Reportage "On peut se retrouver face à des collègues qui ont des idées du RN" : des syndicats lancent des formations pour contrer le discours de l'extrême droite

Face à la montée en puissance du RN, notamment chez des salariés parfois membres de syndicats, ces derniers ont décidé de riposter. Ils proposent des sessions de formation pour apprendre à lutter contre les idées et les arguments du Rassemblement national.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une affiche du Rassemblement national pour les élections européennes, dans une salle à Limoux (Aude), le 20 avril 2024. (IDRISS BIGOU-GILLES / HANS LUCAS)

Alors que la liste menée par Jordan Bardella caracole en tête des sondages pour les élections européennes, les syndicats multiplient les initiatives pour tenter de dissuader les salariés de voter pour le Rassemblement national. Un RN qui influence de plus en plus les salariés, y compris ceux qui se disent proches des syndicats ou qui en sont adhérents.

Plusieurs centrales dénoncent ce qu'elles appellent "l’imposture sociale" du RN, et la CGT par exemple considère que la lutte contre les idées d'extrême droite est une priorité absolue. Pour contrer cette influence grandissante, l'association Visa, qui rassemble notamment la FSU, Solidaires et de nombreux syndicats de la CGT, s'efforce de sensibiliser les militants syndicaux au combat contre l'extrême droite.

Un livre et des conseils pratiques

Nous avons assisté à l'une de ces sessions de formation à Carcassonne (Aude). Dès le début de la session, l'animateur jette un froid dans l'assistance. Sur les 13 millions d'électeurs de Marine Le Pen en 2022, il y avait beaucoup de salariés, sûrement des syndiqués, probablement certains qu'ils connaissent bien.

Et sans plus attendre on passe aux travaux pratiques par petits groupes. "Vous apprenez qu'un militant de votre syndicat est présent sur une liste RN aux élections municipales, que faites-vous syndicalement ?", lance un participant. "Il faut qu'il choisisse, c'est incompatible", répond une participante.

"Moi j'en connais. On peut être sur une liste RN sans être adhérent du RN. Je l'ai vu en campagne."

Un participant

dans le groupe de travail

"Quel est son cheminement ? C'est un choix, ou c'est par amitié ?, interroge un intervenant. Est-ce que nous, on a mis cette problématique suffisamment en avant ? On ne peut pas se dédouaner non plus."

Beaucoup reconnaissent ne pas toujours savoir quoi dire a un collègue proche du RN, et dans certains cas éviter le dialogue. Patricia, secrétaire médicale et militante CGT, pense, elle, que les syndicats devraient être plus vigilants. "On peut se retrouver confrontés à des collègues qui ont des idées du RN, y compris dans le syndicat, reconnaît-elle. C'est très compliqué, donc il faut bien faire de la prévention, y compris auprès de nos jeunes. Il faut leur expliquer à quoi sert le syndicat, que ce n'est pas perso mais collectif, avec des idées et des valeurs."

Chaque militant repart avec un petit livre et des conseils pratiques comme "accepter le dialogue" et "ne jamais s'énerver". Pour le formateur Hervé, les syndicats doivent reprendre un travail abandonné depuis trop longtemps.

"Après le 21 avril 2002, où Jean-Marie Le Pen a été au second tour, quand il a été battu, on a pensé que le travail avait été fait, et qu'il était acquis pour les salariés que l'extrême droite était un danger mortel."

Hervé, formateur

à franceinfo

"On a fait une erreur certainement, tous syndicats confondus, de considérer que la lutte contre le Front national était un acquis, ajoute-t-il. Eh bien non, c'est pas vrai, il faut toujours travailler ces questions-là sur la base de nos valeurs syndicales." La session se termine sur un dernier conseil : pour bien combattre un adversaire, il faut bien le connaître et donc lire ses publications et de temps en temps écouter ses discours. 

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