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Dans "Happy End" Michael Haneke "nous montre une forme de surdité, de cécité face à laquelle on est dans certaines sociétés"

Au programme de ce lundi à Cannes : deux drames bourgeois, signés Michael Haneke et Yorgos Lanthimos, qui dépeignent des familles au bord de l'abîme.

Article rédigé par Thierry Fiorile - Edité par Alexandra du Boucheron
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Michael Haneke lors de la conférence de presse pour son film "Happy End", présenté à Cannes en mai 2017. (ANTONY JONES / POOL / GETTY IMAGES)

Happy End, cynique comédie

"Il rit très souvent, Michael Haneke. Il rit plus souvent, beaucoup plus souvent qu'on ne le croit. Il rit beaucoup." Merci Isabelle Huppert de nous donner la clef de Happy End de Michael Haneke ! Le film a laissé bon nombre de festivaliers perplexes, lundi 22 mai. Happy End serait donc aussi une comédie et pas seulement le portrait cynique d’une famille bourgeoise de Calais enfermée dans ses certitudes et sa grande maison où se côtoient trois générations. Il y a le patriarche épuisé de vivre (magnifique Jean-Louis Trintignant), sa fille qui a repris l’affaire familiale (Isabelle Huppert) et le fils (Mathieu Kassovitz) dont la fille de 12 ans vient s’installer dans le clan après la mort de sa mère.

Michael Haneke décrit un monde de duplicité, de mensonges et de mépris de classe. La mort rôde chez ces gens-là. Ce n’est pas son meilleur film. Il a déçu ses fans qui, contrairement à Mathieu Kassovitz et Isabelle Huppert, ne pensent pas qu’il y a de la farce dans ce Happy End. "Il y a des situations, tu ne peux qu'en rire, assure Mathieu Kassovitz à franceinfo. Ces films sont cyniques mais ce n'est pas quelque chose de négatif d'être cynique. Sur le tournage, je le voyais derrière l'écran, il rigolait. Je lui disais : 'Pourquoi tu rigoles ?'. Il me disait : 'Parce que c'est drôle'".

Pour isabelle Hupert, le réalisateur autrichien "nous montre une forme de surdité aussi, de cécité face à laquelle on est dans certaines sociétés, dans laquelle il est lui-même. Il fait son autocritique. Il le fait autant pour raconter quelque chose sur lui-même que sur les autres. C'est un besoin qu'il ressent de parler du monde de cette manière-là".

Mise à mort du cerf sacré, entre drame psychologique et film d'horreur

Yorgos Lanthimos avait déjà eu du mal à finir The Lobster, ce qui ne l’avait pas empêché d’obtenir le prix du jury en 2015. Mise à mort du cerf sacré, peine aussi dans son épilogue. Mais ce film, qui part du drame psychologique pour filer salement vers l’horreur, voire le gore, ne manque pas d’atouts. Nicole Kidman et Colin Farrel forment un couple de médecins à la vie de famille bourgeoise bien rangée que vient perturber Martin (Barry Keoghan), fils d’un patient mort sur le billard du cardiologue chirurgien.

Yorgos Lanthimos est un sympathique sale gosse du cinéma qui brouille les cartes, mélange les genres et parvient à nous faire rire des situations les plus tragiques. "C'est stimulant de traiter de sujets qui soulèvent des questions et d'aborder des choses considérées comme taboues, mais j'essaye de m'amuser en le faisant, indique le réalisateur grec. Je veux éviter de me prendre au sérieux, ce qui serait pire, d'être didactique ou moralisateur."

L'Atelier, film noir sur la jeunesse

De Entre les murs à L'Atelier, c'est une même idée pour Laurent Cantet : interroger l'époque. Le réalisateur, Palme d'or 2008, a présenté son nouveau film dans le cadre de la sélection Un Certain Regard. Marina Foïs y joue Olivia, une romancière parisienne à succès chargée d'animer des sessions d'écriture avec des jeunes de la Ciotat, près de Marseille. 

Calanques, cigales, mer cristalline mais aussi prises de tête et incompréhension entre deux mondes qui se regardent en chiens de faïence. C'est un film très juste, sans pathos ni cynisme, que signe Laurent Cantet. C'est l'occasion aussi de découvrir une nouvelle bande, de celles que le cinéaste parvient si bien à sublimer, emmenée par la révélation Matthieu Lucci.

Sur la Croisette, Marina Foïs était heureuse de les avoir à ses côtés. "Évidemment, on tournait avec Cantet donc ils savaient qu'il avait eu la Palme d'or. Le premier matin, on a parlé de Cannes donc, eux, auraient trouvé inadmissible de ne pas y être. Après, il y a une excitation. Tout à l'heure ils ont fait un selfie avec Nicole Kidman. À part cela, je suis très heureuse d'être ici parce qu'ils vont être vus par des gens qui vont pouvoir apprécier, comme j'ai apprécié tous les jours, la qualité de leur travail, de leur jeu et de leur vivacité."

Le Journal de Cannes de mardi 23 mai avec Thierry Fiorile

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