: Reportage "Ça nous permet de ne pas faire n'importe quoi" : à Marseille, la pêche urbaine séduit de plus en plus de jeunes des quartiers nord
Alors que le soleil se couche sur le quartier de l'Estaque, à Marseille, Jalal, 21 ans, installe sa canne à pêche. Lui et ses amis font partie de ces jeunes des quartiers nord de la ville qui profitent de leur temps libre, en été, pour s'adonner à leur nouvelle passion : la pêche. À la tombée de la nuit ou tôt le matin, ils sont de plus en plus nombreux à se balader la canne à la main, et notamment depuis le Covid. À l'échelle de la France, en 2023, 30% du 1,5 million de pêcheurs encartés ont moins de 25 ans. Ce chiffre progresse légèrement chaque année, sans compter tous ceux qui pratiquent cette activité sans être licenciés.
À l'Estaque, Jalal est en pleine session. "Le plomb est directement dans l'eau et on attend que ça morde un tout petit peu. Et après, on mouline. Ça fait deux ou trois semaines que je fais ça, et j'y vais trois à quatre fois par semaine", assure le jeune Marseillais. Au bout de seulement 30 secondes, il pêche un poisson : "Il est beau en plus, lui, purée ! Il ne faut pas le faire tomber". En deux ou trois heures, cette équipe de pêcheurs a déjà rempli un bocal.
"Je ne sais pas vraiment ce qu'on pêche, je ne suis pas un pro".
Jalal, un jeune Marseillaisà franceinfo
"On pêche du poisson", s'amuse Yohan qui, lui, est chargé de mettre les verres au bout des cannes. J'ai rencontré un monsieur qui, lui, était un pro et qui m'a initié. Il m'a tout appris, le montage, les hameçons. Et depuis, ça fait trois ans que tous les étés, j'en profite au maximum".
Une activité "productive"
Ensemble, ils tordent le cou aux clichés sur les jeunes des quartiers nord de la ville. "Pêcher, ça nous permet d'utiliser notre temps pour une bonne activité, du temps qu'on pourrait perdre en faisant d'autres choses. Surtout quand on est issus de Marseille et des quartiers nord. Ça nous permet d'être productifs et surtout, de ne pas faire n'importe quoi. Comme on dit ici, de ne pas "faire terre brûlée", estime Yohan.
La pêche permet aussi à ces jeunes de "déconnecter". "Je ne suis pas patient de base, confie Jalal. Mais quand je vais à la pêche, ça ne me dérange pas du tout de rester trois heures, d'être 'calé', de regarder le ciel et d'être pensif. Le fait de se dire qu'il ne faut pas rester collé à son téléphone et que la vie, ce n'est pas que ça".
"C'est un peu comme le casino, on ne sait pas à quoi s'attendre. On ne sait pas quand ça va mordre".
Jalalà franceinfo
"C'est vraiment cool cette excitation, de se dire qu'à tout moment, on peut avoir une énorme dorade ou un poisson de deux kilos. Et quand on pêche, on parle de tout. Mais j'ai l'impression qu'on parle de sujets un plus sérieux, comme la politique, la vie, la mort", poursuit le jeune homme.
Il est aussi question, selon Jalal, du matériel acheté à la boutique du coin : "Je me suis équipé pour 100 euros. J'ai acheté les appâts, les hameçons, le plomb, de quoi faire le montage de la canne à pêche. On essaie de rentabiliser en prenant le plus de poissons comme maintenant, puisqu'on va les manger. On va vraiment les déguster". Cette bande de copains n'est pas près de se coucher, puisque tous continuent à pêcher à la lampe frontale.
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