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"On a laissé pourrir les habitations pauvres" : à Marseille, le logement est l'un des enjeux majeurs des municipales

A quelques semaines des élections municipales, des habitants de Marseille dénoncent la gestion de l'urbanisme et de l'habitat par la municipalité. Au total, près de 4 000 personnes ont été délogées depuis l'effondrement de deux immeubles en novembre 2018. 

Article rédigé par Matthieu Mondoloni - Édité par Thomas Pontillon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un tag sur un immeuble dans le quartier du Panier à Marseille, en janvier 2020.  (MATTHIEU MONDOLONI / RADIO FRANCE)

Dans le quartier du Panier, en plein centre de la ville, les touristes aiment se promener dans les petites rues étroites où les immeubles ont des façades colorées et des volets bleus. Le Panier est surtout un quartier populaire où les logements insalubres côtoient les appartements Airbnb. "Ça, c'est une rue qui est barrée, montre Isabelle, une habitante du quartier. L'immeuble menace, parait-il, de s'effondrer sur ceux qui sont en face". Un peu plus loin, "on tombe sur une grille avec des détritus derrière. On voit un chantier qui a l'air à l'abandon", déplore-t-elle. En novembre 2018, non loin de là, huit personnes sont mortes dans l'effondrement de deux immeubles rue d'Aubagne. L'habitat indigne reste un fléau, il touche 10% des habitants de la ville, et le logement est l'un des principaux enjeux des élections municipales de mars 2020.  

Un chantier dans le quartier du Panier à Marseille où des immeubles ont été évacués.  (MATTHIEU MONDOLONI / RADIO FRANCE)

Dans le quartier du Panier, les habitants se sentent abandonnés par la municipalité poursuit Isabelle. "Pendant plus de 25 ans on a laissé pourrir les habitations pauvres, affirme-t-elle, tout en construisant des infrastructures luxueuses pour attirer les touristes. On a laissé pourrir tout et puis maintenant au nom, soi-disant d'une précaution, on chasse les gens de chez eux." 

"Urbanisme pour les riches" 

Depuis les effondrements de la rue d’Aubagne, les arrêtés de péril se multiplient à Marseille contre ces immeubles jugés dangereux. Les habitants, par précaution, sont priés de quitter les lieux, parfois sous escorte policière. "Il y a à peu près 4 000 personnes qui ont été délogées, assure Isabelle, et il n'y a encore aucune maison qui a été réellement réhabilitée". 

À 26 ans, Martin fait partie de ces délogés. Il a été évacué de son appartement du Panier un matin de novembre 2018. "En une demi-heure, tu dois partir, tu dois prendre tes effets personnels, sans savoir vraiment ce qui se passe."

Tu te retrouves dans une chambre d'hôtel avec une valise et c'est tout. Là, il faut apprendre à vivre avec une valise, sans cuisine ni machine à laver. C'est ça, la première violence. 

Martin

à franceinfo

La violence est aussi politique ajoute Emmanuel Patris, urbaniste et membre de l’association Un Centre-ville pour tous : "Il y a un peu cette dichotomie et cette déchirure avec une ville qui avance très vite. On le voit sur le front de mer, affirme-t-il. La politique de l'habitat à Marseille s'est tournée depuis 25 ans vers un urbanisme plutôt pour les riches que pour les pauvres", conclut-il. 

La municipalité actuelle assume cette gentrification. À l’image de cette sculpture installée sur le vieux port sur laquelle on peut lire : “Ici, Marseille change”. Ces derniers jours, elle a été détournée par des habitants, qui ont recouvert l’inscription originale d’une autre : “Ici, Marseille s’effondre”.  

À Marseille, le logement est l'un des enjeux importants des municipales - Le reportage de Matthieu Mondoloni

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