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Afrique du Sud: le procès de Rivonia reconstitué grâce à des hologrammes
Dans l'histoire de l'Afrique du Sud, le procès de Rivonia est incontournable. Il signe la condamnation de Nelson Mandela et des figures emblématiques de la lutte contre l'Apartheid à la prison à vie. De cet épisode historique, il ne reste que des sons. Restaurés en France par l'Institut national de l'audiovisuel (Ina), ces derniers servent de support à une reconstitution holographique.
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Revivre quelques minutes du procès de Rivonia et surtout le célèbre plaidoyer de Nelson Mandela, icône de la lutte contre l'Apartheid et premier président noir de l'Afrique du Sud post-ségrégationniste, grâce à une prouesse technique: c'est le pari d'un spectacle d'hologrammes, I am prepared to die - Mandela, le procès historique, présenté les 5 et 6 avril 2018 à Paris. Le projet, une idée originale du Forum des Images, a pris forme grâce à la coopération entre l'Institut national des archives (Ina), en France, et les Archives nationales (Narssa) du département des Arts et de la culture d’Afrique du Sud.
Après avoir été arrêtés le 11 mars 1963, plusieurs membres de l'Umkhonto we Siswe, une branche du Congrès national africain (ANC), sont jugés avec Nelson Mandela, qui croupit déjà dans les geôles du régime ségrégationniste sud-africain, entre octobre 1963 et juin 1964. Durant quelque 20 minutes, la reconstitution holographique plonge le spectateur dans le contexte historique, avec des images d'archives, avant d'ouvrir les portes de la salle d'audience de la cour de Pretoria. Le récit s'appuie sur les deux modes de défense imposés aux accusés: l'interrogatoire ou le plaidoyer.
Le spectateur voit alors l'hologramme du juge Percy Yutar interroger Walter Sisulu qu'il accuse notamment de sabotage, tout comme ses co-accusés, un crime passible de la peine de mort. A cet interrogatoire succède l'extrait de l'émouvant plaidoyer de Nelson Mandela qui a choisi cette option. Prononcé le 20 avril 1964 durant environ trois heures, Madiba y réitère sa détermination à mourir pour défendre le droit à l'égalité des Noirs sud-africains considérés et traités comme des sous-hommes dans leur propre pays. «Le manque de dignité humaine que subissent les Africains est le résultat direct de la politique de la suprématie blanche», souligne-t-il. A l'issue du procès, le 12 juin 1964, Nelson Mandela et ses co-assusés – Walter Sisulu, Govan Mbeki, Elias Motsoaledi, Andrew Mlangeni, Raymond Mhlaba, Ahmed Kathrada et Denis Goldberg – sont condamnés à la prison à vie.
«Un mélange de science et d'histoire»
L'exploitation des précieux enregistrements vocaux fournis par l'Afrique du Sud a permis de mettre des images sur un procès qui n'en possède justement pas. Mais avant, il a fallu un travail de restauration mené par l’Ina et le Laboratoire de recherche historique (Larhra, ENS-Lyon). Le procès a été enregistré sur des supports vinyls, connus sous le nom de dictabelts, qui n'ont pu être lus que grâce à un archéophone, un machine inventée par le chercheur français Henri Chamoux.
L'archéophone, selon le directeur de l'Ina Laurent Vallet, qui s'exprimait le 5 avril 2018 lors d'une projection de l'œuvre à l'église Saint-Eustache à Paris, a permis de «relire et de numériser ces dictabelts». «Il y en avait pour 230 heures. L'Ina s'est donc retrouvée avec cette mission de sauvegarder et de restaurer l'intégralité des enregistrements du procès de Rivonia». Ces derniers sont désormais accessibles aux chercheurs au sein des locaux de l'Ina à la Bibliothèque nationale de France.
«Il y a beaucoup d'autres projets sur lesquels l'Ina travaille pour partager avec le plus grand nombre ce trésor historique que l'Afrique du Sud a bien voulu lui confier», a précisé Laurent Vallet. I am prepared to die - Mandela, le procès historique, que le le patron de l'Ina définit comme «un mélange de science et d'histoire», « est l'un des fruits d'un travail et d'une coopération exemplaires entre l'Ina et la République sud-africaine.» L'ancien président sud-africain Jacob Zuma s'était vu remettre les bandes-son restaurées du procès de Rivonia par son homologue français, François Hollande, le 11 juillet 2016 lors de sa visite officielle en France.
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