Le projet de loi sur la sécurité du système du médicament était au menu du dernier conseil des ministres le 1er août
Le texte, qui doit notamment traquer les conflits d'intérêt en les rendant passibles de sanctions pénales ou financières, devrait être examiné au Parlement dès septembre.
En raison de travaux, le conseil a été délocalisé à l'hôtel de Marigny. Le prochain conseil des ministres aura lieu le mercredi 24 août, à l'Elysée.
Le projet de loi "relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé" comprend 24 articles et s'articule autour de trois grands axes: la "transparence des liens d'intérêts", la réorganisation de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) qui devient l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et le contrôle du médicament.
Xavier Bertrand a aussi annoncé lundi sur RTL avoir signé le décret d'application créant le fonds d'indemnisation pour les victimes du Mediator. "Le Conseil constitutionnel a validé ce fonds Mediator et dès maintenant, s'ils le souhaitent, comme je viens de signer le décret, tous les patients victimes du Mediator peuvent écrire à l'Oniam (Office national d'indemnisation des accidents médicaux) de façon à pouvoir préparer leur dossier", a déclaré le ministre.
Prévenir les conflits d'intérêts
Pour prévenir les conflits d'intérêts, le texte prévoit une déclaration publique d'intérêt des personnels dirigeants et experts des agences sanitaires lors de leur prise de fonction.
De leur côté, les laboratoires pharmaceutiques auront obligation de rendre publics tous les avantages qu'ils procurent aux médecins, étudiants, associations, établissements de santé, sociétés savantes, organes de presse spécialisés.
Sous le titre "gouvernance des produits de santé", deux articles concernent l'ANSM, qui se substitue à l'Afssaps, dont l'Igas (inspection générale des affaires sociales) avait pointé le manque de réactivité dans le suivi du Mediator.
Création du nouvelle agence de contrôle
L'ANSM conserve sa mission de pharmacovigilance, avec des prérogatives élargies. Le texte donne ainsi compétence à son directeur général de demander des études supplémentaires au moment de l'octroi de l'Autorisation de mise sur le marché (AMM), telles que des études de sécurité et d'efficacité post-autorisation.
L'AMM peut être suspendue, retirée ou modifiée lorsque son détenteur ne respecte pas les conditions d'octroi ou les obligations concernant notamment les études post-autorisation.
L'ANSM aura par ailleurs le devoir d'informer directement les professionnels de santé, tandis que l'information émanant des laboratoires sera davantage encadrée. Le texte introduit ainsi un contrôle a priori de la publicité pour les médicaments à l'adresse des médecins.
Visites médicales sous surveillance
Les visiteurs médicaux des laboratoires font eux l'objet d'une disposition expérimentale: pendant deux ans, le démarchage pour les médicaments dans les hôpitaux devra se faire devant plusieurs médecins, et non plus individuellement.
Le ministre de la Santé a estimé qu'on devait cette réforme "à l'ensemble des patients pour les rassurer sur les médicaments qu'ils prennent et aussi aux victimes du Mediator".
Xavier Bertrand :"Eviter un nouveau Médiator"
L'objectif de la réforme est "qu'il n'y ait pas demain de nouveau Mediator", avait déclaré le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, le 23 juin.
"Le projet de loi répond globalement aux annonces faites par le ministre ces derniers mois", estime le député socialiste Gérard Bapt, président de la Mission d'information de l'Assemblée nationale sur le Mediator et la pharmacovigilance.
Les industriels dénoncent une menace
Les industriels du secteur de la pharmacie, à travers leur syndicat patronal Leem, ont critiqué lundi le projet de loi sur le médicament présenté par le gouvernement, dénonçant une "réforme détournée de ses objectifs", menaçant l'accès à l'innovation et l'emploi en France.
Le Leem dénonce en particulier "la mise en place de procédures destinées à freiner l'accès des patients aux nouveaux médicaments".
"Derrière une intention vertueuse - faire bénéficier le doute au patient - les pouvoirs publics tentent aujourd'hui d'imposer un plan de maîtrise des dépenses de santé qui ne dit pas son nom", écrit le Leem. Il évoque notamment "les restrictions concernant les autorisations temporaires d'utilisation, (qui) empêcheront de nombreux malades atteints de pathologies lourdes d'accéder à des médicaments en cours de développement".
L'autre point critiqué par les industriels est "l'interdiction de la visite médicale individuelle à l'hôpital". Selon le Leem, cette mesure "menace directement l'emploi de milliers de personnes".
Le métier de visiteur médical fait "une nouvelle fois l'objet de mesures stigmatisantes", alors que "cette profession très encadrée a connu ces cinq dernières années une baisse de 24 % de ses effectifs".
Enfin, les industriels du médicament estiment que ce projet de loi porte "un coup dur à l'attractivité et à la compétitivité françaises", avec de nouvelles mesures de taxation.
En revanche, le Leem affirme "souscri(re) sans réserve aux mesures touchant à la sécurité sanitaire et à la protection des patients ainsi qu'à la transparence des liens d'intérêts".
Autre réaction, celle de la Mutualité Française selon qui "malgré des mesures positives (le projet de loi constitut), une réponse insuffisante". La Mutualité Française "constate aujourd'hui que le projet de loi n'apporte qu'une réponse partielle aux réformes attendues". "Ce texte ne s'attaque pas, en effet, aux causes profondes des dysfonctionnements observés dans l'affaire du Mediator", a-t-elle indiqué.
La Mutualité Française relève "plusieurs points insatisfaisants", estimant notamment que "l'évolution de la pharmacovigilance proposée manque d'ambition et ne reflète pas les conclusions des Assises du médicament, qui préconisaient une refonte globale de son système". Elle regrette également qu'"aucune réforme du système du remboursement et du prix du médicament "ne soit proposée" et qu'"aucune mesure n'évoque le renforcement et le financement de la formation médicale continue des professionnels de santé, alors qu'elle dépend aujourd'hui largement des firmes pharmaceutiques".
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