Retraites complémentaires : pourquoi vous devez vous sentir concernés par les négociations
Une nouvelle réunion entre syndicats et patronat est prévue, vendredi, pour tenter de sauver l'Agirc et l'Arrco. Les mesures envisagées concernent les salariés et retraités du privé, soit 30 millions de personnes.
Une situation grave ou désespérée ? Les réserves de l'Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres (Agirc) et de l'Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (Arcco) fondent comme neige au soleil.
Le déficit de la première atteignait 1,24 milliard d'euros en 2013, celui de la seconde, 405 millions d'euros. "Si rien n’est fait, l’Agirc aura épuisé ses réserves en 2018, et l’Arrco en 2027", expliquent Les Echos. Une nouvelle séance de négociations débute vendredi 20 mars entre partenaires sociaux - syndicats et patronat -, qui gèrent ces deux régimes.
Combien de personnes sont concernées ? "Plus de 18 millions de salariés du privé, dont 3,8 millions de cadres, auxquels s'ajoutent 12 millions de retraités, soit au total 30 millions de personnes", détaille à francetv info Philippe Pihet, secrétaire confédéral de FO en charge du dossier. Vous ne vous sentez pas concerné ? Vous avez tort. Francetv info vous explique pourquoi.
Salarié du privé, vous risquez de cotiser davantage
Comme l'explique Le Figaro dans la vidéo ci-dessous, les comptes ont commencé à déraper sérieusement à partir de la crise économique de 2008.
Quelles sont les pistes d'économies possibles ? "Il y en a trois, énumère Philippe Pihet. Le montant de la cotisation, l'âge de départ à la retraite, et le montant de la pension versée aux retraités."
Vous êtes salarié du privé ? Regardez votre feuille de paie : la cotisation pour votre retraite complémentaire (destinée à l'Arcco) s'élève à 3,10% de votre rémunération et 4,65% à la charge de votre employeur. Si vous êtes cadre, vous cotisez non seulement à l'Arcco, mais aussi à l'Agirc, caisse spécifique des cadres.
Philippe Pihet avoue pencher en faveur de l'augmentation de la cotisation pour rétablir les comptes. "Un point de cotisation supplémentaire, ça représente 5,9 milliards d'euros", assure le secrétaire confédéral de FO en charge du dossier. Pas sûr que son point de vue l'emporte. Dans un rapport sur l'avenir des régimes de retraite complémentaire rendu le 18 décembre 2014, la Cour des comptes déconseillait, en effet, d'augmenter fortement les cotisations, jugeant cela aurait des "effets négatifs" sur le coût du travail.
Votre départ à la retraite pourrait être retardé
Si vous êtes salarié du privé, attendez-vous à partir plus tard à la retraite, du moins si vous voulez toucher votre retraite de base et votre retraite complémentaire à taux plein.
Car "du côté du patronat, la ligne est claire : il va falloir reculer les bornes d’âge, comme l'exposent Les Echos. Idéalement, décaler l’ouverture des droits de 62 à 64 ans, et la pension à taux plein de 67 à 69 ans. Une méthode radicale mais efficace pour financer les retraites. Déçu que la mesure n’ait pas été mise en œuvre pour le régime de base dans la loi de janvier 2014, le Medef veut l’appliquer aux complémentaires."
La raison ? L'organisation patronale "parie que les salariés décaleront leur date de liquidation pour ne pas se priver de revenus : les retraites complémentaires pèsent un quart de leur pension totale (non-cadres), voire plus de la moitié (cadres)", poursuit le journal économique.
Vos pensions de retraite vont être rognées
Que se passera-t-il si ce dispositifvoulu par le Medef est adopté ? Si le retraité liquide sa retraite de base avant ses 67 ans, il ne touchera qu'une partie de sa complémentaire. Soit, dans une des hypothèses citées par l'AFP, 60% de sa pension complémentaire à 62 ans, 68% à 63 ans, 76% à 64 ans, 92% à 65, 96% à 66 ans, et 100% à 67 ans. Cette mesure, si elle entre en vigueur en 2017, rapporterait 4,3 milliards d'euros en 2020.
En attendant la mise en œuvre d'un des scénarios mis sur la table des négociations, les partenaires sociaux ont déjà pris les devants. Ils ont décidé de geler en 2015 les retraites complémentaires, qui ne sont plus indexées sur l'inflation.
La pension de réversion d'une veuve d'un salarié du privé est menacée
Parmi les différentes mesures envisagées pour faire 7 milliards d'économies à l'horizon 2020, le patronat aimerait proposer aux couples de retraités mariés un marché. Maintenir à 60% le taux actuel de réversion (qui correspond à une partie de la retraite dont bénéficiait ou aurait pu bénéficier l'assuré décédé après la mort d'un conjoint) à une condition : le ou la défunt(e) aura accepté, au moment de son départ à la retraite, de ne percevoir de son vivant qu'une retraite minorée. Il doit approuver un abattement, à vie, de 5,5% sur sa propre pension.
Si le retraité refuse cette option, il pourra conserver la totalité de sa pension complémentaire. Dans ce cas, sa veuve (ou son veuf) touchera une pension de réversion pouvant être diminué jusqu'à 33%. La mesure permettrait d'économiser 300 millions d'euros d'ici à 2020.
De quoi faire hurler les syndicats. Pour Philippe Pihet, "93% des pensions de réversion concernent des femmes. Ce sont encore elles, en majorité, qui interrompent leur carrière pour élever leurs enfants et qui ont, à l'arrivée, des pensions bien plus faibles que les hommes. La pension de réversion était une façon de compenser cette injustice. Quand les femmes auront des carrières égales aux hommes, on en reparlera."
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