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Infographies Comment les pluies de la mi-octobre ont permis d'améliorer la situation hydrologique de la France

Les nappes phréatiques et les cours d'eau ont vu leur niveau et leur débit augmenter après les multiples dépressions qui ont touché l'Hexagone.
Article rédigé par Léa Prati
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Une passante se protège de la pluie, le 28 octobre 2021, à Montpellier (Hérault). (PASCAL GUYOT / AFP)

Depuis la mi-octobre, les dépressions et les tempêtes se sont succédé, amenant avec elles des pluies diluviennes sur une partie du territoire. Entre le 18 octobre et le 12 novembre, le pays a enregistré un cumul de pluie moyen de plus de 215 mm, selon Météo-France, qui a affirmé, le 13 novembre, "qu'il fallait remonter à l'année 1993 pour observer un cumul de 196,9 mm entre le 21 septembre et le 16 octobre."

D'après les données pluviométriques quotidiennes fournies par Météo-France, les précipitations les plus fortes ont été mesurées le 19 octobre (19 mm sur la France hexagonale), le 4 novembre (15,7 mm) et le 26 octobre (14,8 mm).

"Si on regarde avant la mi-octobre, on était sur une pluviométrie déficitaire et un sol particulièrement asséché", explique Simon Mittelberger, climatologue à Météo-France. Mais depuis le 17 octobre, date des premières précipitations, la situation s'est totalement inversée. "En quelques jours seulement, on est passé d'une situation digne d'un plein été à un plein hiver", ajoute le spécialiste. En octobre, l'écart à la moyenne 1991-2020 des précipitations s'élevait à +40%. Résultat : l'indice d'humidité des sols, qui mesure l'état de la réserve en eau du sol sur deux mètres par rapport à la réserve utile (eau disponible pour l'alimentation des plantes), est monté en flèche en seulement quelques jours. Entre le 18 octobre et le 6 novembre, l'écart par rapport à la normale 1991-2020 est passé de -42,31% à +29,69%.

Malgré tout, cet indicateur est une moyenne sur l'ensemble du territoire français et peut cacher des disparités. Alors que le temps est très perturbé sur les trois quarts nord du pays, sur le quart sud, le mercure dépasse parfois, depuis le 15 novembre, de plus de 10 degrés les niveaux moyens pour la saison. Dans ces départements, le niveau d'humidité des sols reste en dessous de la moyenne. "On retrouve notamment les Pyrénées-Orientales, les Bouches-du-Rhône, l'Aude, l'Hérault, le Gard", explique le climatologue.

Des nappes phréatiques plus ou moins réactives

Dans les régions où la pluie a été intense, celle-ci a participé à l'humidification des sols. Lorsqu'ils sont chargés, ils facilitent et accélèrent le trajet de l'eau jusqu'aux nappes. "C'est ce qu'on appelle la conductivité hydraulique : plus le sol est humide, plus l'infiltration de l'eau sera rapide", détaille Alain Dupuy, professeur d'hydrogéologie à l'Institut polytechnique de Bordeaux (INPB). Partout où il pleut, les nappes se rechargent, mais pas forcément à vitesse égale. Au 15 novembre, 56,58% des nappes phréatiques avaient un niveau supérieur aux normales, d'après les calculs faits par franceinfo à partir des données du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Un mois plus tôt, ce niveau s'élevait à seulement 20,41%.

"L'évolution du niveau des nappes est contrastée selon le cumul local des pluies, mais aussi selon la réactivité des nappes", explique le professeur d'hydrogéologie. Un avis partagé par le BRGM, qui a rappelé, lors d'un point presse jeudi 16 novembre, que les nappes inertielles – les moins réactives – peuvent mettre "jusqu'à trois mois pour se recharger". Comment expliquer cela ? "L'eau doit prendre des chemins labyrinthiques pour atteindre la nappe, parfois plus profonde", illustre Violaine Bault, hydrogéologue au BRGM. Pour voir l'effet des précipitations sur ces nappes, il va donc falloir attendre quelques jours, voire plusieurs semaines.

Les autres types de nappes, appelées nappes réactives, "ont déjà bien entamé leur recharge depuis les pluies de la mi-octobre", pointe Violaine Bault. Ces masses d'eau souterraines, plus proches de la surface du sol et situées dans un terrain favorable à l'infiltration, se rechargent et se déchargent très vite. Dans le Pas-de-Calais, comme à Blendecques, près de Saint-Omer, la nappe atteint des niveaux si élevés que "des risques ponctuels et localisés de nouvelles inondations par remontée de nappe sont envisageables", prévient la scientifique.

Malgré "ces bonnes nouvelles", il convient de rester vigilant, selon Alain Dupuy. "Nous ne sommes qu'en automne, ce n'est que le début de la période de recharge des nappes, souligne-t-il. A l'heure actuelle, la situation s'est particulièrement améliorée. Mais s'il s'arrête de pleuvoir dans deux semaines et qu'il n'y a plus une goutte jusqu'en mars, on se retrouvera à nouveau dans une situation de crise."

Des cours d'eau "tributaires de la météo"

Le constat est le même pour les eaux de surface. La situation des cours d'eau s'est nettement améliorée depuis l'arrivée des pluies à la mi-octobre. Comparée aux nappes phréatiques, la variation du débit des cours d'eau est beaucoup plus réactive aux intempéries. "On est tributaires de la météo", explique le Service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations (Schapi) à franceinfo. Résultat : les cours d'eau situés sur le flanc ouest du pays, le Nord-Pas-de-Calais, le Haut-Rhin et les Alpes enregistrent des débits d'eau largement supérieurs à la moyenne historique (1990-2020). Certains d'entre eux sont placés en vigilance jaune ou orange par Vigicrues, le service d'information sur le risque de crues en France. C'est notamment le cas de la Lys, une rivière du Pas-de-Calais. Un débit moyen de +563,4% par rapport aux normales a été enregistré dans la commune de Delettes, causant d'importantes inondations.

"La pluie a été assez copieuse sur ces territoires et ça se ressent dans les cours d'eau", détaille le Schapi, qui ajoute que, pour autant, "il existe certaines nuances selon les régions". En effet, le pourtour méditerranéen ainsi que le Puy-de-Dôme, la Loire, la Haute-Loire, l'Ardèche et la Drôme sont encore touchés par des déficits au niveau de l'eau de surface. De manière générale, "on est plutôt sur des niveaux assez élevés par rapport aux normales de saison", explique le Schapi. Et qu'en est-il des mois à venir ? "Les cours d'eau ont un effet mémoire : ils gardent l'eau jusqu'à ce que tout se soit écoulé dans la mer ou l'océan, mais si les précipitations persistent, le niveau des cours d'eau sera maintenu." C'est, en effet, ce que prévoit Météo-France pour les prochaines semaines. "Ce scénario pluvieux devrait persister sur le prochain trimestre", conclut Simon Mittelberger.

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