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L’exposition "Croyances : faire et défaire l'invisible" de nouveau visible à Paris

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
Publié Mis à jour

Pèlerinages, rites initiatiques, superstitions, sorcelleries, transes… les pratiques religieuses du continent africain vues et interprétées par 16 artistes.

En raison de l’épidémie de coronavirus, l’Institut des Cultures d'Islam (ICI), dans le XVIIIe arrondissement de Paris, a dû fermer ses portes. L’exposition "Croyances : faire et défaire l'invisible" a pu continuer à vivre, mais uniquement en ligne. A partir du 16 juin 2020, l’ICI rouvre ses portes. (Re)découvrez "en vrai" jusqu’au 2 août les pratiques religieuses en Afrique.

"Condition Ovine" (2015) de Nabil Boutros pose les questions suivantes : "Et si on préférait se conformer au discours dominant qui rassure ? Quitte à nier la vérité dont nous sommes témoins ? Quitte à ignorer l’Histoire ?" Ce travail se décline en trois séries parallèles : "Célébrités", portraits de brebis, d’agneaux et de béliers en studio, exaltant ainsi l’individualité de chacun, "Présumés Innocents" montre à la manière d’un reportage les moutons dans les pâturages, et "Champ d’honneur" est le lieu où le sacrifice se fait en masse. La docilité à leur maître les rend coupables, raconte l’artiste.    (NABIL BOUTROS)
Nicola Lo Calzo livre un récit sur le vaudou pratiqué au Bénin et au Togo, dans une installation intitulée "Tchamba" (2017), la figure de celui qui incarne l'esprit des esclaves.        (NICOLA LO CALZO, COURTESY DOMINIQUE FIAT)
  La représentation de l’autorité religieuse séculaire devient un acte de résistance aux schémas dominants avec la série "Black Pope" (2017) de Samuel Fosso. Le photographe est d’autant plus crédible qu’il s’est procuré les vêtements chez Gammarelli, le tailleur officiel des papes, précise "Jeune Afrique".      (SAMUEL FOSSO, COURTESY JEAN-MARC PATRAS / PARIS)
"Le polyptyque monumental MK (Minbar Kadija, 2016), de la série "Aisha in Wonderland" de Maïmouna Guerresi, est une allégorie des métissages culturels et spirituels pratiqués de nos jours. Elle redonne une place primordiale aux femmes qui ont fait l’islam, comme Aïsha ou Khadija, femmes du prophète Mahomet. Avec cette œuvre onirique, l’artiste souligne la dimension spirituelle et quasi mystique du corps féminin qui conduit la prière, fonction traditionnellement réservée aux hommes en islam, comme dans les religions juive et chrétienne», explique "Le Monde".  (MAÏMOUNA GUERRESI, COURTESY MARIANE IBRAHIME GALLERY)
Eric Guglielmi photographie les pèlerins se rendant chaque année à Touba (2005), siège de la confrérie soufie des mourides au Sénégal. "Par des cadrages resserrés, il capte l’atmosphère de cette ville sainte qui accueille chaque année plusieurs millions de fidèles, en particulier à l’occasion du Magal célébrant le départ en exil du Cheikh Ahmadou Bamba. Fondateur de la confrérie Mouridiyya en 1887, il incarna la résistance pacifique au pouvoir colonial français qui le contraignit à quitter le pays pendant sept ans. Il est aujourd’hui encore considéré comme l’une des plus grandes figures d’Islam en Afrique", indique l’ICI.    (ERIC GUGLIELMI ADAGP, PARIS, 2020)
"Tatsuniya" (2017) de Rahima Gambo orchestre une fable contemporaine sur la résilience, suite aux exactions du groupe terroriste Boko Haram dans un village du Nigeria. Elle a voulu montrer comment on pouvait créer de nouvelles croyances, de nouveaux rituels pour résister, pour résilier, pour vivre ensemble dans un pays comme le Nigeria dans lequel elle vit", explique Jeanne Mercier, commissaire de l’exposition et cofondatrice de la plateforme Afrique in Visu dans un entretien à RFI.      (RAHIMA GAMBO)
Depuis plus de 15 ans, Bruno Hadjih mène un travail photographique autour du soufisme. En allant à la rencontre de différentes confréries à travers le monde, il cherche à transmettre l’essence de ce courant mystique de l’islam qui prône une expérience possible du divin sur terre. "Wird" (1996-2019) est une série de photos prises en Algérie, qui tire son nom d’une pratique rassemblant incantations, prières et respirations menant à l’extase à travers transes individuelles et collectives.        (BRUNO HADJIH, COURTESY GALERIE MAMIA BRETESCHE)
Bénédicte Kurze et Sanne de Wilde travaillent autour de la gémellité au Nigeria, notamment dans la région Yoruba, à l’ouest, où le taux de naissances de jumeaux est le plus élevé au monde. Avec "Land of ibeji", elles nous content l’histoire de duos qui, selon les croyances, sont adulés ou diabolisés. Pour traduire cette ambivalence, les deux photographes ont réalisé des portraits au festival des jumeaux de Igbo Ora et à l’orphelinat du Gwagwalada.    (SANNE DE WILDE ET BENEDICTE KURZEN / NOOR)
Mohammed Laouli s'intéresse ici à la pratique de la sorcellerie et des rituels au Maroc. Avec "Barouk" (2017), il évoque le Mausolée de Saint Sidi Moussa Doukkali situé à Salé face à l’Atlantique. Chaque lundi, ce lieu de pèlerinage devient le théâtre d’un rituel au cours duquel les femmes souhaitant se marier ou tomber enceinte sacrifient une poule noire en la jetant dans l’océan. Les volailles atterrissent en fait dans les mains d’hommes habitant les grottes situées sous la falaise.        (MOHAMMED LAOULI, COURTESY LE CUBE INDÉPENDANT ART ROOM)
Giya Makondo-Wills a capté pendant deux ans (2016-2018) le rite initiatique du baptême en Afrique du Sud où l'interaction complexe entre le christianisme et la religion ancestrale est omniprésente. L’artiste étant à la fois britannique et sud-africain, cela se manifeste aussi au sein de sa propre famille, où il est courant d'invoquer Dieu et les dieux. Il aborde avec la série "They Came From The Water While The World Watched" le choc des croyances du point de vue du colonisateur et du colonisé.      (GIYA MAKONDO-WILLS)
Vidéo, écriture, photomontage… différents médiums traversent les œuvres de Josèfa Ntjam. Son travail influencé par la science-fiction s’articule autour de mondes possibles, des "futuribles" des rituels ancestraux à internet.        (JOSÈFA NTJAM)
Léonard Pongo mène un travail artistique sur le long terme en République démocratique du Congo. "The Necessary Evil" (2013) nous plonge dans l’univers des églises de réveil de Kinshasa et du Kasaï. Comptant des millions de fidèles sur le continent africain, ces églises qui mêlent des rituels protestants à des superstitions locales mettent l’accent sur la possession, les miracles, les guérisons et la prophétisation. Alternant extraits vidéos en noir et blanc et en couleurs, photographies, sons, paroles, musique et témoignages, l’œuvre joue sur le décalage des rythmes, des ambiances et des registres.        (LÉONARD PONGO)
Avec "The Djinni Diaries - Recipes" (2017-2019), la photographe Btihal Remli présente les ingrédients permettant de réaliser toutes sortes de recettes magiques. Des recettes qu’elle a découvertes au cours de ses voyages au Maroc, généralement utilisées pour faire fuir ou demander l’aide de djinns (créatures surnaturelles bonnes ou mauvaises).    (BTIHAL REMLI)
Avec Premium Connect, Tabita Rezaire propose de décoloniser internet. Elle explique sa démarche sur le site Prenez ce couteau : "Dans ma vidéo Premium Connect (2017), je partage une autre généalogie des sciences informatiques. Les recherches en éthnomathématiques attribuent la naissance des mathématiques binaires au système divinatoire Yoruba. Il y aurait eu une migration de savoirs – notamment du protocole binaire du système de divination Ifa- depuis l’Afrique de l’Ouest vers l’empire Moor puis l’Europe –, et cette transmission aurait contribué au développement du code binaire nécessaire à tous nos circuits digitaux."    (TABITA REZAIRE)
  Seumboy Vrainom :€ se qualifie d’apprenti chamane numérique. Avec ses performances décalées, il détourne les codes des rituels traditionnels pour les appliquer aux nouvelles technologies. L’artiste propose un dialogue méditatif avec enceinte connectée et invocation collective du wifi précise l’ICI.      (SEUMBOY VRAINOM :€)

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