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Suisse : quand des communes empruntent de l'argent à la FIFA plutôt qu'à des banques

La Radio-Télévision Suisse a révélé en début de mois que plusieurs grandes collectivités suisses avaient emprunté de l'argent à la FIFA. un procédé légal mais qui fait polémique, alors que ces mêmes communes critiquent régulièrement l'organisation mondiale du football.
Article rédigé par franceinfo - Jérémie Lanche
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
L'entrée du siège de la FIFA en décembre 2015. Image d'illustration. (FABRICE COFFRINI / AFP)

Peut-on critiquer la FIFA le lundi, et lui demander de l’argent le mardi ? C'est en tout cas ce qu'on fait plusieurs grandes collectivités suisses, qui ont emprunté des centaines de millions de francs suisses au gendarme du foot mondial ces dernières années, tout en soulignant par exemple les aberrations de l'organisation du Mondial au Qatar.

Si ces emprunts, révélés par la RTS, sont tout à fait légaux, ils interrogent. Pourquoi une ville emprunterait à une organisation comme la FIFA plutôt qu’à une banque ? Tout simplement parce que cela coûte moins cher. Depuis dix ans que les taux d’intérêts étaient négatifs, la FIFA avait pris pour habitude de faire des prêts à taux 0 à des collectivités. Pour l'organisation mondiale, c’est toujours mieux que de voir sa trésorerie fondre comme neige au soleil en banque. Pour les villes, cela présente aussi des avantages : pas de frais, pas de délai. C’est ainsi que Genève a reçu 150 millions de francs suisses de la FIFA l’an passé ; Neuchâtel, 100 millions ; Lausanne, 40 millions.

Des collectivités plutôt à gauche

Lausanne a pourtant dit non aux fan-zones pendant la Coupe du monde au Qatar l'été dernier. Le syndic (maire) de la ville, Grégoire Junod, admet que le message est peut-être contradictoire : "La polémique n'est pas partie d'une contestation du prêt à la FIFA, paradoxalement. La polémique est partie du fait qu'on nous a reproché d'avoir critiqué l'organisation de la Coupe du monde au Qatar et parallèlement de pratiquer les emprunts. Des emprunts qui ont été pratiqués par de très nombreuses collectivités suisses. C'est cette contradiction qu'on nous reproche, et ça je peux le comprendre."

L’affaire embarrasse d’autant plus que beaucoup des collectivités qui ont contracté ces prêts à court terme sont classées à gauche. Sur le papier, elles sont donc peu favorables à passer des contrats avec une organisation qui collectionne les affaires de corruption. Mais là encore, Grégoire Junod défend un choix payant pour les finances publiques. D’autant que passer par une banque n’aurait pas été beaucoup plus éthique selon lui : "Quand vous placez de l'argent, vous pouvez choisir de le placer dans des fonds qui offrent des garanties sur les questions d'armement, de respect des conditions de travail, etc. Quand vous empruntez de l'argent, ce n'est pas possible."

"Si on emprunte à une banque, on n'a aucune garantie sur les fonds. On peut bien dire 'on n'empruntera plus jamais à la FIFA', il y a une portée symbolique à ça. Mais dans les faits, on n'a pas moyen de contrôler l'origine des fonds que l'on emprunte."

Grégoire Junod, syndic de Lausanne

à franceinfo

À l’avenir, il faudra toutefois faire sans la FIFA. Avec la fin des taux négatifs et aussi, sans doute, à cause de la polémique, le gendarme du foot mondial a laissé entendre qu’il ne jouera plus les prêteurs. La ville de Berne est celle qui va le plus y perdre. Depuis 2017, elle a reçu près de deux milliards de francs suisses de la FIFA.

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