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Interview d'Emmanuel Macron depuis Nouméa : l'Union syndicale des magistrats "attendait" la prise de position du président et juge qu'il "était dans son rôle"

La vice-présidente du syndicat Cécile Mamelin salue la prise de parole "mesurée" d'Emmanuel Macron sur la question des policiers mis en examen. Elle déplore toutefois "une pression" exercée par certains policiers sur la justice.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Interview d'Emmanuel Macron depuis Nouméa le lundi 24 juillet. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Pour Cécile Mamelin, magistrate, vice-présidente de l'Union syndicale des magistrats, Emmanuel Macron "était tout à fait dans son rôle", lundi 24 juillet à la mi-journée lorsqu'il s'est exprimé depuis Nouméa sur le dossier des policiers mis en examen (dont un placé en détention provisoire) pour violences. Le chef de l'Etat a rappelé que "nul n'est au-dessus des lois" tout en précisant le nombre de policiers blessés pendant les émeutes urbaines. Invitée sur franceinfo, la magistrate déclare qu'elle "attendait" cette parole du chef de l'Etat. Pour Cécile Mamelin, les magistrats "ne sont ni pro-policiers, ni anti-policiers" et la réaction de certains syndicats de police est une "pression" qui peut "porter atteinte à l'indépendance de la justice".

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franceinfo : Partagez-vous l'analyse faite par Emmanuel Macron ?

Cécile Mamelin : Oui, tout à fait. Nous nous attendions à une prise de position de Macron. Le climat de tension que l'on ressent depuis déjà environ deux ans entre la police et la justice s'est tellement dégradé qu'il fallait une parole au plus haut niveau de l'État. Cette parole était mesurée, elle est exactement celle des magistrats que nous représentons, c'est-à-dire qu'il faut soutenir les forces de l'ordre qui sont confrontées à des conditions extrêmement difficiles et qui l'ont été récemment mais il faut aussi savoir 'débusquer' des comportements illégitimes, qui ne répondent pas aux conditions normales d'intervention, dans des circonstances dont la justice tient compte. Un seul agent est en détention provisoire, ce qui veut dire que la justice a appliqué les règles du code de procédure pénale. C'est le droit que doivent respecter l'ensemble de nos concitoyens.

"Le fait qu'Emmanuel Macron ait rappelé que nul n'est au-dessus des lois, c'est vraiment une parole que nous attendions. Il était tout à fait dans son rôle."

Cécile Mamelin

à franceinfo

Quelle a été votre réaction à la lecture du Parisien, quand vous avez découvert les mots du directeur général de la police nationale qui souhaite la libération du policier placé en détention provisoire ?

Cette façon de généraliser un propos tout en reconnaissant qu'on ne connaît rien au dossier m'a extrêmement heurtée et je pense qu'elle a heurté énormément de magistrats. On ne peut pas considérer qu'il faut une justice d'exception pour les policiers. Ils sont particulièrement protégés lorsqu'ils font l'objet de violences puisque ce sont des circonstances aggravantes pour les auteurs. Lorsqu’eux-mêmes exercent des violences, certaines sont légitimes parce qu'ils représentent l'ordre et qu'ils doivent à la fois se protéger eux et nos concitoyens quand ils sont l'objet d'attaques, mais ils ne doivent pas exercer ce qu'on appelle des violences illégitimes. Sinon, nous ne sommes plus dans un État de droit. Si c'est ce que revendiquent certains policiers, c'est clairement non.

L'indépendance de la justice est menacée par les propos de certains policiers ou syndicats ?

C'est une pression qui peut sembler intolérable. Elle est mise sur le magistrat instructeur, sur le magistrat qui a placé en détention, sur la Cour d'appel qui éventuellement aura l'occasion d'examiner ce placement en détention. C'est une pression qui est exercée et c'est une façon de porter atteinte à l'indépendance de la justice. Il faut arrêter avec les raisonnements binaires, les magistrats ne sont ni pro-policiers, ni anti-policiers. Ils sont là pour rendre la justice avec des textes de loi. S'il faut changer la loi, ce n'est pas au magistrat de le faire mais au législateur.

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