Cet article date de plus de douze ans.

80 députés UMP ont demandé à Luc Chatel le retrait de manuels scolaires expliquant l'"l'identité sexuelle"

Dans une lettre au ministre de l'Education nationale, ils estiment que ces manuels de SVT (Sciences et vie de la terre) de classe de première font référence à "la théorie du genre sexuel".Ces parlementaires font écho aux critiques exprimées au printemps sur le même sujet par la direction de l'enseignement catholique.
Article rédigé par France2.fr avec agences
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
La lettre est notamment signée par Christian Vanneste et Lionnel Luca, fondateurs du collectif de la Droite populaire. (MARTIN BUREAU / AFP)

Dans une lettre au ministre de l'Education nationale, ils estiment que ces manuels de SVT (Sciences et vie de la terre) de classe de première font référence à "la théorie du genre sexuel".

Ces parlementaires font écho aux critiques exprimées au printemps sur le même sujet par la direction de l'enseignement catholique.

Selon la théorie du genre, "les personnes ne sont plus définies comme hommes et femmes mais comme pratiquants de certaines formes de sexualités: homosexuels, hétérosexuels, bisexuels, transsexuels", écrivent les députés conduits par Richard Maillé, député des Bouches-du-Rhône. Il s'agit selon eux d'une "théorie philosophique et sociologique qui n'est pas scientifique, qui affirme que l'identité sexuelle est une construction culturelle".

Les signataires citent un passage d'un manuel publié par Hachette: "Le sexe biologique nous identifie mâle ou femelle mais ce n'est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou de féminin. Cette identité sexuelle, construite tout au long de notre vie, dans une interaction constante entre le biologique et contexte socio-culturel, est pourtant décisive dans notre positionnement par rapport à l'autre".

Les députés concluent à l'adresse de Luc Chatel: "Nous comptons sur votre action afin de retirer des lycées les manuels qui présentent cette théorie".

Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, a soutenu mercredi sans réserve les 80 députés, en estimant qu'ils "posent une vraie question".

Dans une circulaire du 30 septembre 2010, le ministère indiquait que les programmes de SVT de première devaient comporter un chapitre intitulé "devenir homme ou femme". "Si l'identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l'orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée", précisait la circulaire.

La lettre est notamment signée par Christian Vanneste, Lionnel Luca et Jacques Myard, fondateurs du collectif de la , Bernard Debré, Eric Raoult et Hervé Mariton.

L'Unsa Education dénonce la "démarche dogmatique" des députés signataires
L'Unsa-Education, deuxième fédération syndicale du monde éducatif, a demandé mercredi dans un communiqué à ce que le ministre Luc Chatel intervienne dans la polémique notamment pour faire respecter les libertés "éditoriale et pédagogique".

Elle "s'indigne de (la) démarche dogmatique" de "80 parlementaires UMP" qui "viennent de demander la censure d'un manuel de sciences de première en reprenant la pseudo argumentation sur la théorie du genre".

L'Unsa-Education conclut son communiqué en estimant que les 80 députés UMP n'ont "manifestement pas lu" le manuel de l'éditeur Hachette qu'ils critiquent le plus, et appelle à le consulter, via un spécimen accessible en ligne ici.

"Résistance particulière" aux études de genre en France
Contacté par France Télévisions, Michel Bozon, sociologue de la sexualité, nous a renvoyés vers la tribune qu'il a cosigné dans Le Monde du 18 juin, un texte intitulé "Enseigner le genre : contre une censure archaïque". Dans cette tribune, les auteurs revenaient déjà sur les craintes exprimées par Christine Boutin, candidate à la présidentielle. Craintes reprises en grande partie par les 80 députés UMP signataires.

"Il n"appartient nullement aux politiques de juger de la scientificité des objets, des méthodes ou des théories", écrivaient les chercheurs. "Nous nous élevons avec force contre des conceptions anti-scientifiques qui s"autorisent du "bon sens" pour imposer leur ordre rétrograde, poursuivent-ils. "Un bon sens", souvent brandi par la Droite populaire.

"Interroger les "préjugés" et les "stéréotypes" pour les remettre en cause, c"est précisément le point de départ de la démarche scientifique. C"est encore plus nécessaire lorsqu"il s"agit des différences entre les sexes, qui sont toujours présentées comme naturelles pour justifier les inégalités", remarquaient les scientifiques dans leur lettre ouverte.

Interrogé sur la minimisation par les députés UMP du poids des études de genre dans le monde scientifique et dans la vie intellectuelle depuis la moitié du XXe siècle, Michel Bozon répond qu'il y a en France une "résistance particulière" à ces études.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.