La première journée de l'appel du dossier Clearstream a été marquée par la défense d'Imad Lahoud
Le mathématicien Imad Lahoud a passé lundi la journée à charger ses co-prévenus, Dominique de Villepin et Jean-Louis Gergorin.
"Aujourd'hui, Jean-Louis Gergorin diminue son rôle" mais "c'était mon patron, c'était le numéro deux d'EADS!" s'est défendu Imad Lahoud, qui est poursuivi aux côtés de Dominique de Villepin et Jean-Louis Gergorin.
L'audience s'est ouverte à 09H15. Jusqu'au 26 mai, Dominique de Villepin sera rejugé pour "complicité de dénonciation calomnieuse" aux côtés de l'ancien responsable d' EADS Jean-Louis Gergorin et du mathématicien Imad Lahoud, condamnés respectivement à quinze et dix-huit mois de prison ferme, ainsi qu'à 40.000 euros d'amende.
Jugeant sa peine "démesurée", Imad Lahoud a demandé à la cour de "rétablir la vérité", tout en reconnaissant qu'il avait une part de responsabilité dans cette affaire. Jean-Louis Gergorin de son côté a répété qu'il avait avait "agi en totale bonne foi", sans savoir que les listings étaient falsifiés.
Villepin assis seul devant ses trois conseils
Vêtu d'un costume bleu nuit, Dominique de Villepin était assis seul, devant ses trois conseils, tandis que Jean-Louis Gergorin occupait une chaise aux côtés d'Imad Lahoud. Après avoir décliné leur identité et le montant de leurs revenus mensuels, de respectivement 20.000, 11.000 et 2.000 euros, les trois prévenus se sont rassis, pour écouter le rapport de la présidente, Christiane Beauquis.
Dans ce dossier, on reproche aux trois prévenus d'avoir falsifié des listings bancaires émanant de la chambre de compensation luxembourgeoise Clearstream, afin de faire croire que plusieurs personnalités, dont Nicolas Sarkozy, détenaient des comptes occultes à l'étranger.
L'affaire avait éclaté au grand jour à l'été 2004, mais ce n'est qu'en janvier 2006, alors que l'instruction piétinait, que Nicolas Sarkozy s'était constitué partie civile, promettant de pendre les coupables à "un croc de boucher".
Convaincus que Dominique de Villepin était l'instigateur du complot, les juges Henri Pons et Jean-Marie d'Huy l'avaient renvoyé en correctionnelle fin 2008.
A l'issue d'un mois de procès, où le parquet avait requis 18 mois de prison avec sursis et 45.000 euros d'amende, le tribunal correctionnel de Paris avait relaxé le 28 janvier 2010 l'ancien allié de Jacques Chirac. Le parquet avait alors fait appel.
Une quinzaine de parties civiles ont également contesté la décision de première instance. Le plus grand absent lundi était le président de la République qui a renoncé à poursuivre son rival en appel.
L'audience de lundi
"Je sortais de détention provisoire, il m'a tendu la main. (...) J'étais son obligé d'une certaine manière", a affirmé Lahoud, assurant avoir menti durant toute l'instruction à la demande de celui qui l'a fait embaucher en 2003 chez EADS. Il assure avoir été sous l'emprise de Jean-Louis Gergorin et avoir falsifié les listings à sa demande.
"Il fallait tout nier pour couvrir Jean-Louis Gergorin et couvrir Dominique de Villepin", a-t-il répété. "Jean-Louis Gergorin me demande de le couvrir, de toujours nier, durant toute l'instruction, et c'est ce que j'ai fait. J'ai nié l'évidence tant en garde à vue qu'à l'instruction. C'était un choix. Mais on était complètement pris en main avant et pendant l'instruction par Dominique de Villepin et il était extrêmement difficile de changer de version", a réaffirmé Imad Lahoud.
Hors prétoire, Lahoud charge encore plus Villepin
Avant même l'ouverture du procès,Imad Lahoud a annoncé dans la matinée sur Europe 1 que sa femme avait envoyé une lettre à la cour d'appel contredisant Dominique de Villepin. Un courrier que la présidente, Christiane Beauquis, a indiqué ne pas avoir reçu.
Plus tard, à sa sortie de la cour d'appel de Paris, il a accusé son coprévenu Dominique de Villepin d'avoir "voulu éliminer Nicolas Sarkozy" et de mentir. Il a aussi répété qu'il ne voulait pas être le seul à trinquer dans cette affaire.
"Dominique de Villepin a voulu éliminer Nicolas Sarkozy. Il a peur. Il ment. Que va-t-il devenir s'il est condamné?", a déclaré l'agrégé de mathématiques face aux caméras.
"Dominique de Villepin a une communauté d'intérêts avec Jean-Louis Gergorin pour faire de moi un bouc-émissaire", a-t-il ajouté.
Imad Lahoud, qui fut le plus lourdement sanctionné en première instance, avec une peine de 18 mois de prison ferme et 40.000 euros d'amende, a multiplié les versions depuis sa mise en cause dans l'affaire.
Considéré par le tribunal comme le "cerveau" de la machination, Jean-Louis Gergorin a écopé pour sa part de 15 mois de prison ferme et 40.000 euros d'amende, tandis que Dominique de Villepin a été relaxé. Interrogé par la cour, l'ancien haut responsable d'EADS a redit s'être laissé mené en bateau par son protégé. "J'ai été conquis par son intelligence, par son côté sympathique. J'ai eu le sentiment que c'était quelqu'un d'honnête."
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