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Tuerie de Chevaline : qui est le motard placé en garde à vue puis relâché sans aucune charge retenue contre lui ?

L'identité de cet homme n'a jamais été révélée. Il avait été vu à l'époque près des lieux du quadruple meurtre perpétré en 2012 à Chevaline, en Haute-Savoie. Ce cinquantenaire avait déjà éte mis hors de cause en 2015. 

Article rédigé par Catherine Fournier - Stéphane Pair
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le portrait-robot d'un motard aperçu près des lieux du quadruple meurtre de Chevaline (Haute-Savoie), diffusé le 4 novembre 2013 par la gendarmerie. (MAXPPP)

Son portrait-robot avait été diffusé le 4 novembre 2013, plus d'un an après la tuerie de Chevaline. Un homme, placé en garde à vue mercredi, a été relâché sans qu'aucune charge ne soit retenue contre lui, jeudi 13 janvier, dans cette affaire énigmatique. Son avocat, Jean-Christophe Basson-Larbi, avait confirmé auprès de franceinfo que son client était bien le motard vu à l'époque près des lieux du quadruple meurtre. Il avait été retrouvé en 2015, deux ans après un appel à témoins. Interrogé par les gendarmes, il avait finalement été mis hors de cause. Pourquoi était-il de nouveau dans le radar de la justice ? Que sait-on de lui ? Eléments de réponse.

Un motard croisé par des gardes forestiers

Il faut remonter en 2012, après la découverte d'une famille décimée sur une route de campagne près de Chevaline, non loin du lac d'Annecy. Le mercredi 5 septembre, un Britannique d'origine irakienne de 50 ans, Saad Al-Hilli, son épouse de 47 ans et sa belle-mère de 74 ans sont trouvés morts dans leur voiture. Ils ont reçu plusieurs balles dans la tête. L'une des fillettes du couple est grièvement blessée tandis que la seconde, recroquevillée sous les jambes de sa mère, s'en est miraculeusement sortie physiquement indemne. Un cycliste de la région, Sylvain Mollier, 45 ans, probable victime collatérale, a également été abattu.

Ce jour-là, à l'heure approximative du quadruple meurtre (entre 15h15 et 15h40), un homme portant le bouc et coiffé d'un casque noir circule à moto sur la route de la Combe d'Ire, en partie fermée à la circulation. Il croise deux gardes forestiers de l'Office national des forêts (ONF) qui lui demandent de respecter l'interdiction et de rebrousser chemin. Le motard obtempère et redescend le sentier, passant devant le parking où une partie de la famille Al-Hilli et le cycliste ont perdu la vie.

Un entrepreneur originaire de Lyon, adepte de parapente

Après le témoignage des deux agents de l'ONF, les gendarmes de la section de recherches de Chambéry tentent de retrouver le motard. Dans l'impasse, ils lancent un an plus tard un appel à témoins et le portrait-robot d'un homme portant un bouc et un casque d'un type très particulier, alors fabriqué à 8 000 exemplaires. L'individu devient un suspect dans l'enquête.

Il est retrouvé en février 2015 et auditionné comme témoin par les enquêteurs. Les gendarmes sont parvenus à l'identifier grâce à son téléphone portable, qui a "borné" dans la zone du crime, et par l'exploitation d'images vidéo collectées peu après le drame.

Le motard explique alors qu'il est bien venu du côté de Chevaline, ce 5 septembre 2012, pour pratiquer sa passion : le parapente. La zone est effectivement connue pour ses spots de vol libre, entre le col de la Forclaz, la montagne du Charbon et la commune de Doussard. Il assure ne pas avoir fait le rapprochement entre sa présence dans la zone, la tuerie et son portrait-robot diffusé dans toute la France.

A l'époque, il est mis hors de cause. Comme le confiait un acteur du dossier à franceinfo, "son profil personnel et professionnel l'excluent de la liste des suspects à 95%". Son identité n'a jamais été révélée.

Des "vérifications d'emploi du temps" à effectuer

En annonçant le placement en garde à vue de cet homme d'une cinquantaine d'années par la section de recherches de Chambéry, mercredi matin, la procureure d'Annecy, Line Bonnet, a expliqué qu'il s'agissait de "procéder à des vérifications d'emploi du temps" et à "des perquisitions" à son domicile, dans la banlieue de Lyon. 

Sans dévoiler l'identité de l'intéressé, la magistrate a confirmé que l'homme figurait parmi quatre témoins "remis en situation" sur les lieux du drame il y a un peu plus de trois mois et chronométrés, sur la base de leurs déclarations. En septembre 2021, le périmètre de la zone de la tuerie a été bouclé pendant deux jours pour effectuer cette remise en situation des quatre témoins, dont le motard du portrait-robot.

Selon les informations de franceinfo, la cellule Diane (division des affaires non élucidées) du pôle judiciaire de la gendarmerie a également fait travailler l'algorithme de son logiciel Anacrim et des incohérences chronologiques sont apparues.

Son avocat dénonçait "une erreur judiciaire"

"Il s'agit d'une erreur judiciaire, mon client vit un calvaire", a plaidé sur franceinfo son avocat, Jean-Christophe Basson-Larbi. Face à quelques journalistes qui l'attendaient devant la gendarmerie de Chambéry mercredi soir, il a estimé que cette garde à vue n'était "pas justifiée" car son client avait "toujours eu à cœur de participer à la manifestation de la vérité".

"Il a le sentiment de nager en plein Kafka et il a le sentiment et d'avoir livré absolument tout ce qu'il savait", a-t-il ajouté.

Cet homme "n'a, à aucun moment, le profil de quelqu'un qui pourrait avoir commis de sang-froid, avec préméditation, un tel assassinat", a souligné son conseil, précisant devant la presse que "la position de ce monsieur [était] toujours la même : 'Je me promenais (...) mais je n'ai pas croisé la route de cette pauvre famille'."

Une version jugée de nouveau crédible car, comme le signale la procureure dans un communiqué, "les explications données et les vérifications opérées ont permis d'écarter son éventuelle participation aux faits". Les faux coups de théâtre comme celui-ci ont été nombreux dans ce dossier.

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