Le maire de Sevran, Stéphane Gatignon, plaide pour la dépénalisation afin de lutter contre les trafics
Avec son livre "Pour en finir avec les dealers", co-écrit avec le policier Serge Supersac et publié mardi, Stéphane Gatignon veut "ouvrir le débat bloqué".
"Sortir de la société de prohibition, c'est (...) libérer des territoires entiers de l'emprise des trafics et de la violence", écrit cet élu dont la ville est gangrénée par ce double fléau.
L'élu (EELV) débite des chiffres impressionnants: pour toute la France, il y a quatre millions de consommateurs réguliers de cannabis, 12 millions d'occasionnels, plus de 100.000 personnes impliquées dans le trafic.
Et à Sevran, devenue "un supermarché de la drogue": 25.000 euros le "pas de porte" et une dizaine de personnes décédées depuis juin 2009, dans des affaires liées de près ou de loin au trafic.
Avec, comme terreau, la pauvreté et 40% de jeunes de la ville au chômage. "C'est le manque de perspectives qui pousse vers le trafic de shit", affirme le maire.
"Un vrai risque mafieux"
Dans le "Parisien" de lundi, qui titre "Faut-il légaliser le cannabis ?", Stéphane Gatignon estime que le risque est réel de voir tomber Sevran (Seine-Saint-Denis), l'une des villes les plus pauvres de France, sous la coupe du crime organisé.
"On n'est plus dans l'image du petit dealer de quartier", explique-t-il. "Avec la crise, tout ce qui est argent facile triomphe. Les réseaux se structurent, avec des comptables, des avocats, des businessmen, en sorte qu'ils investissent tous les pans de la société...".
"Il y a aujourd'hui du trafic de drogue et d'armes", selon lui et "On va vers le contrôle par les dealers de pans économiques". Il entrevoit également "des liens avec le monde politique". "Dans les dix ans, si on ne fait rien, ce sont eux qui décideront qui sera maire", prévient-il.
Face à cela, "la police fait son travail mais elle vide la mer avec une petite cuillère", regrette M.Gatignon.
Légaliser et créer un nouveau secteur économique
Que propose-t-il ? La légalisation du cannabis et la mise en place d'une structure économique pour la vente. La commercialisation des drogues douces pourrait devenir "un nouveau secteur économique, évidemment très encadré, créateur d'emplois tant pour l'agriculture que pour la distribution", estiment l'élu et le policier.
En cas de dépénalisation, il faudra aussi "une politique de santé publique", comme celle qui existe pour l'alcool. Il faudra aussi créer 100.000 emplois pour "les petits dealers". "La plupart sont précaires, gagnent quelques centaines d'euros et auraient tout intérêt à avoir un vrai boulot", dit Stéphane Gatignon.
"Pour en finir avec les dealers" de Stéphane Gatignon et Serge Supersac (Grasset, 16 euros).
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