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La tempête monétaire des Brics au centre du G20

Les Brics subissent les anticipations de durcissement de la politique monétaire américaine. Résultat, les capitaux de ces pays (40% de la population mondiale) ont tendance à filer vers les Etats-Unis, à la recherche d’éventuels meilleurs rendements. Au risque de déstabiliser leurs économies.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
La roupie indienne a perdu 25% de sa valeur face au dollar. (MANJUNATH KIRAN)

Les monnaies de nombreux pays émergents sont en train de baisser, victimes de fuites de capitaux. Un phénomène qui touche notamment les Brics (acronyme pour désigner le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud). Ce sont dans ces économies que s'est faite la croissance, alors que les pays développés, paralysés par la crise, étaient en stagnation ou en récession.

Maintenant que des signes positifs apparaissent dans les économies occidentales, les capitaux se dirigent vers les pays développés et notamment les Etats-Unis. C’est ainsi que la roupie indienne a perdu un quart de sa valeur depuis mai (dont 8% pour le mois d’août). Phénomène quasi identique au Brésil, mais dans de moindres proportions. Le Réal a vu sa valeur chuter de 15% face au dollar américain également depuis mai. D’autres pays sont touchés, à commencer par la Turquie, mais aussi l’Indonésie ou la Malaisie.

 
La faute des Etats-Unis ?
Principale explication: les intentions de la banque centrale américaine d’arrêter sa politique d’achats d’actifs. En clair, Ben Bernanke, le patron de la Fed, a laissé entendre qu’il allait cesser d’inonder le marché de capitaux, ce qui devrait provoquer une remontée des taux.
 
La croissance se renforce dans la plupart des pays riches, l'Europe est sortie de récession, mais «il existe des risques liés à la fin des mesures de relance aux Etats-Unis», indiquait à la veille du G20 de Saint-Pétersbourg une conseillère du Kremlin. Les Etats-Unis «devraient être conscients des répercussions de leur politique et prendre leurs responsabilités en ce qui concerne la stabilité de l'économie mondiale», a estimé, pour sa part, le vice-ministre chinois des Finances, Zhu Guangyao.
 
Pour apaiser les marchés, la sous-secrétaire américaine du Trésor Lael Brainard a tenu à rassurer en affirmant que si la politique de la Fed devenait moins généreuse, cela serait «parce que l'économie américaine se renforce, ce qui est clairement positif pour l'économie mondiale». Sous-entendu, la demande américaine devrait remplacer l'offre de capitaux.
 
Les Brics représentent plus du quart des richesses et 40% de la population de la planète. Selon les experts de la société de recherche IHS Global Insight, 44 milliards de dollars ont quitté les marchés émergents depuis trois mois, et le mouvement ne fait que commencer.
 
«Les marchés émergents constituent le moteur de la croissance mondiale depuis la crise financière de 2007, mais les afflux de liquidités de l'ordre du millier de milliards de dollars par an qu'ils ont reçus ces dernières années étaient clairement liés à la réaction monétaire des pays occidentaux à leurs propres crises», rappelle Jan Randolf, économiste chez IHS.
 
La faute d’une croissance en recul ?
D’autres explications sont possibles pour expliquer ces mouvements monétaires, comme l’affaiblissement de la croissance dans ces pays émergents. Ainsi en Inde, la croissance est passée de 8 à 5% en 2012-2013. D’une manière générale, la croissance des Brics est plus faible, même si les pays développés rêveraient de tels chiffres. Au Brésil, la croissance affiche un joli 3,3%, mieux qu’en 2012, mais loin des 7,5% des années précédentes. 
 
En Chine, la croissance hésite, tout en affichant des chiffres plus faibles. Ces chiffres peuvent contribuer aussi aux mouvements de capitaux observés ces derniers mois. «C’est la conjonction de ces deux facteurs qui les fragilisent. Cela met nombre de pays émergents en grande difficulté en raison de l’impossible choix à faire en matière de politique économique. Durcir la politique économique comme l’ont fait le Brésil et la Turquie sur le plan monétaire (hausse des taux d’intérêt) reflète la crainte de voir l’inflation se développer en raison de la dépréciation de la monnaie», écrit  Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez Natixis.

Quelles initiatives ?
Lors du précédent sommet du G20, les Brics avaient déjà pointé du doigt les risques que faisaient courir les turbulences sur les marchés financiers internationaux  pour la stabilité mondiale. «La normalisation à venir des politiques monétaires a besoin d'être calibrée», ont-ils rappelé à Saint-Petersbourg. Aujourd’hui, alors que les capitaux déversés par les Américains regagnent les pays développés, les pays émergents s’inquiètent de changements trop rapides des politiques monétaires. Dans une note publiée en amont du G20, le FMI mettait en garde contre des «ajustements désordonnés».

Pour cela, les Brics ont redit leir volonté de créer un fonds commund de 100 milliards de dollars. Ce fonds doit permettre de contenir les effets «des fluctuations des marchés des changes». Une sorte de mini FMI destiné à stabiliser leurs économies.
 
Reste encore à mettre en place ce fonds alors que des tensions sont apparus entre les Brics eux-mêmes. La du bon rythme à trouver sur la fin des politiques monétaires a semble-t-il agité les débats de ce G20, puisque Vladimir Poutine a reconnu que «la nécessité de trouver une équilibre optimal entre l'assainissement budgétaire et le soutien à la croissance est ressorti dans des discussions animées».

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