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Pour la Journée mondiale contre le diabète le 14 novembre, retour sur une maladie grave en forte augmentation

Pour l'Organisation mondiale de la Santé, l'"épidémie" pourrait toucher 300 millions de personnes d'ici à 2025 alors qu'elles étaient 30 millions en 1985.2,5 millions de personnes sont traitées en France et une étude de l'Institut de Veille sanitaire du 12 novembre montre une fréquence dépassant les prévisions et pointe des disparités géographiques
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 14min
Taux de sucre dans le sang évalué par un diabétique. (France 3)

Pour l'Organisation mondiale de la Santé, l'"épidémie" pourrait toucher 300 millions de personnes d'ici à 2025 alors qu'elles étaient 30 millions en 1985.

2,5 millions de personnes sont traitées en France et une étude de l'Institut de Veille sanitaire du 12 novembre montre une fréquence dépassant les prévisions et pointe des disparités géographiques

L'Organisation mondiale de la Santé tire la sonnette d'alarme en évoquant une épidémie et un nombre de cas en constante augmentation: de 30 millions en 1985, le nombre des malades est passé à 135 millions en 1995, à 177 en 2000 et à 194 millions en 2003.

Si l'OMS s'attend à un nombre de diabétiques d'environ 300 millions d'ici à 2025, la Fédération mondiale du diabète s'attend plutôt à 330 millions, ce qui équivaut à 6,3% de la population.

Selon l'étude de l'Assurance Maladie extrapolée à l'ensemble de la population à partir des données de remboursement de 56,5 millions de personnes (régime général), la France comptait 2,5 millions de diabétiques traités en 2007, soit un taux de prévalence (fréquence) proche de 4%, dépassant les prévisions pour 2008 (3,75%).

Une croissance liée à la progression du surpoids et de l'obésité, au vieillissement, à la sédentarité, à l'amélioration de l'espérance de vie des diabétiques traités et à l'intensification du dépistage, selon l'étude.

Si le diabète est devenu la quatrième ou cinquième cause de mortalité dans la plupart des pays développés, il a d'abord touché essentiellement des pays riches ou développés, mais s'étend maintenant dans les pays pauvres ou nouvellement industrialisés.


Mais, au fait, qu'est que le diabète ?
La maladie se caractérise par une augmentation anormale du taux de glucose (sucre) dans le sang, qui peut entraîner des complications au niveau de nombreux organes. Cette anomalie est due à une insuffisance ou une mauvaise utilisation de l"insuline par le corps.

Chez l'homme normal, la glycémie oscille en permanence entre 0,50 et 1,50 g par litre de sang. Selon les critères de l'Organisation mondiale de la santé, il y a diabète quand la glycémie à jeun est supérieure ou égale à au moins deux reprises à 1,26 g/l.

La maladie (on distingue plusieurs types de diabète dont le type 2 représente près de 90% des cas de diabète dans le monde) peut provoquer de graves complications au titre de maladies cardio-vasculaires (le risque de développer une maladie cardio-vasculaire est doublé chez les diabétiques et près d'un malade sur deux décède d'un accident cardio-vasculaire. Le diabète est également un facteur de risque important d'accident vasculaire cérébral, de neuropathie, de troubles pouvant conduire à la cécité, d'insuffisance rénale chronique, de nécroses des tissus pouvant conduire à l'amputation.

Le diabète peut longtemps passer inaperçu (500.0000 à un million de diabétiques en France s'ignoreraient). Cinq ou dix ans peuvent s"écouler entre son apparition et son diagnostic, qui est trop souvent fait à l"occasion d"une complication.

Tous les diabètes ont en commun des urines abondantes (polyurie), une soif intense, une fatigue chronique voire un amaigrissement malgré une faim tenace. Troubles parfois associés à une vision défaillante.

Différentes formes de diabète

Différentes formes
Le diabète de type 1 ou diabète de type sucré dû a un gène. Non-héréditaire.
Le diabète de type 2 ou diabète de type gras, lié aux conséquences d'une mauvaise alimentation trop riche en graisses et en sucres.
Les diabètes de type MODY (Maturity Onset Diabetes in the Young), englobant plusieurs formes de diabètes héréditaires
Lediabète gestationnel et les diabètes secondaires à des maladies, notamment celles du pancréas.
Lediabète insipide lié à un défaut de la réabsorbtion d'eau au niveau du rein se manifestant par des urines abondantes et non sucrées dû à une carence totale ou partielle de l'hormone antidiurétique ADH.
Le diabète rénal lié à un défaut de réabsorption du glucose par le rein, donnant une urine sucrée sans anomalies de la glycémie
Le diabète secondaire, ou syndrôme de Ballinger-Wallace, dû à une mutation de l'ADN mitochondrial (associé à une surdité de perception et caractérisé par une hérédité maternelle).
Le diabète lipoatrophique, ou lipodystrophie congénitale de Berardinelli-Seip (anomalie du métabolisme des graisses).
Le diabète bronzé, ou syndrome de Troisier-Hanot-Chauffard, lié à une hémochromatose, maladie caractérisée par un excès de fer dans l'organisme.

Prévention et traitement

Prévention auprès des populations à risque
L'OMS, qui a mené sur six ans une étude en Chine auprès d'une population sensible, a prouvé que la prévention est à l'origine de la réduction de l'apparition des troubles de près de deux tiers.

L'Organisation mondiale de la Santé préconise ainsi, outre un dépistage en vue d'un traitement plus précoce, un régime alimentaire adapté et une augmentation de l'activité physique concommittente à une baisse de poids. Le tout mené avec une sensibilisation et un programme d'éducation continu.

Des conséquences secondaires positives à ce régime préventif concerneront l"obésité, les maladies cardio-vasculaires et certains cancers d'origine socio-environnementale.

Traitement en cas de diabète déclaré
Divers moyens existent pour diminuer les impacts de la maladie comme traiter de manière précoce l"hypertension artérielle et l"hyperlipémie. En effet, contrôler la glycémie réduit les complications et freine l'évolution vers les formes graves de diabète.

Mais aussi détecter et traiter le plus tôt possible la protéinurie (protéines dans les urines) pour freiner l'évolution vers l'insuffisance rénale.

Il est également nécessaire de prévenir l'ulcération des pieds et leur amputation par une éducation et des soins appropriés. A noter: ils divisent par deux l"incidence des amputations, selon l'OMS.

Les dépistage et traitement précoces des rétinopathies évite également nombre de cécités.

Une lutte plus efficace contre le tabagisme et l'alcoolisme qui aggravent les conséquences du diabète (hypertension et cardiopathie) est également recommandée par l'OMS.

Le diabète, fléau chez les SDF en France

Le 12 novembre 2007, le Bulletin épidémiologique hebdomadaire a publié une enquête selon laquelle les amputations, atteintes de la rétine et des artères des jambes et autres lésions des pieds - en bref, les complications du diabète - sont fréquentes chez les SDF.

Un dépistage du diabète proposé systématiquement dans neuf centres d'hébergement d'urgence parisiens, d'octobre à décembre 2006, a regroupé 488 participants à l'étude, tous volontaires francophones. Parmi eux 35 ont déclaré être diabétiques et deux ont été nouvellement diagnostiqués. Ces diabétiques, essentiellement des hommes, avaient 45 ans en moyenne au moment du diagnostic de la maladie.

Bilan, un quart des SDF diabétiques avaient au moins une complication vasculaire: 32% avaient une atteinte de la rétine et 21% avaient reçu un traitement par laser ophtalmologique; 17% avaient subi une amputation, 6% avaient une artérite des membres inférieurs, pathologie des artères des jambes qui entrave la marche et 35% un risque podologique élevé.

37% de ces diabétiques essayaient de suivre un régime alimentaire, alors que la moitié ne prenait qu'un repas et un petit déjeuner par jour. 73% des SDF diabétiques faisaient de nombreux déplacements dans la journée, 41% avaient des difficultés à se déplacer et, parmi ces derniers, 43% avaient une mobilité réduite permanente.

82% étaient hypertendus, 32% en surpoids et près de la moitié signalait avoir fait une ou plusieurs hypoglycémies sévères durant l'année précédent l'enquête. Cette chute brutale du niveau de sucre sanguin est favorisée, chez les diabétiques traités, par une alimentation insuffisante et mal répartie dans la journée.

Adolescents+diabétiques=vulnérabilité: une étude

Une étude auprès des adolescents
Le 7 novembre 2008, l'Inserm a annoncé le lancement d'une étude auprès de 650 jeunes diabétiques de 11 à 18 ans, Entred-Ado. Elle portera notamment sur la qualité de vie de l'adolescent diabétique.

Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, "C'est au moment de l'adolescence que le patient diabétique est le plus vulnérable: il doit non seulement affronter le passage de la vie d'enfant à celle d'adulte mais aussi répondre aux exigences médicales lourdes de sa maladie".

Les cas de diabète de type 1, survenus avant l'âge de 15 ans, ont augmenté au cours des dernières décennies (avec une incidence actuelle de 15 pour 100.000). "Dans le même temps l'offre de soins en spécialistes pédiatriques hospitaliers s'est appauvrie en France, avec de fortes inégalités géographiques", selon l'Inserm. S'ajoute à cela l'apparition de cas de diabète de type 2 chez l'adolescent.

L'étude sera réalisée en collaboration avec l'Institut de veille sanitaire et l'Assurance maladie. Elle vise à mieux connaître la population adolescente diabétique, en dehors du secteur hospitalier. Un questionnaire médical sera parallèlement envoyé au médecin traitant avec l'accord de l'adolescent. Les premiers résultats sont attendus fin 2010.

Enquête IFOP sur leur connaissance de la maladie

70% des 15-25 ans revendiquent une bonne connaissance du diabète, 73% d'entre eux associant spontanément cette maladie au sucre (dont 48% au "taux de sucre dans le sang". Près d'un tiers évoque également l'insuline au registre des traitements.

97% des jeunes interrogés appréhendent le diabète comme une maladie "qui nécessite une surveillance alimentaire", mais à peine 9% signalent qu'il existe deux principaux types de diabète différents (1 et 2).

Les complications de la maladie restent aussi mal connues des jeunes: 62% se disent surpris d'apprendre que le diabète peut entraîner l'amputation d'un membre et 47% s'étonnent en apprenant qu'il peut conduire à la cécité.

91% des jeunes perçoivent la maladie comme contraignante, mais 26% estiment, à tort, qu'elle "empêche de faire du sport". 48% pensent que l'activité physique n'a aucun impact sur la survenue de la maladie, alors qu'elle peut contribuer à la prévention du diabète de type 2.
Etude réalisée en ligne pour le laboratoire Novo Nordisk, entre le 26 et le 30 octobre, auprès de 807 jeunes de 15 à 25 ans.

Une découverte majeure de chercheurs français

L'équipe de Philippe Valet de l'Institut de médecine moléculaire de Rangueil-Inserm, à Toulouse, a découvert une nouvelle voie que l'organisme utilise pour faire assimiler le glucose par les cellules et qui pourrait déboucher sur la mise au point de nouveaux traitements du diabète le plus répandu. Leurs travaux sur des souris - publiés dans la revue spécialisée américaine Cell Metabolism datée du 5 novembre - font appel à une protéine, l'apeline.

Le sucre, présent dans le sang sous forme de glucose, est stocké dans le foie ou la graisse grâce à l'action de l'insuline. Selon les besoins de l'organisme, le glucose est stocké ou directement utilisé pour assurer le bon fonctionnement du coeur, du cerveau, des muscles, entre autres. Mais la détérioration de ce mécanisme peut survenir parce que le corps ne produit plus d'insuline (diabète de type 1) ou parce que les cellules du foie et des graisses ne réagissent plus à l'insuline (diabète de type 2, le plus répandu). Les cellules ne sont alors plus capables d'assimiler le sucre. Ce qui entraîne une augmentation du sucre dans le sang causant l'apparition du diabète.

Le chercheurs ont mis en évidence une "voie de secours" d'assimilation du glucose par les cellules, reposant sur l'apeline. Cette dernière passe notamment par une "porte d'entrée" différente de celle de l'insuline. L'apeline est une hormone secrétée par la graisse (par des cellules appelées adipocytes). L'augmentation naturelle de sa production chez des obèses serait un moyen utilisé par l'organisme pour retarder la survenue d'un diabète.

Les chercheurs ont activé cette voie en injectant de l'apeline à des souris diabétiques, pour lesquelles les injections d'insuline étaient devenues inefficaces, et ont ainsi réussi à améliorer l'utilisation du glucose par les muscles et la graisse, aboutissant à ramener près de la normale les taux de sucre dans le sang.

Reste à vérifier l'action de cette protéine chez l'homme...

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