transport, coût et complexité des procédures de conformité et absence d’un système de paiement harmonisé entre Etats. C'est dans la perspective de faciliter les échanges en ligne que s'inscrit l'initiative Ecom@Africa de l’Union postale universelle lancée en 2016, l'idée étant de mettre à profit le réseau postal africain.

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