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Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire sur le médicament Médiator a indiqué samedi une source judiciaire

Le Mediator, destiné au diabétiques mais largement détourné en coupe-faim et interdit en 2009, est accusé d'avoir entraîné de graves problèmes cardiaques et de 500 à 2.000 morts.L'enquête, confiée aux gendarmes de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp), aurait été ouverte en décembre.
Article rédigé par France2.fr avec AFP
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Le Mediator, médicament pour les diabétiques, aurait fait de 500 à 2000 morts. (F2)

Le Mediator, destiné au diabétiques mais largement détourné en coupe-faim et interdit en 2009, est accusé d'avoir entraîné de graves problèmes cardiaques et de 500 à 2.000 morts.

L'enquête, confiée aux gendarmes de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp), aurait été ouverte en décembre.

Fin novembre, le parquet de Paris avait demandé à l'Oclaesp un premier rapport sur le médicament. Par ailleurs, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas, dépendant du ministère de la Santé) doit également rendre un rapport à la mi-janvier.

Des informations ont également été demandées à l'Afssaps sur le nombre et la nature des plaintes qui se sont multipliées à Paris, où une association bordelaise de victimes présumées du Mediator doit déposer mardi 110 plaintes pour blessures et homicides involontaires. 500 nouvelles plaintes, de plaignants répartis "dans toute la France", seront déposées "avant la fin du mois" de janvier, selon l'association.

Théoriquement, c'était le tribunal de Nanterre qui devait être saisi, le siège des laboratoires Servier étant dans les Hauts-de-Seine. Mais le procureur de la République de Nanterre Philippe Courroye a choisi de se dessaisir au profit du parquet de Paris, "les procédures étant potentiellement nombreuses" suite à la reconnaissance officielle de la nocivité de ce médicament.

Le laboratoire Servier "collaborera pleinement" à l'enquête préliminaire du parquet de Paris, a indiqué samedi à l'AFP une porte-parole, estimant que son ouverture permettra "d'établir la vérité" sur l'affaire.

Un coût astronomique pour la Sécu

Le Mediator aurait coûté 423 millions d'euros à la Sécurité sociale et aux complémentaires, rapportait Aujourd'hui en France à la fin décembre 2010. Le quotidien, qui s'était procuré un rapport interne de 'Unocam (fédérations d'assurances et mutuelles complémentaires), soulignait qu'à "l'impact humain" s'ajoute "l'impact financier". Selon le document, "l'assurance maladie a dépensé 324,89 millions d'euros au titre du remboursement du médicament; les mutuelles et assurances, 98,71 millions d'euros.

Si l'Unocam s'est intéressé à cette question, explique son président Fabrice Henry, c'est que "plusieurs choses paraissaient incohérentes" rapporte le journal. Notamment l'octroi par les autorités d'un taux de remboursement de 65% en totale inadéquation avec le niveau de service médical rendu qualifié d'"insuffisant" par l'autorité de santé écrit encore le quotidien.

Xavier Bertrand promet une prise en charge totale
Le ministre de la Santé Xavier Bertrand a annoncé sur RTL que toutes les victimes du Mediator bénéficieraient d'une "prise en charge intégrale par l'assurance maladie", invitant les personnes concernées à "consulter".

De multiples signaux d'alerte... restés sans suite

Commercialisé en France par les laboratoires Servier depuis 1976, le Mediator n'a été retiré de la vente qu'en novembre 2009 alors que sa dangerosité était dénoncée depuis de nombreuses années.

En 1998, trois professeurs de médecine de la Sécurité sociale avaient ainsi alerté l'Agence du médicament sur les risques de l'utilisation non autorisée du Mediator comme coupe-faim.

Un rapport d'experts italiens, réalisé à la demande de l'Agence européenne du médicament, montrait sans ambiguïté, dès 1999, la similitude de toxicité entre l'Isoméride, un coupe-faim interdit en 1997, et le Mediator, a rapporté le Figaro.

Les risques liés au Mediator

Utilisé par 5 millions de personnes, dont 2,9 millions pendant plus de 3 mois, le Mediator peut provoquer des atteintes des poumons (hypertensions artérielles pulmonaires) et multiplie par trois le risque d'atteintes des valves cardiaques (valvulopathies).

En 1997, l'Isoméride, produit également par Servier, avait été retiré du marché mondial après la découverte d'hypertensions artérielles pulmonaires attribuées à la norfenfluramine. Or, selon les experts italiens, il y a largement autant de cette substance nocive dans le Mediator que dans l'Isoméride.

De 500 à 2.000 victimes

Selon l'épidémiologiste Catherine Hill, au moins 500 personnes sont mortes pour avoir pris du Mediator. Deux autres chercheurs ont avancé une fourchette de 1.000 à 2.000 morts en envisageant la mortalité à long terme. "On ne saura jamais le nombre de morts", selon la pneumologue Irène Frachon.

A l'origine de la révélation du scandale sanitaire, ce médecin a enquêté plusieurs années et a publié l'été dernier le livre Mediator 150 mg. Combien de morts ?

Les pouvoirs publics ont mis en place un numéro gratuit (Numéro vert: 0 800 880 700) pour les personnes souhaitant s'informer sur le Mediator et ses risques.

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