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Plan eau : "Il faut complètement revoir notre rapport à l'eau", plaide un chercheur, spécialiste des problématiques de l'eau

Selon Nicolas Roche, "il faut se poser la question d'intégrer la valeur environnementale de l'eau en fonction de sa disponibilité, de son territoire, en fonction de son état et surtout en fonction des usages", insiste-t-il.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Sécheresse cours d'eau manque d'eau rivières Bretagne Ille-et-Vilaine, Le Meu, le 25 juillet 2022. (LUCIE AMADIEU/RADIOFRANCE)

"Il faut complètement revoir notre rapport à l'eau", réagit  jeudi 30 mars sur franceinfo Nicolas Roche, professeur à Aix-Marseille université, chercheur au centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement, spécialiste des problématiques de l’eau. Emmanuel Macron a présenté son plan eau jeudi dans les Hautes-Alpes. Parmi les annonces de ce plan eau, un "plan de sobriété" sur l'eau "d'ici à l'été" dans "tous les secteurs". Le chercheur plaide pour la fin du concept de "ressource illimitée" en eau et un changement de modèle économique ou il faudra "payer l'eau à sa juste valeur".

>>Prix, sobriété, réparation des fuites... Ce qu'il faut retenir du plan eau annoncé par Emmanuel Macron

franceinfo : Est-on arrivé au moment, où tout le monde va devoir intégrer que notre rapport à l'eau va devoir changer ?

Nicolas Roche : Tout à fait. Nous étions dans un système où notre modèle était basé sur un concept de ressource illimitée. Tous nos usages étaient faits en parallèle. Chacun prélevait ce dont il avait besoin : que ce soit pour des usages industriels, pour des usages agricoles, pour des usages urbains, pour des usages domestiques, sans se soucier de ce que faisaient les autres ou sans se soucier de l'état de la ressource. 

"Avec le développement, l'accroissement des besoins et des usages, l'impact du changement climatique qui baisse la disponibilité de l'eau et qui va augmenter les périodes de sécheresse, ce modèle ne peut plus être mis en œuvre. Il faut complètement revoir notre rapport à l'eau."

Nicolas Roche, professeur à Aix-Marseille université, spécialiste des problématiques de l’eau

à franceinfo

On peut dire que la sobriété a marché sur l'énergie cet hiver. Sauf que ce qui a poussé les gens à la sobriété, c'est aussi l'augmentation de la facture d'électricité. Peut-on appliquer le même système à l'eau ?

Le modèle économique de l'eau est crucial. Notre modèle a été créé au milieu des années 1960, sur le principe que "l'eau paye l'eau". C'est-à-dire que les recettes liées à l'eau sont celles de la quantité du mètre cube qu'on va prélever, donc on va facturer ce mètre cube. Ce modèle économique n'incite pas à des économies puisque, plus on va économiser, moins on aura de recettes pour investir dans l'eau. Donc il faut intégrer cette notion d'économie d'eau dans le modèle économique. Il faut intégrer aussi le prix de l'eau. À l'heure actuelle, les gens ne payent pas la ressource, mais seulement les services liés à l'eau, que ce soient les services pour faire l'eau potable ou pour les services des traitements des eaux usées, avec une répartition moyenne de 45-55% entre les eaux potables et les eaux usées.

"Il faut se poser la question d'intégrer la valeur environnementale de l'eau en fonction de sa disponibilité, de son territoire, en fonction de son état et surtout en fonction des usages."

Nicolas Roche, professeur à Aix-Marseille université, spécialiste des problématiques de l’eau

à franceinfo

Faut-il lier la tarification aux usages ?

On parle de tarification progressive, mais il faut qu'elle soit réaliste et dissuasive. Globalement si vous augmentez le mètre cube d'eau de deux euros pour une tranche de 40 à 50 mètres cubes, vous augmentez de 40 euros le remplissage d'une piscine, soit un impact financier très limité. Ce qui est important : c'est vraiment d'arriver à un calcul de la valeur de la ressource. Il faut se dire qu'on a des usages essentiels liés à l'hygiène et à l'alimentation, et ensuite on a des usages récréatifs, de loisirs, de productions pour lesquels, il faudra payer la ressource à sa juste valeur.

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