La durée de cotisation va être allongée à 41,5 ans pour la génération née en 1955
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a annoncé qu'il "publierait" un décret en ce sens "parce que c'est logique" et "nécessaire pour préserver l'équilibre de notre
système de retraite".
Les syndicats parlent d'une "double peine". "On ajoute la réforme de 2003 à celle de 2010", selon FO.
Cette décision intervient quelques jours après l'entrée en vigueur de la loi repoussant l'âge légal de départ à la retraite. La mesure phare de la réforme Woerth de 2010 a été le recul progressif de l'âge légal de départ de 60 à 62 ans. Cette "borne" détermine l'âge à partir duquel un assuré a le droit de liquider sa pension, tandis que la durée de cotisation détermine la condition nécessaire pour qu'elle soit liquidée au taux plein.
"Avis technique"
Dans un "avis technique" qu'il doit rendre mercredi, le Conseil d'orientation des retraites (COR), instance indépendante composée de représentants des partenaires sociaux, des parlementaires et de l'Etat, réclame 41,5 années de cotisation pour les générations nées à partir de 1955.
Pour une retraite à taux plein, la durée de cotisation est actuellement de 40 ans et trois trimestres (pour la génération 1951) et doit passer en 2012 à 41 ans (pour la génération 1952). La réforme des retraites de 2010 a prévu qu'elle passerait ensuite à 41 ans et un trimestre en 2013 (pour les générations 1953 et suivantes). Mais rien n'était encore décidé pour après, notamment pour la génération 1955, dont le nouvel âge de la retraite est désormais de 61 ans et huit mois...
Le COR a donc été chargé de se prononcer sur ce point. Mais son avis ne sera "en aucune manière une préconisation", seulement la conséquence d'une "application de la règle fixée par la loi du 21 août 2003", a tenu lundi à rappeler son président, Raphaël Hadas-Lebel. Cette loi stipule que les gains d'espérance de vie à 60 ans doivent se répartir entre un allongement de la vie professionnelle (pour les deux tiers) et de la retraite (pour un tiers) (voir à ce sujet Le Figaro.fr).
L'allongement résultera ainsi d'une "application mathématique" de la réforme Fillon de 2003, qui prévoit que la durée de cotisation doit être relevée quand l'espérance de vie à 60 ans augmente. "Ce principe nous amène à passer aujourd'hui de 41 ans à 41,5 ans", a expliqué le ministre des Affaires sociales. "A terme, il y aura 62 ans (pour l'âge légal de départ, NDLR) et 41,5 ans de cotisation, les deux en même temps, au moment où en Allemagne, c'est 67 ans et 45 ans, en Espagne, c'est 65 ans", a-t-il fait valoir. Dans ces deux pays, la durée de cotisation est de 35 années pour une pension à taux plein.
En juin 2010, lors de la présentation de sa réforme des retraites, le gouvernement avait déjà évoqué le passage à 41,5 ans de la durée de cotisation... mais seulement à l'horizon 2020. Dans l'intervalle, l'INSEE a produit de nouvelles projections sur l'espérance de vie, qui expliquent le nouveau calcul du COR.
La mesure prise résulte "tout simplement l'application de la loi de 2003", selon Xavier Bertrand. "Nous ne faisons qu'appliquer les textes", a-t-il dit. Il dit "préférer tout simplement être en France et conduire les réformes nous-mêmes plutôt qu'un jour être comme la Grèce et se faire imposer les réformes par l'extérieur".
Réactions
"Les salariés vont devoir travailler plus longtemps alors qu'on a une situation de l'emploi qui est catastrophique, un chômage des seniors qui augmente de près de 15 % en une année", a estimé le responsable du secteur retraite à la CGT, Eric Aubin. "Les salariés ne seront pas au travail à l'âge de la retraite donc ils auront une baisse du niveau de leurs pensions considérable". Il demande par ailleurs "un dispositif reconnaissant la pénibilité.
La CFDT, qui avait pourtant soutenu le mécanisme introduit en 2003, s'insurge contre la mesure du gouvernement. Selon Jean-Louis Malys (CFDT), la combinaison du relèvement de l'âge légal et de l'allongement de la durée de cotisation pour une retraite à taux plein se traduira effectivement par une baisse des pensions de nombreux salariés.
"C'est clairement une double peine. On ajoute la réforme de 2003 à celle de 2010", estime Philippe Pihet (FO). Il a rappelé que l'âge minimal de la retraite devait déjà progressivement passer de 60 à 62 ans d'ici 2018, du fait de la réforme de novembre dernier.
Le PS y voit la preuve que a réforme des retraites menée l'an dernier n'a rien réglé. "C'est un sacrifice supplémentaire demandé aux Français, quand les revenus du capital sont, eux, exemptés de toute forme de contribution", a dit son porte-parole Benoît Hamon. Pour lui, la mesure annoncée "prouve que la réforme des retraites n'assure absolument pas la pérennité du système par répartition".
Comme la CFDT, le Parti socialiste est favorable au mécanisme introduit par la loi de 2003, prévoyant l'allongement de la durée de cotisation quand l'espérance de vie progresse.
Sans se prononcer sur la nouvelle durée de cotisation évoquée, l'UMP a souligné que "le rôle des responsables publics, c'est d'adapter le modèle social" aux évolutions démographiques.
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