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"Il y a une méthode pour terroriser": le rédacteur en chef du "Poher" dénonce les tentatives d'intimidation après l'alerte à la bombe visant l'hebdomadaire

Une alerte à la bombe a visé, lundi, "Le Poher", un journal hebdomadaire breton. Aucun explosif n'a été détecté. Sur franceinfo, Erwan Chartier-Le Floch, le rédacteur en chef, victime de plusieurs menaces de mort, souligne que cet événement intervient après une procédure judiciaire menée contre un site d'ultradroite.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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La gendarmerie de Carhaix a fait intervenir un maîttre-chien dans les locaux de l'hebdomadaire Le Poher, visé par une alerte à la bombe. (LE T?L?GRAMME / MAXPPP)

Pour le rédacteur en chef de l'hebdomadaire régional "Le Poher", aucun doute, les menaces de mort reçues et l'alerte à la bombe de lundi 20 février dans les locaux du journal à Carhaix, sont une prolongation de l'affaire Callac. Le maire de cette commune bretonne souhaitait dynamiser son village, mais face à la pression d'habitants et à une campagne hostile menée par l'extrême-droite, l'édile est revenu sur son choix et a renoncé à accueillir un centre pour réfugiés.

Depuis, de nombreux journalistes ont été pris pour cible. "On a reçu un appel téléphonique nous indiquant qu'il y avait une bombe à la rédaction, explique Erwan Chartier-Le Floch, le rédacteur en chef de l'hebdomadaire local. On a été forcés d'évacuer toute la matinée la rédaction." Sur franceinfo, le rédacteur en chef rappelle que ces actes d'intimidation sont intervenus après deux plaintes déposées par le journal contre un site d'ultradroite. 

franceinfo : Vous avez l'assurance, la certitude et la conviction que ce sont des activistes d'extrême droite qui sont à l'origine de ces menaces ?

Erwan Chartier-Le Floch : Alors évidemment, je laisse la police, la gendarmerie faire son enquête et on ne peut pas déterminer précisément qui fait ça en ce moment. Mais je constate, quand même, que ça intervient après qu'on ait engagé une procédure, une assignation judiciaire contre un site d'ultradroite pour injure publique et diffamation. Les menaces sont arrivées tout de suite après. Ce n'est peut-être qu'un hasard...

Sur ce site vous êtiez personnellement visé ?

Depuis, on a eu le droit à une prose un peu délirante ou psychédélique et surtout, on met ma photo et celle d'une journaliste en évidence. On a un peu l'impression d'être des cibles.

Pour quelles raisons ? Est-ce que vous vous demandez comment ça peut aller aussi loin ?

Je pense qu'il y a une méthode, une méthode pour intimider, pour terroriser. Ça a déjà été fait contre les élus à Callac, justement pour ces réfugiés, qui n'étaient pas des migrants, qui étaient des réfugiés avec des papiers. Ils ont exagéré le nombre de familles qui devaient arriver. 

"Ils ont lancé toute une campagne de désinformation et surtout une campagne de pression sur les élus. Avec là aussi, une douzaine de plaintes pour menaces de mort sur des élus après des messages d'injures ou de menaces.

Erwan Chartier-Le Floch, rédacteur en chef de l'hebdomadaire "Le Poher"

à franceinfo

Il y a eu de la désinformation. Vous pensez, qu'aujourd'hui, on veut vous empêcher de faire de l'information avec votre journal "le Poher" ?

Nous, on a été très attaqués par ce site. Il y a eu un article qu'on a trouvé injurieux, dont on s'est défendu, on a fait une assignation judiciaire, c'est tout. Après nous, on est un journal local, on a rendu compte des différentes manifestations du projet. On a évidemment interviewé les élus, mais aussi des opposants. On n'a jamais dit que c'était illégitime de contester ce projet. Mais visiblement, pour eux, on n'est pas dans leur idéologie donc ça ne passe pas. 

Comment la population de votre territoire vit ces événements ?

La population vit cela assez mal, c'est difficile. Des gens ne veulent plus parler, ça crée des tensions sur le territoire. Alors que l'accueil de réfugiés en général se passe très bien ici, il n'y a pas de souci dans les petites communes. Cela a amené une médiatisation un peu dérangeante pour les gens. Elle le vit donc plutôt mal. Les élus locaux ont été élus par la population, donc ces gens représentatifs et les voir menacés, ce n'est jamais très bon signe.

Cela veut dire qu'une partie des objectifs de ceux qui vous menacent sont atteints, car ça rend votre travail avec la population plus difficile ?

Non pas forcément, on est insérés, on vit ici, on travaille ici, on connaît les gens. On connaît très bien le territoire. Du côté des opposants à ce projet, il y avait des gens locaux, qui se sont vite détachés de l'ultradroite, qui sont, eux, des gens qui habitent ailleurs et qui ont saisi cette opportunité pour faire un coup politique.

Votre souhait aujourd'hui, c'est de continuer à faire votre travail ?

Oui, c'est vraiment ça. Nous, on est des journalistes bretons, on aime bien notre travail. On veut continuer à faire de l'information générale sur ce territoire avec une actualité qui est souvent riche mais bon là, elle est un peu dramatique.

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