"Moi président de la République", je ne ferai pas du Sarkozy... ou presque
Mélange vie privée-vie publique, conflits d'intérêts... Lors du débat d'entre-deux-tours, François Hollande avait épinglé Nicolas Sarkozy et promis de ne pas l'imiter. Y est-il parvenu ?
POLITIQUE - Lui, président de la République, il ne fera pas comme Sarkozy. C'était lors du débat télévisé qui s'est tenu entre les deux tours de l'élection présidentielle, mercredi 2 mai 2012. Sous l’œil mi-agacé mi-médusé du principal intéressé, François Hollande avait détaillé tous les travers de son futur prédécesseur dont il comptait se débarrasser s'il accédait à l'Elysée. Y est-il parvenu ? Pas si sûr.
"... je ne serai pas le chef de la majorité (...), je ne recevrai pas les parlementaires à l’Elysée"
Certes, François Hollande ne reçoit pas les élus PS par fournées entières, en grandes pompes avec caméra et photos de famille sur le perron, comme les invitations de parlementaires de l’ère Sarkozy. Mais il les reçoit quand même. Très discrètement, sans images. "Ils lui font remonter le climat du terrain", note Le Parisien, qui cite un ministre : "A ce rythme-là, il aura reçu les 297 députés PS avant Noël !"
Par ailleurs, même s’il s’en défend officiellement, François Hollande n’a pu se tenir à l’écart du choix du successeur de Martine Aubry à la tête du Parti socialiste. Selon le Canard enchaîné, daté du 12 septembre, il aurait lui-même tranché en faveur d'Harlem Désir, lors d'une conversation au téléphone avec Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault. En tout cas, ses proches, dont Libération avait révélé les agapes, ont largement manœuvré en faveur d’Harlem Désir, "plus transparent et plus contrôlable".
"... il y aura un code de déontologie pour les ministres, qui ne pourraient pas rentrer dans un conflit d’intérêt"
Et code de déontologie il y eut, en effet. Onze jours après son élection et dès le premier Conseil des ministres, "une charte de déontologie" est distribuée aux membres du gouvernement. Cadeaux, invitations, déplacements… un chapitre est consacré à la prévention des conflits d’intérêts. Ce qui n’a pas empêché la polémique d’enfler autour du cas Montebourg. A Bercy, où cohabitent Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, et Pierre Moscovici, ministre de l'Economie, l'attribution à la banque Lazard de l'appel d'offres pour la mise en place de la Banque publique d’investissement a créé une polémique. En effet, la banque Lazard est dirigée par Matthieu Pigasse, nouvel employeur de la compagne d'Arnaud Montebourg, la journaliste Audrey Pulvar, directrice de la rédaction des Inrocks.
Arnaud Montebourg jure n’avoir jamais rencontré le patron de Lazard avant le recrutement d’Audrey Pulvar. Puis dit n’avoir pas été tenu au courant de la décision concernant l’appel d’offres par son voisin au ministère de l’Economie. Il n’empêche, jeudi 13 septembre, deux avocats publient une tribune dans Libération. Intitulée "Montebourg-Pulvar, le soupçon juridique", elle va jusqu’à évoquer la prise illégale d’intérêt, passible de cinq ans de prison, selon l’article L 432-12 du code pénal.
"... je ferai en sorte que mon comportement soit à chaque instant exemplaire"
Trois petits mois et puis s’en vont. La réalité d’une présidence en tant de crise a eu raison de la "présidence normale", déjà largement écornée en juin par l’affaire du tweet de Valérie Trierweiler, qui fit ressurgir les vieux démons du mélange vie privée-vie publique à l’Elysée.
S’il prend toujours le train et la voiture régulièrement, François Hollande s’est rendu "à Evian en hélicoptère et à Rennes en avion", souligne Le Parisien. "Mais on est loin du tout avion de Nicolas Sarkozy, qui avait, par exemple, pris un hélicoptère pour se rendre à Jouy-en-Josas aux universités d’été du Medef, en 2007", rappelle pour FTVi un journaliste qui suit l’Elysée.
"… je ne serai pas président de tout"
Finalement, François Hollande n’est pas moins présent que Nicolas Sarkozy. Si le ton a évolué, le volume est identique. Même cadence de prises de paroles publiques, même rythme de déplacements, même nombre d’interventions télévisées que l'ancien chef de l'Etat sur la même période. Et le président d’exprimer ses positions sur tous les sujets qui font l’actualité, de PSA à la sécurité en passant par Doux et l’éducation.
Il avait également promis, lui président, qu’il ne traiterait pas son Premier ministre en collaborateur. Après une dégringolade dans les sondages, il reprend l'initiative. Dimanche 9 septembre, sur TF1, il annonce être "en première ligne", et décline : "il faut accélérer, j’accélère" . Lui qui, selon nos informations, s'était vu conseiller par son entourage de ne pas donner les prévisions de croissance, "du niveau du Premier Ministre, voire, du ministre", décide le matin même de les rendre publiques. Quitte à déclarer : "Le principe du quinquennat fait qu’on a une présidence plus musclée."
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