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Transports : en cas de nouvelle taxe, "il faut s'attendre à une nouvelle augmentation des billets d'avion", estime le président de l'Union des aéroports français

D'ici 2030, la décarbonation de l'aérien va déjà engendrer un coût de "3 milliards d'euros" pour le secteur, rappelle le président de l’Union des aéroports français. "Ce n'est pas le moment de mettre en place une taxe".
Article rédigé par franceinfo
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Le président de l’Union des aéroports français, Thomas Juin, le 20 janvier 2019. (XAVIER LEOTY / AFP)

Le président de l’Union des aéroports français, Thomas Juin, craint lundi 21 août sur franceinfo que la nouvelle taxe envisagée par le gouvernement sur les billets d'avion pour financer le secteur ferroviaire jugé plus vert, ne provoque "une augmentation, encore," des coûts. Selon lui, "soit elle sera répercutée sur le prix du billet, soit les compagnies vont réduire leurs marges si elles le peuvent", ce qui "peut nuire à la compétitivité du secteur".

>> "Le transport aérien est déjà très taxé", souligne le PDG d'Aéroports de Paris

franceinfo : Taxer différemment le secteur aérien est-il une bonne mesure pour vous ?

Thomas Juin : Nous ne connaissons pas encore les contours exacts de ce projet qui doit être présenté à l'Assemblée nationale à l'automne. Ça ne peut pas nous satisfaire. Cette taxation qui impactera uniquement les passagers au départ des aéroports français est une grande source d'inquiétude et d'incompréhension pour le secteur. Elle intervient à un moment où le secteur est en phase de reprise et n'a toujours pas retrouvé le niveau de trafic d'avant crise 2019. C'est encore fragile. Ce n'est pas le moment de mettre une taxation qui profitera au secteur ferroviaire : on laisse penser que ce sera demain une alternative, mais dans la plupart des cas, l'avion propose des liaisons internationales ou transversales où le train n'a pas justement une offre satisfaisante à proposer.

"Je pense qu'au contraire, il faut que le secteur aérien dispose des ressources nécessaires pour sa décarbonation."

Thomas Juin, président de l’Union des aéroports français

à franceinfo

Le gouvernement sait bien que cette décarbonation va coûter très cher au secteur aérien, ce n'est pas le moment de mettre en place une taxe.

Le ministre des Transports estime justement que le choix entre train et avion est aujourd'hui biaisé en raison des avantages accordés à l'aérien : qu'en pensez-vous ?

Il faut savoir que l'avion est très taxé. Cette taxe se rajoutera à une kyrielle de taxes : la taxe aviation civile, la taxe sûreté, la taxe solidarité.

"Je ne sais pas si on s'en rend compte, mais sur un billet d'avion court courrier, les taxes peuvent représenter jusqu'à un tiers du prix du billet d'avion."

Thomas Juin

à franceinfo

Je crois que le secteur aérien a besoin aujourd'hui de trouver de nouvelles ressources pour assumer sa décarbonation. Je rappelle qu'en 2025, la décarbonation est évaluée à 1 milliard d'euros pour le pavillon français, à plus de 3 milliards d'euros d'ici 2030.Il est urgent, au contraire, de mobiliser les moyens pour que le secteur aérien puisse assumer cette transition énergétique.

Comment décarbone-t-on l'aérien ?

Le premier levier est de créer une filière de biocarburants, en France notamment. Le financement, c'est, à la fois des fonds publics en partie pour faire émerger cette filière, et demain, ce sera aux compagnies aériennes d'assumer le prix de ce biocarburant qui est aujourd'hui trois à quatre fois plus cher que le kérosène. Je ne pense pas qu'il soit pertinent de rajouter une couche avec une fiscalité. Il faut s'attendre à une nouvelle augmentation des billets. Cette taxe, soit elle sera répercutée sur le prix du billet, soit les compagnies vont réduire leurs marges si elles le peuvent. Mais nous sommes dans un secteur international avec une concurrence très développée.

"Le pavillon français sera impacté par rapport à ses concurrents si on rajoute une fiscalité qu'on estime déjà suffisamment lourde en France."

Thomas Juin

à franceinfo

Le gouvernement évoque une taxation supplémentaire sur les billets d'avion les plus chers, en première classe et business : est-ce une bonne piste ?

Taxer les billets d'avion les plus chers, ça paraît séduisant. Il faut déjà savoir que la clientèle affaires ne reprend pas suffisamment par rapport à la clientèle loisirs. Et puis, ça peut paraître anodin et indolore de rajouter quelques euros, mais ça s'ajoute à des taxes qui représentent déjà plus d'un tiers parfois du prix du billet. Toute taxation supplémentaire doit être mesurée avec la plus grande vigilance car elle peut nuire à la compétitivité d'un secteur qui est en concurrence en Europe déjà avec de nombreuses compagnies aériennes et d'autres pays européens.

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