Comment Sarkozy a renoué avec l'électorat FN
En droitisant son début de campagne, le président candidat a réussi un premier pari : séduire des électeurs tentés de voter pour Marine Le Pen, et ainsi combler son retard sur François Hollande dans les sondages.
Nicolas Sarkozy qui "droitise" son discours pour reconquérir les électeurs tentés de voter pour Marine Le Pen ? A chaque meeting qu'il tient depuis son entrée en campagne, le président candidat s'en défend. "On va me dire que je chasse sur les terres de l'extrême droite. Comme si l'extrême droite avait des terres, comme si la France était partagée en autant de parts d'un gâteau que les uns et les autres pouvaient s'attribuer", balaye-t-il par exemple dans son discours de Nantes le 27 mars.
Pourtant, l'accroissement de la lutte contre l'insécurité, le renforcement du dispositif contre la délinquance des mineurs, l'intensification de la lutte contre l'islamisme, la question de l'application des peines de prison, l'intégration des étrangers, la réduction de l'immigration légale ou encore la question de l'identité nationale tiennent une place majeure à chaque meeting de campagne.
"Oui, il a droitisé son discours par certains aspects. Il fait avec le Front national ce que François Mitterrand faisait avec le Parti communiste", concède le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, dans les colonnes du Parisien. Avant d'adresser au président candidat cette mise en garde cinglante : "Il y a toujours dans ce baiser de la mort le risque que le cadavre vous refile une mauvaise maladie."
Oui mais voilà, dans les enquêtes d'opinion, la stratégie se révèle payante. En mars, Nicolas Sarkozy a gagné quatre points au premier tour quand Marine Le Pen en a perdu trois et demi. Et pour le second tour, la candidate frontiste doit constater que ses électeurs comptent nettement plus se reporter sur Nicolas Sarkozy aujourd'hui qu'il y a un mois. Un électorat populaire qui avait largement concouru à sa victoire en 2007, et qui semblait avoir pris ses distances ces derniers mois.
La stratégie donne en tout cas le sourire à "l'aile droite" de l'UMP. Le député girondin Jean-Paul Garraud se félicite par exemple que Nicolas Sarkozy soit "totalement dans la ligne de la Droite populaire", ce collectif de parlementaires les plus à droite du parti présidentiel. "On a toujours dit que l'élection se gagnerait à droite. Tout le monde n'était pas d'accord, mais le président nous a écoutés, et on voit que les sondages nous donnent raison", se réjouit-il.
Un autre député membre de la Droite populaire y voit aussi "l'influence positive de Patrick Buisson au côté du président". "Conseiller de l'ombre en 2007", comme le rappelait ce week-end Le Figaro Magazine, l'ancien patron de l'hebdomadaire d'extrême droite Minute demeure une pièce éminente de la machine sarkozyste. "Heureusement qu'il est là, et que Sarkozy l'écoute plus que certains autres de ses conseillers", se réjouit ce même député.
L'aile humaniste du parti appelle à "recentrer le curseur"
Cette orientation ne plaît cependant pas à tout le monde au sein de l'UMP. Figure de l'aile centriste du parti présidentiel, le député et ancien ministre Pierre Méhaignerie se montre par exemple moins enthousiaste que ses collègues de la Droite populaire. "Nous devons être beaucoup plus sur l'emploi, le pouvoir d'achat ou la croissance. Ces thèmes-là sont plus proches de nos préoccupations", résume-t-il. "Il faut recentrer le curseur sur d'autres priorités que l'immigration : en particulier l'emploi et le logement", abonde le député Michel Piron.
Avec moins de pincettes, un autre député de l'aile humaniste de l'UMP prévient, cinglant : "Ne soyons pas de vulgaires imitateurs de Marine Le Pen ! Et ne nous fions pas aux sondages : les électeurs préféreront toujours l'original à la copie."
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