Les pilotes du vol AF447 ont lutté pendant plus de 4 minutes avec les commandes de l'appareil avant le crash
C'est une des informations qui ressort des enregistrements des conversations des pilotes du vol Rio-Paris, publiées par le Bureau d'enquêtes et d'analyses et extraits des "boîtes noires" repêchées début mai.
Le vol Rio-Paris AF447 s'est abîmé en mer avec 228 personnes à bord le 1er juin 2009.
La publication du rapport d'étape qui doit expliquer les causes de la catastrophe est toujours prévue d'ici fin juillet.
Après le désengagement du pilotage automatique, l'A330 d'Airbus est monté jusqu'à 38.000 pieds, puis l'alarme de décrochage s'est déclenchée et l'avion a décroché.
Air France incrimine les sondes Pitot...
Pour Air France, les données et les enregistrements de conversations des pilotes du vol Rio Paris révélées par le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) font apparaître qu'une panne des sondes de vitesse a été l'origine de la déconnexion du pilotage automatique.
Dans un communiqué, Air France estime que l'équipage de l'appareil "a fait preuve de professionnalisme" dans la chaîne des événements. Il souligne que "la panne des sondes de vitesse est l'événement initial qui entraîne la déconnexion du pilote automatique et la perte des protections de pilotage associées".
L'hypothèse d'un problème de sondes de mesure de vitesse du type Pitot, fabriquées par Thales et qui équipaient les A330 et A340, a été avancée comme une cause possible du drame. Les Pitot ont été remplacées par d'autres sondes sur toute la flotte Air France après l'accident. Les sondes Pitot de l'épave pourraient être remontées plus tard. Ces petits tubes placés à l'avant de l'appareil givraient à haute altitude, ce qui aurait pu perturber le pilotage.
... le SNPL aussi
Les éléments sur les dernières minutes du vol Rio-Paris
confirment que le givrage des sondes Pitot est "à l'origine de l'enchaînement des faits ayant conduit à l'accident", a estimé vendredi le SNPL, principal syndicat de pilotes français.
"Ce givrage a provoqué une perte d'indications de vitesse fiables, la déconnexion des aides au pilotage et la perte des protections de pilotage à haute altitude", poursuit le SNPL. Les pilotes "se sont retrouvés face à une situation soudaine, extrêmement complexe et totalement déroutante qu'ils ont tentée de maîtriser jusqu'au
bout", estime le syndicat.
"Les ordres du pilote en fonction ont été majoritairement de cabrer", souligne le BEA, précisant que la descente a duré 3 mn 30 pendant lesquelles l'avion est resté en situation de décrochage. "Les moteurs ont fonctionné et toujours répondu aux commandes de l'équipage".
Peu après être entré dans une zone de plus fortes turbulences, les pilotes ont eu des informations de vitesse contradictoires sur leurs écrans pendant un peu moins d'une minute. L'une d'entre elles indiquait "une chute brutale" de la vitesse, selon cette note du BEA qui détaille les circonstances de l'accident mais pas ses causes.
Près de deux minutes 30 avant la fin des enregistrements des boîtes noires, l'un d'entre eux a dit: "on a aucune indication qui soit valable".
Les deux copilotes présents dans le cockpit avant le décrochage de l'appareil avaient prévenu l'équipage qu'ils allaient entrer dans une zone de plus fortes turbulences, selon les premiers éléments fournis par les boîtes noires de l'appareil.
"On devrait attaquer une zone où ça devrait bouger un peu plus que maintenant il faudrait vous méfier là", a dit l'un des copilotes au personnel navigant.
Le commandant de bord est parti se reposer quelques minutes avant le début des incidents. Les copilotes ont tenté de l'appeler plusieurs fois avant qu'il ne rejoigne le poste de pilotage. Il n'a toutefois pas repris les commandes, restées jusqu'à la fin entre les mains d'un de ses copilotes, ont détaillé les enquêteurs.
Sur un vol de ce type, l'équipage est composé d'un commandant de bord et de deux copilotes. Ils peuvent aller à tour de rôle se reposer à condition que deux d'entre eux restent aux commandes.
De forts enjeux judiciaires et industriels
Toutes les vitesses enregistrées étaient alors fausses, sans doute en raison du givrage des sondes de mesure. Le résultat des deux enquêtes, celle conduite par deux juges d'instruction et celle du BEA, revêt de forts enjeux judiciaires et industriels. Airbus et Air France ont été mis en examen en mars pour homicides involontaires.
"Ce que nous publions aujourd'hui, ce ne sont que des constatations et ce n'est pas la compréhension de l'événement", a déclaré Jean-Paul Troadec, le directeur général du BEA, évoquant comme au début de l'enquête une combinaison de facteurs techniques et humains. "Pour comprendre comment tout cela s'est enchaîné, c'est un travail qui commence".
Il a affirmé que le BEA n'avait subi aucune pression d'Airbus ou d'Air France, les seules pressions étant "les pressions médiatiques".
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