Le poste de défenseur des enfants menacé
Vague de protestations mercredi face au projet de supprimer le poste de défenseur des enfantsVague de protestations mercredi face au projet de supprimer le poste de défenseur des enfants
Les attributions de ce poste seraient fondues dans celle du futur Défenseur des droits, poste créé par la réforme constitutionnelle de 2008.
Ce projet a suscité un tollé de la part des associations, syndicats et de l'opposition, tous soulignant le travail remarquable de l'actuelle défenseure des Enfants, Dominique Versini, nommée en 2006 pour 6 ans.
Dominique Versini a déclaré mardi soir avoir découvert "avec stupeur" la disparition de l'institution dont elle a la charge en apprenant que deux projets de loi présentés au Conseil des ministres du 9 septembre détaillaient le fonctionnement du futur Défenseur des droits.
Les attributions de cette future autorité fusionneront celles aujourd'hui exercées par le Défenseur des enfants (un poste occupé jusqu'à présent par des femmes, ndlr), par le Médiateur de la République et par la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) chargée depuis 2000 de veiller au respect de la déontologie par les forces de sécurité (policiers, gendarmes, surveillants de prison).
Mme Versini, qui dit n'avoir été "à aucun moment ni consultée ni auditionnée", exprime son "total désaccord" avec ce changement et dénonce "une méthode qui relève de la maltraitance institutionnelle". Elle rappelle qu'ont été traitées depuis la création de sa fonction en 2000 "les réclamations concernant près de 20.000 enfants".
Le rôle du Défenseur des enfants est d'alerter les autorités sur des cas individuels ou collectifs d'atteintes aux droits des enfants, de proposer des modifications législatives et de sensibiliser l'opinion. Instauré par une loi de mars 2000, le Défenseur des enfants a statut d'autorité indépendante du gouvernement et de toute administration. Il est nommé pour une durée de six ans non renouvelable par le président de la République.
L'Unicef "scandalisé"
L'Unicef France s'est dit mercredi "scandalisé par la volonté du gouvernement français de supprimer l'institution indépendante du Défenseur des enfants. Sur le fond, cette décision renforce les inquiétudes déjà exprimées à plusieurs reprises par l'Unicef quant à l'absence d'une politique globale de l'enfance sur notre territoire", écrit le fonds de protection de l'enfance de l'Onu.
La Ligue des Droits de l'Homme a estimé mercredi que cette fusion s'apparentait à "une punition". "Sans doute l'actuelle Défenseure des enfants a-t-elle déplu en prenant au sérieux la défense des enfants et de leurs droits, comme la Commission nationale de déontologie des forces de sécurité avait eu le tort de reconnaître l'existence de violences policières, ce qui lui avait valu naguère une tentative d'étranglement budgétaire", a fait valoir la LDH, dénonçant une "inacceptable régression de l'Etat de droit".
La plupart des critiques ont pointé du doigt ce que Mme Versini et le secrétaire général de la CNDS avaient eux-mêmes regretté : l'absence de concertation avec les autorités amenées à disparaître.
De nombreux syndicats et associations ont souligné le travail accompli par la Défenseure des enfants depuis la création du poste en 2000, sous le gouvernement de Lionel Jospin.
"Elle a été amenée maintes et maintes fois à interpeller les préfets ou les ministres sur des situations individuelles de mineurs isolés, d'enfants internés en zone d'attente, placés en rétention et menacés d'expulsion, ou privés d'un de leurs parents, voire parfois des deux", a rappelé le Réseau éducation sans frontières (RESF).
"Un recul majeur" pour le PS
Fustigeant "un recul majeur", le Parti Socialiste a demandé au gouvernement "de revenir sur cette décision et de maintenir un défenseur des enfants qui puisse se consacrer entièrement à la protection de l'enfance dans une société où la violence faite aux enfants ne cesse de progresser, comme l'a encore montré l'actualité récente".
Le président PS du conseil régional d'Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, a déploré mercredi "la suppression, par le gouvernement, du défenseur des enfants " et "rend hommage au travail exceptionnel de Dominique Versini".
Les députés PCF ont également dénoncé le projet, une mesure "particulièrement dangereuse" et "proprement inacceptable", selon le parti. "Sous couvert de mettre en place un Défenseur des droits, les enfants vont se voir privés d'un interlocuteur particulier et de l'appui spécifique dont ils disposaient" depuis 2000, a déclaré le porte-parole des élus communistes, Roland Muzeau.
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