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Air France, Safran : l'Etat tente de brider les rémunérations des grands patrons

L'Etat a obtenu le rejet du parachute doré du dirigeant de Safran. Il a aussi voté contre la prime de 400 000 euros à l'ex-PDG d'Air France, même si cette somme a déjà été versée il y a plusieurs mois.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'assemblée générale d'Air France-KLM se tient à Paris, le 31 mai 2012.  (ERIC PIERMONT / AFP)

Parachutes dorés, retraites chapeaux, rémunérations jugées extravagantes, etc. Des pratiques du passé ? Conformément aux engagements de campagne de François Hollande, le gouvernement Ayrault s'attaque à la régulation des salaires et avantages des grands patrons d'entreprises dont l'Etat est actionnaire. Mais le gouvernement n'a pas attendu la loi pour intervenir. Il a annoncé jeudi 31 mai la mise en place de mesures conservatoires.

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Une loi contre les "excès de rémunération" dans le public

Limiter les écarts entre les salaires faisait partie des 60 engagements de François Hollande. Dans les entreprises dont l'Etat est actionnaire, le patron ne pourrait pas gagner plus de 20 fois le salaire minimum accordé par l'entreprise. Soit 335 600 euros annuels si les employés les moins payés touchent le smic. Sont concernées, entre autres, EDF, Areva, Aéroports de Paris, mais aussi la Poste ou Renault.

Cette mesure s'appliquera "y compris aux contrats en cours". En revanche, les modalités d'application et le champ des rémunérations concernées par le calcul doivent encore faire l'objet d'arbitrages, a confié mercredi Pierre Moscovici à des journalistes. Ce dernier "présentera ses propositions d'ici quinze jours, a confirmé jeudi le ministère de l'Economie. Dans cette attente, le gouvernement prendra toutes les mesures conservatoires nécessaires." Mais ce dernier n'a pas attendu pour agir. 

• Le cas Air France : l'ancien patron sous pression, mais sans obligation

La prime de l'ancien patron Pierre-Henri Gourgeon a été rejeté jeudi à l'occasion de l'assemblée générale des actionnaires du groupe. Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, avait donné la consigne  au représentant de l'Etat, qui détient 15,8% d'Air France-KLM : voter "contre" la prime de 400 000 euros, accordée en octobre 2011 à l'ancien patron, déjà versé au titre d'une prime de non-concurrence pour une durée de trois ans.

Problème : la somme a déjà été versée sur le compte de l'intéressé et résulte d'un accord parfaitement légal entre l'ex-patron et le groupe, souligne des juristes. Cette somme fait partie d'une rémunération exceptionnelle d'un montant de 1,4 million d'euros, décidée par le conseil d'administration à la suite de son éviction. 

 "Le Code du commerce est d'une très grande clarté (...), a indiqué le président du groupe. Le rejet (...) n'aura pas de conséquence directe sur cette indemnité dont il a été bénéficiaire", a-t-il ajouté.  Le gouvernement, relativement impuissant, a donc fait appel à "la morale", laquelle "voudrait que, de lui-même, Pierre-Henri Gourgeon rembourse cela", a expliqué Pierre Moscovici sur France Inter. 

• Le cas Safran : l'Etat, bien que minoritaire, s'impose 

L'assemblée générale de Safran a refusé, jeudi, d'accorder un parachute doré et une retraite chapeau au PDG de l'équipementier aéronautique et de défense, Jean-Paul Herteman. Bercy a confirmé que Pierre Moscovici avait donné "instruction" de voter contre ces résolutions aux représentants de l'Etat, qui détient environ 30% des droits de vote.

La première mesure, rejetée à 55,25%, prévoyait le versement d'une "indemnité d'un montant équivalent à deux années de rémunération fixe et variable" en cas de "cessation anticipée" du mandat du PDG, "pour quelque cause que ce soit, sauf faute grave ou lourde". Cette disposition avait pourtant été adoptée "à l'unanimité" par les 15 membres du conseil d'administration, qui compte quatre représentants de l'Etat, le 21 avril 2011. L'assemblée générale de Safran a également voté à 56,44% contre une disposition prévoyant plusieurs "engagements réglementés" en matière de "retraite et de prévoyance", au bénéfice du PDG et de ses trois directeurs généraux délégués.

"Après Air France, le gouvernement donne un autre signal fort sur la politique de rémunération", a souligné le ministère de l'Economie. Le cas Safran a notamment montré que, même minoritaire, l'Etat peut impulser ce type de politique. Une initiative cependant impossible dans le secteur privé. Là où les salaires de grands patrons sont les plus importants. 

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