Les agriculteurs votent-ils tous à droite ?
Ils seraient 61% à donner leur voix à un candidat de droite dès le premier tour, si l'on en croit le baromètre BVA pour Terre-net.fr, un site internet à destination des agriculteurs. Décryptage.
Tâter le cul des vaches. Lever le coude et goûter tout un tas de spécialités. C’est parti, les candidats à la présidentielle n’ont pas oublié de cocher la date dans leur agenda : le Salon de l’agriculture, porte de Versailles à Paris, est un passage obligé en année électorale.
Et pourtant, il semblerait que cette visite n’y change pas grand-chose, les agriculteurs votent à droite de façon écrasante. Les explications de Pierre Boiteau, directeur des rédactions de Terre-net, portail internet destiné aux agriculteurs et qui publie tous les deux mois un baromètre de leurs intentions de vote en partenariat avec l’institut BVA.
Les agriculteurs votent-ils tous à droite ?
Pierre Boiteau : Très majoritairement : 61% dès le premier tour, selon notre baromètre. Au second tour, ils seraient près de 68% à voter Nicolas Sarkozy, soit 10 points de moins qu’en 2007. Traditionnellement et culturellement, les agriculteurs ont toujours voté à droite.
Pourquoi ?
Par tradition, par habitude. Quand on en parle avec eux, ça vient assez régulièrement sur le terrain des valeurs, et la valeur travail notamment. Ils montrent une vraie différenciation avec le monde salarié. Il ne faut pas oublier que la plupart des agriculteurs sont des chefs d’entreprise !
Vous disposez d’un baromètre des intentions de vote des agriculteurs depuis mars 2011. Quelles sont les évolutions notables ?
On distingue trois mouvements assez forts. D’abord, Nicolas Sarkozy est en tête des intentions de vote depuis un an. Le candidat UMP oscille entre 33% et 35%. C’est une base stable et solide. Mais nettement en dessous de son score en 2007, où il avait recueilli 51% des voix des agriculteurs dès le premier tour.
Ensuite, Marine Le Pen arrive deuxième chez les agriculteurs, et c’est assez nouveau car traditionnellement ils votent moins Front national que le reste des Français. On l’a vu en 2007, où Jean-Marie Le Pen n’avait recueilli que 7% des voix agricoles au premier tour. Or là, dans notre baromètre de fin janvier, la candidate frontiste est encore à 21% ! Mais je dis "encore" car elle chute fortement et régulièrement. Quand nous avons commencé le baromètre, elle était à 30%, à quasi égalité avec Nicolas Sarkozy. Depuis, elle a perdu 9 points et ne cesse de baisser.
La troisième tendance concerne François Bayrou, qui suit la courbe inverse. Alors que le candidat du MoDem était crédité de 5% des intentions de vote des agriculteurs en mars 2011, il a gagné 14 points en un an et est aujourd'hui à 19%.
Pour les autres, François Hollande, le candidat PS, a lui aussi un socle restreint mais solide de 10% à 12% des voix des agriculteurs.
Comment expliquez-vous ces évolutions ?
Pour Nicolas Sarkozy, c’est assez simple, les agriculteurs, comme les Français, sont assez mécontents de sa politique. Globalement, ce sont surtout des désaccords sur la forme plutôt que sur le fond. En 2007, ils avaient beaucoup accroché, là ils semblent assez déçus. On le voit beaucoup sur nos forums : les agriculteurs, y compris ceux qui vont voter pour lui, pensent que Nicolas Sarkozy est plus proche du monde de la finance, des affaires, que du monde agricole.
Pour le Front national, on a vu le même phénomène dans les années 1990 avec un pic très ponctuel de vote protestataire. Il y a un fort mécontentement, ils le montrent, ils le disent, mais plus le vote approche, plus ils se disent : "En fait non, quand même pas."
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