Cet article date de plus d'onze ans.

Radio France en deuil après la mort de Philippe Chaffanjon

TÉMOIGNAGES | Le directeur du réseau France Bleu, et ancien directeur de France Info, est mort à l'âge de 55 ans ce mercredi 24 avril. Il a succombé à une crise cardiaque. Qu'on l'ait simplement croisé ou côtoyé pendant plusieurs années, son humour, sa douceur et la passion de son métier resteront.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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  (Maxppp)

Philippe Chaffanjon, ou "Chaf" comme tout le monde
l'appelait dans la Maison ronde, vient de disparaître. Il s'est éteint à 55 ans
ce mercredi 24 avril d'une crise cardiaque pendant son sommeil. Il était depuis
moins d'un an devenu le directeur de France Bleu, le réseau des stations
locales de Radio France. Les équipes de France Info le connaissaient bien. Il a
été le directeur de la station pendant trois ans et y laisse un souvenir
impérissable. 

Jean-Luc Hees, le PDG de Radio France

"Radio France est dans la peine et dans le deuil.
Philippe Chaffanjon nous a quittés. Nous sommes assommés et le chagrin a dévalé
dans les couloirs de notre maison. Nous aimions tout de ce garçon, son talent
de journaliste, sa manière d'être 'patron', sa gentillesse, son attention aux
autres et son humour. Un tendre humour
". 

Pierre-Marie Christin, directeur de France Info

Pierre-Marie Christin connaissait Philippe Chaffanjon depuis 25 ans. Il a travaillé à ses côtés lors
de leur passage commun à RTL. "Dans ce genre de métiers, et surtout dans
le métier des reporters, il y a les collègues et il y a les frères. Chaf', c'était
un frère."

Jean-Rémy Macchia, chroniqueur à France Info

Doué, l'esprit vif, l'oeil
futé, le sourire discret mais présent, sacrifiant beaucoup (...trop ?) sur
l'autel de l'efficacité et du "rendu" journalistiques, Philippe Chaffanjon était
"LE" journaliste d'infos par excellence.
Pas de répit, pas de pause
; toujours en prise sur ce qui se passait sur la planète, voulant rendre compte
tout de suite. Et au mieux.
Comprenant son époque,
vivant AVEC le monde, il était fanatique de radio. Et de journalisme. Un sens
aigu de l'époque, aussi ; des manières d'écouter les infos.
Furtif - car voulant
toujours être rapide -, difficile à arrêter dans son élan, pas évident à saisir
pour lui proposer quelques secondes de dialogue qui n'aurait eu qu'un lointain
rapport avec l'actualité (l'actu, là..., toute bouillonnante et
tourbillonnante), il savait être aussi d'une immense qualité d'écoute, s'il le
fallait.

Sous ses dehors de hâte et
de fluidité insaisissable, une profonde gentillesse. Sans appesantissement. Sans
avoir l'air d'y toucher. Mais authentique, bien inscrite au plus profond de ses
préoccupations, et relayée par une mémoire très précise sur tout ce qui était
humain.
N'oubliant rien des êtres,
de leur travail, de leur personne.
Une gentillesse
mystérieuse, presque cachée. Mais à l'oeuvre sans relâche.
Très
émouvante.
Philippe, dopé à l'info,
mais émouvant dans sa sensibilité très, très humaine.
 

En plus - mais c'est très
accessoire - je fais partie des chroniqueurs qu'il a fait "rentrer" à France
Info.
Modestement, je lui dois
tout.
 

Il manque par son empreinte

  • même s'il n'était plus à la tête de la radio depuis juillet
    dernier.
     

Un petit "Ciao", discret,
habité de respect, teinté d'amitié, cher Philippe...  

La direction de RTL où Philippe a travaillé 20 ans

Philippe a su apporter à la rédaction et aux auditeurs de RTL son talent, son professionnalisme et son extraordinaire dynamisme humain. En tant que grand reporter, il avait couvert les plus grands événements de la planète, de la chute du mur de Berlin à la guerre au Rwanda.

Communiqué de François Hollande

C'est avec peine
que j'apprends le décès de Philippe Chaffanjon. Tout au long de
sa carrière de journaliste, entièrement dédiée à la radio, Philippe Chaffanjon s'était fait remarquer par sa rigueur et son
professionnalisme.

 A la tête de
France Info puis du réseau France Bleu, il avait su incarner une conception
exigeante du service public et se faire apprécier de ses collègues et de ses
nombreux interlocuteurs.

 J'adresse à sa
famille et à tous ses collègues de Radio France mes très sincères
condoléances.

Michel Polacco, secrétaire général à l'information de Radio France

Philippe, je l'ai accueilli comme jeune journaliste sortant du CFJ en 1981
au service des reportages de france Inter. Il était le fils d'un écrivain et
journaliste célébre, Arnaud Chaffanjon, patron de la rédaction de Point de vue
et images du monde. Il était du sérail. Lui, au CFJ avait choisi la radio.

Volontaire, plein de vie et d'humour, il était devenu l'un des brillants
reporters parmi lesquels Brigitte Rénaldi, Pierre Baretti, Sylvain Augier,
Philippe Reltien, Leslie
Le Tac, aujourd'hui
disparu également. Une sorte de Dream Team pleine d'humour qui ne me négligeait
pas ses blagues. 

Parti quelques années après à RTL où il a fait une brillante carrière, il
rêvait de nous revenir et nous l'avions envisagé ensemble lorsque je présidais
encore aux destinées de France Info. Finalement Jean-Luc Hees l'a appelé, et il
s'est immergé dans la famille Radio France et particulièrement France Info. À
tel point que la disparition de Francis Tyskiewicz lui a rendu impossible l'idée
de continuer sans lui.

À France Bleu, son départ était fulgurant, il s'y sentait
comme un poisson dans l'eau. Directeur Général, il avait bien endossé le
costume. 

Nous avions de petits entretiens réguliers avec Michel Serres et lui, tous
deux proches parce que voisins de pays, lui à Couthure sur Garonne et Michel
Serres originaire d'Agen dont il porte fièrement l'accent. Notre prochain projet était ma visite en vol depuis le périgord programmée pendant nos prochaines
vacances, selon la météo, en avion ou en helicoptere. Nous en parlions mardi !
Et son humeur était plus que bonne. 

Un beau parcours de reporter a précédé un joli chemin de dirigeant à RTL
puis a Radio France ou il avait encore du chemin à faire. Et ce sera plus dur
de le faire sans lui, lui qui pour moi était un peu la relève ! 
Et je ne peux que penser affectueusement à sa femme Isabelle qui reste si
violemment frappée et à ses enfants. Et à ses camarades de travail effondrés !
Courage à tous.
Salut ami ! 

Virginie Lebrun, présentatrice à France Info

"Je suis toujours là"... C'est ce que tu m'avais écrit, il y a quelques mois, pour me
souhaiter "une très bonne année"... C'est encore raté pour cette fois.

Toujours là, oui, tu l'étais, à la fois proche et distant,
autant que la pudeur l'impose. Protecteur aussi, comme un beau-frère qui veille sur la
famille de son frère disparu. Plus que le journaliste génial et le patron hors pair reconnu
de tous, c'est l'homme que tu étais que je souhaite mettre en avant aujourd'hui.
Il y a un an, quinze mois exactement, j'ai découvert le visage d'un homme
immensément gentil, bienveillant, discret, quelquefois désarmé mais toujours
disponible, le sourire timide qui envoie de la lumière et ne veut pas
blesser.

Je suis aujourd'hui profondément triste. J'ai le cœur serré
et cette boule dans la gorge qui ne s'en va pas. Je pense beaucoup à Isabelle et
à tes enfants.
Je veux croire que tu as retrouvé ton complice Francis et
qu'ensemble vous refaites le monde. Mais tu aurais pu attendre un peu
...encore.

Je veux aussi garder en mémoire ces moments amusés que tu
partageais avec lui.. "comme l'écorchure au genou qui fait une croûte puis
devient une cicatrice pour ne laisser que les bons souvenirs".

Bye Bye Philippe.

Une journaliste de passage à France Info

Ce soir j'ai une grande peine pour cette radio. Cette radio, France Info, dans
laquelle  comme beaucoup  d'autres "cdd Radio France" j'ai eu la chance de
passer ...
La première fois, c'était il y a un peu plus d'un an, et dès le
premier jour j'ai entendu son nom : "Chaf". Toujours en bien. Toujours. Ce nom
n'était associé qu'à du bon.
Et puis je l'ai vu. Je l'ai vu passer,
s'arrêter, parler avec les journalistes. Tous. Je l'ai vu à l'écoute, le soir
du premier tour de la présidentielle. C'était la course mais il a pris le temps
de répondre calmement quand je lui ai posé une question, moi qui découvrais pour
la 1ère fois ces soirées. Le souvenir d'un sourire, d'une présence
rassurante.
Chers journalistes / chroniqueurs /chefs / techniciens/ bocaliers
/ administratifs/assistants de France info, je n'ose vous le dire car vous avez autre chose
à entendre mais je vous admire et je m'associe à votre tristesse, que je sais
immense.

Nicolas Poincaré était aux côtés de Philippe Chaffanjon lors de reportages de guerre 

Sébastien Baer, grand reporter à France Info

Philippe donnait l'impression de
ne jamais décrocher du robinet de l'info et de l'actualité. Sa vie semblait
dédiée à la radio et au journalisme. En permanence le "nez dans le guidon",
grappillant ça et là quelques rares heures de sommeil.

Ses coups de fil au petit matin
aux rédacteurs en chef étaient devenus légendaires. Chaff s'enquérait du  "menu" de la matinale, s'assurant de telle ouverture ou de la présence de tel
ou tel reportage. Il savait "gérer" l'actu chaude mais prenait aussi le
nécessaire temps du recul, imaginant des "angles" de reportages, anticipant
les sujets et "sentant" quelle place leur donner à
l'antenne.

Chaff avait l'art de faire de
France Info une machine de guerre, sans jamais oublier l'huile nécessaire aux
rouages, la dimension humaine. C'est ce qui a fait de lui un chef apprécié,
incontesté et incontestable.

Aujourd'hui, je pense à sa femme,
à ses quatre enfants. Il en était fier. Il aimait évoquer leur parcours, la
passion de sa femme pour la mécanique quantique, les débuts réussis de Charlotte
dans le journalisme...

De ses années passées à couvrir le
monde comme reporter, il avait conservé des images extraordinaires qu'il aimait
partager. Rwanda, Bosnie, chute du mur de Berlin... L'année dernière, à l'occasion
du vingtième anniversaire du début du conflit en Bosnie, ses souvenirs
étaient remontés à la surface. Par son énergie, il insufflait à toute la
rédaction un enthousiasme communicatif, nous donnait l'envie de
nous surpasser pour donner le meilleur de nous-mêmes.

Son départ de France-Info l'année
dernière nous avait attristés. Sa disparition nous laisse
inconsolables.

Le journaliste Jean-Pierre Montanay a croisé "Chaf'" sur le terrain 

Valérie Crova, correspondante de Radio France à Beyrouth

Chaf... Il fallait
capter ton attention en une poignée de secondes. Tu semblais toujours préoccupé par quelque chose. L'actualité ? Tu en étais accro ! Au point d'écouter la radio
dès 5h du mat...  

Quand tu faisais une
remarque, on la prenait à cœur, qu'elle
soit bonne ou mauvaise. Quand elle était bonne, on était fier de nous !!! Et
quand elle était mauvaise, on s'en voulait...

Il y a une chose sur laquelle tout
le monde s'accordera : ton sourire. 

Alain Pagès, rédacteur en chef à France Info

Philippe,

Comment te dire, difficile de résumer en quelques mots
ces moments uniques passés à tes côtés.

Le hasard nous avait fait nous rencontrer en 1984 en
Dordogne, quand jeune automobiliste, j'avais pris en autostop ce jeune parisien
fraîchement embauché à France Inter.

J'ai croisé, pour mon plus grand bonheur, à nouveau ta
route à France Info.

Difficile d'oublier tes bons mots et tes analyses sans
concession sur les sujets d'information et sur un monde médiatique en pleine
mutation.

Désormais la famille de la radio est orpheline, le Lot-et-Garonne aussi; cette terre imbibée des eaux de la Garonne qui collait à tes chaussures et qui faisait de toi un
homme de grande valeur, un "brave type", comme on dit chez-nous.

Salut l'ami.

Camille Crosnier, ancienne journaliste à France Info

"Ouais, c'est Chaff " : même toi tu ne t'appelais ni par ton nom, ni par ton
prénom, quand tu laissais un message sur un répondeur. Chaff... j'entends ta
voix, je vois ton sourire à la fois malicieux, enfantin et chaleureux, et puis
tes yeux. Qui ne sont pas capables de regarder 2 secondes d'affilée au même
endroit. C'est vrai, ça, que tu donnais toujours l'impression d'être ailleurs,
de ne pas écouter, en ponctuant la conversation de "mmm ", "ouais ! ", plus que de
phrases, laissant parfois ton interlocuteur totalement déstabilisé. Le but -
avant d'aller vers toi - c'était de se dire "ok j'ai 30 secondes... top chrono "
! Et pourtant, t'imprimais tout. Je me souviens d'un jour où tu m'as reçue dans
ton bureau de grand chef, alors que je n'étais déjà plus au 8ème étage, ni même
à la maison ronde. Et là tu t'es assis. Tu m'as écoutée, rassurée. Tu n'avais
rien oublié de ce qui m'arrivait. Et tu étais désolé. Quand tu parlais le plus,
finalement, c'était à la sortie du studio... "oula, Chaff vient me dire quelque
chose, ça va barder
". Exigeant... inspirant. Flippant aussi, ce jour d'été 2008
où tu as débarqué DANS le studio, au milieu du journal, parce que la flamme
olympique s'était éteinte, et que tu n'avais pas aimé ce que j'avais dit à
l'antenne. Tu avais raison, encore ! Et puis tu repartais, faisais des
allers-retours dans le couloir, donnais l'impression parfois que tu voulais
t'envoler avec les reporters, les yeux brillants, tout le monde le voyait, ça
nous amusait.

Chaff, ce que j'écris c'est hyper cliché, c'est larmoyant,
c'est maladroit, et c'est tout ce que je déteste. Mais merde, voilà. Je suis
rien, personne, certainement mal placée, mais je suis triste. Infiniment. C'est
dégueulasse et injuste ce qui s'est passé. Je n'arrive pas encore à y croire. Et
je pense à ceux, nombreux, qui te côtoyaient bien plus et te connaissaient bien
mieux. A ta famille.

Je sais que tu n'es pas seul là-bas, vous devez
désormais commenter tous les deux le monde vu d'en haut. Rien ne vous échappe
plus. Regarde nous, tristes. Regarde comme nous t'aimions et t'admirions.
Regarde comme tu vas nous manquer. Donne-nous un peu de la force dont tu avais
fait preuve ces 15 derniers mois. Et surtout, Chaff, garde ton sourire, et ton
rire. Il va faire soleil demain, c'est un bon début. Merci.

Bertrand Queneutte, journaliste sur les antennes de Radio France

C'est un grand vide que je ressens. Les vides qu'à la radio, on cherche plutôt à éviter. Je suis arrivé à Radio France en 2010 et je dois avouer que c'était jouissif de savoir "Chaf" piloter le réseau depuis près d'un an. Ce réseau synonyme, disait-il, il y a quelques jours, de "maillage pour tous". Du coté de France Info, je me souviens qu'à l'époque, tous regrettaient son transfert et "jalousaient" gentiment ses nouveaux collaborateurs/trices, Philippe Chaffanjon semblait faire l'unanimité dans la Maison. Partout où je passais, tous louaient ses multiples qualités. Partout. Tous saluaient son travail accompli à la tête de France Info. Et celui en cours, du côté de France Bleu. Son succès professionnel, bien sur. Mais aussi humain. A l'annonce des audiences la semaine dernière, son nom était dans toutes les bouches. A Metz par exemple, où je me trouvais quand ils sont tombés. Des bouches qui souriaient sur des visages satisfaits, en évoquant le personnage. Mes échanges avec lui ont été peu nombreux. Mais le dernier, indirect, a été très fort. Philippe Chaffanjon était à l'écoute. Il dégageait l'envie de transmettre. De transmettre aux jeunes, notamment. L'envie de les pousser. Une rencontre qui laisse des traces. De jolies traces. Un homme qu'on n'oublie pas.

Nathanaël Charbonnier, rédacteur en chef à France Info

Décidément, cette année 2013 a décidé de nous
provoquer et de nous faire couler des larmes. Je pense à ta famille Philippe,
celle dont tu parlais de temps en temps au travail avec dans le regard cette
tendresse que les parents ont pour leurs enfants et leurs proches. Je pense à ta
famille de radio, dont j'aime penser que je faisais partie. Je me souviens
parfaitement de la première fois ou je t'ai vu dans ce bureau que tu partageais
avec Francis.

Je me souviens de cette joie que j'ai eu de travailler avec toi.
Ta façon de venir demander si on faisait quelque chose sur tel ou tel sujet. Il
n'y avais pas d'ordre, juste une direction à suivre qui se révélait le plus
souvent être la bonne. Comme tous, je pourrais raconter, ton sourire, tes coups
de téléphones le matin, ou à tout autre moment de la journée. Je pourrais
raconter ton sourire dans le quotidien, ta façon de vouloir accélérer le temps
et tout simplement le plaisir de travailler à tes cotés.  Ce soir, je me
souviens aussi de notre dernier échange, autour de ce verre. Je me félicite
d'être passé à cet endroit l'autre soir et d'avoir accepté ce petit apéro
improvisé avec Mathieu et Laurent.

J'ai adoré ce tour de France des locales que
nous avons fait et j'ai aimé voir ce bonheur que tu a exprimé en parlant de
France bleu. On s'était découvert aussi la photo en commun, avec ces discussions
sur les reflex et les objectifs. Philippe, cette année 2013 a décidé de nous
faire couler des larmes, mais elle a raté son coup, car c'est de partout la joie
et le bonheur d'avoir été à tes cotés qui s'écrit, ce bonheur et cette joie
d'avoir travaillé et appris avec toi. Et cela, je sais qu'on va le répéter tous
les jours de l'année à venir, et bien après encore.

Hélène Lam-Trong, reporter à France Info

Philippe,

Quand je parlais de toi à mes amis, ils avaient du mal à croire ce que je leur racontais.

Tes coups de fil sévères parfois, réconfortants, souvent, après une bourde. Ou ceux, galvanisants, même en pleine nuit, après une journée difficile.

Tes paris sur certains dont j'ai fait partie, et que rien ne te forçait à prendre. Ton implication dans nos soucis professionnels, ton humanité dans nos coups durs personnels.

Ta présence permanente, à la rédac, ton omniprésence, même.

Je ne serai pas la seule à le dire mais peu importe, c'est de bon coeur que je te partage sur ce point : on a tous quelqu'un qui nous a guidé, inspiré, encouragé. Ce quelqu'un pour moi, ça a été toi. Tu as élargi mon horizon, tu m'as appris, tu m'as conseillée.

Tu me manquais déjà, depuis ton départ de France Info.

Tu me manqueras, désormais. Tout court.

Harlem Désir, Premier secrétaire du Parti socialiste

C'est avec une grande tristesse que j'apprends la mort brutale de Philippe Chaffanjon.

La France perd aujourd'hui un grand journaliste, qui aura consacré sa vie entière à la radio, depuis ses débuts comme reporter à France Inter, jusqu'à la direction de France info, en passant par différents postes occupés à RTL.

Son nom est associé depuis plusieurs années au groupe Radio France qu'il a servi avec une passion, une exigence et une rigueur qui font que chacun salue aujourd'hui un ardent artisan d'un service public de grande qualité dans notre pays.

Philippe Chaffanjon avait l'estime de ses confrères, tant pour son talent journalistique, que pour ses qualités humaines sa générosité, son humour.

En mon nom personnel et au nom du Parti socialiste, j'adresse mes pensées les plus chaleureuses et mes condoléances les plus sincères à la famille, aux proches de Philippe Chaffanjon ainsi qu'à ses collègues et à l'ensemble du groupe Radio France.

Raphaël Ebenstein, journaliste à France Info

"Non mais, putain, les mecs ! C'est mou ! Vous dormez à l'antenne ou quoi
?
"

Excuse-moi, Philippe, mais le 1er souvenir que je garde de toi reste ce
savon auquel j'avais eu droit (avec un collègue qui s'en souvient sans doute
lui aussi encore), peu de temps après mon embauche à France Info, parce que
j'avais en effet la voix un peu fatiguée à 7h du mat', ce qui ne - se - pardonne
pas à la radio.

Tu incarnais l'exigence et tu avais évidemment raison, même si ça ne
faisait pas toujours plaisir à entendre. Parce que tu écoutais tout, aussi bien
tard le soir que dès potron minet. Tout ce qui était diffusé à la radio, tout ce
que diffusaient les autres radios, toujours aux aguets, au taquet, ne maniant
pas la langue de bois, harcelant de coups de fil les rédacteurs en chef quand tu
n'étais pas encore arrivé à la maison ronde.

Et en même temps tu étais un directeur profondément humain, à l'écoute des
gens, de leurs envies. Ce que j'avais fini par découvrir, une fois passé ce
moment où tu m'impressionnais un peu trop (si si, tu pouvais être réellement
impressionnant).  Et tu m'avais d'ailleurs permis de bien m'éclater
professionnellement.

Bref, tout ça pour dire que j'avais un vrai et grand respect pour
toi.

Ce soir, comment ne pas non plus revoir dans ma tête ce formidable duo
"Chaff & Tys" que tu formais avec Francis Tyskiewicz, parti lui-aussi trop
tôt l'an dernier ?

S'il existe un paradis de la radio, vous devez déjà vous y être retrouvés.

Mais malgré cette pensée, difficile de ne pas ressentir de tristesse.
Salut.

Bertrand Dicale, chroniqueur à France Info

Philippe
Chaffanjon savait dire oui. Une qualité rarissime, même chez les journalistes.

Quand
il disait oui, cela voulait vraiment dire oui. Il y mettait tellement de
confiance, d'enthousiasme et de volonté que tout semblait s'aplanir.

Dès
lors, les choses arrivaient, sans grand geste ni grand bruit.  

Un
jour, il m'a dit oui et la petite idée que je lui avais proposée est devenue une
chronique sur France Info. Je connais bien des endroits où m'avoir dit oui
n'aurait pas suffi.

Chaff
semblait écouter distraitement, il ne faisait pas beaucoup de phrases, il était
économe de ses signes d'autorité. Mais il transformait en radio toute l'envie,
toute la curiosité et tout le plaisir d'information de ceux qui travaillaient
avec lui.

Il
avait fait force de sa générosité. Il savait mieux que quiconque combien la
radio est un partage. C'est pour cela qu'il savait bien dire oui. Et qu'on avait
envie d'être digne de ce oui-là. 

Virginie Garin, animatrice à RTL

En face de RTL, ce soir, les anciens, des plus jeunes, tes potes de la rue Bayard, tes amis partis dans d'autres redactions, un motard a moustaches, nous avons tous eu besoin de nous retrouver ensemble pour penser à toi. Tu fédérais.

Tu donnais l'exemple d'une Info généreuse et professionnelle. Tu nous a tous transmis ton enthousiasme. Tu nous as fait grandir. Ce soir, nous étions nombreux à ne pas réaliser encore cet injuste, impensable, impossible départ. Nous avons pensé fort à Isabelle et à tes enfants. Chaffi, tu vas nous manquer cruellement.

Jean-Baptiste Huet, reporter à BFM Business

Quand je pense qu'il y'a deux jours, on discutait des très beaux résultats de France Bleu dans le salon d'accueil de ma rédac' où tu étais invité. On a parlé aussi de ton départ douloureux de France Info après le décès il y'a un an de ton complice Francis Tyskiewicz. On a évoqué aussi la difficulté de ces postes de directeur de rédaction, de patron de station, où il faut de front gérer, les équipes, la stratégie, le contenu, les moyens, le tout dans un flux d'info continu.. Ca tu savais faire...

Mon bureau à France info était installé à côté du tien et de celui de Francis. J'ai pu observer vos moments de complicité, vos discussions autour du ballon rond,... Mais aussi ta manière de concevoir l'information, de la sentir, l'essence du terrain. Tu m'as ouvert des horizons. Je sais que tu nourrissais un grand intérêt pour la science et en particulier tout ce qui touche à la mécanique quantique.

J'ai repensé à ce discours que tu avais fait il y a un an lors des obsèques de Francis, tu en avais glissé quelques notions ici et là entre les lignes, c'était très poétique et surtout, réconfortant... C'est justement quelqu'un comme toi qui nous manque ce soir.

Thierry Dugeon, journaliste

Souvenir de stage de fin d'ESJ Lille à RTL en 1988. Toute une rédac' de journalistes confirmés. Aucun vraiment sympa avec les journalistes puceaux et fébriles. Sauf UN.

Paul Larrouturou, journaliste au Lab Europe 1

Une grosse pensée confraternelle pour sa famile, ses amis et ses collègues ce soir. Il m'avait fait l'honneur de recevoir le petit stagiaire que j'étais, un beau soir de 2009, pour me parler de la vision généreuse, exigeante, palpitante et tellement humaine de ce beau métier qu'il incarnait si bien. Tristesse. Et respect surtout.

Patrick Lallemant, ancien rédacteur en chef de France Info

Philippe, Contrairement à tout le monde, je ne t'appelais jamais Chaff, parce que nous ne nous sommes pas rencontrés au boulot. Un baptême, un enterrement, un frère commun... Nous ne nous sommes croisés que peu de temps, mais ce fut incroyablement fort, profondément humain. Et c'est, à nouveau, incroyablement douloureux aujourd'hui. J'espère que vous avez déjà recommencé à bien vous marrer tous les deux. En attendant, nous, on en a marre de pleurer. J'embrasse tes deux familles de toute mon affection.

Jean-Pierre Gauffre, chroniqueur à France Info

Chaff. On n'a jamais pu l'appeler
autrement. C'est comme ça que je l'appelais il y a trente ans, quand on
crapahutait sur le terrain, Nagra à l'épaule, lui pour France Inter et moi pour
Europe 1. C'était déjà le plus partageur des confrères, celui qui ne gardait pas
les infos pour lui, celui qui ne voyait pas le reporter de l'autre station comme
un concurrent, mais comme un frère de micro.

Chaff. C'est comme ça que je l'ai
appelé quand il a ressurgi dans mon existence. C'était au printemps 2008. Il
venait d'arriver à France Info. En visite à Bordeaux, il a écouté la chronique
que je faisais sur France Bleu Gironde. On a discuté, comme si l'on s'était
quittés la veille. Et de là est née cette idée un peu dingue d'intégrer sur
l'antenne sérieuse et tirée au cordeau d'Info une chronique foutraque et si peu
sérieuse.

Chaff. Je n'oublie pas, je ne
peux pas oublier que sans toi, il n'y aurait jamais eu de mauvaise foi, ni de
mauvais pied. Merci pour ton écoute, ta gentillesse et ton amour des autres. Il
paraît que c'est ton cœur qui a lâché. Comment est-ce possible ? Alors qu'il
débordait d'humanité.

Salut, Chaff...

Gérard Davet, grand reporter au Monde

Cher Philippe, ce fut un plaisir que de te connaître. J'ai, lors de mes débuts, effectué de nombreux reportages à tes côtés, ce fut un plaisir. Moi, la presse écrite, toi, la radio, parfaitement complémentaires, se tirant la bourre tout en se respectant. Humain, très humain, déjà. On s'était perdus de vue. Et tu m'as rappelé, un jour de 2010, je vivais des moments compliqués, liés à l'affaire dite des "fadettes", tu m'as invité à déjeuner, juste comme cela. Tellement sympa. Professionnel de A à Z.

Curieux. tu étais fier des premiers scoops de ta fille. On a déjeuné à nouveau, récemment, tu découvrais France Bleu. Tu t'impliquais à fond déjà... Tu manqueras au journalisme. Tu nous manqueras...

Charlotte Coblentz, attachée de production à France Info

Parfois la vie nous offre
cette chance: rencontrer quelqu'un de bien, de vraiment bien. Parfois mais
c'est rare, on rencontre quelqu'un qui aime passionnément sa famille, son
métier, le monde. Quelqu'un qui vit pour transmettre, apprendre, partager. Quelqu'un
qui jamais ne se sent au-dessus et qui jamais ne vous fait sentir en dessous.

Quelqu'un qui a des convictions, des arguments, et des idées plein la tête.
Enfin, juste quelqu'un qu'on est heureux d'avoir connu. Parfois la vie nous
offre cette chance. Tu vas vraiment me manquer...

PS :
embrasse Francis on pense toujours à lui et on pensera toujours à toi.

David Abiker, ancien collaborateur de France Info, chroniqueur à Canal+ et Europe 1

(Souvenir publié sur son blog)

Quand il
parlait, on écoutait. On écoutait d'autant plus volontiers qu'il avait une voix
douce et rare. On a beaucoup de collègues de bureau et on les aime, mais les
patrons nous marquent différemment. Ils nous marquent par leur présence, leur
absence, leur indifférence, leur médiocrité ou leur implication, leur
savoir-faire, leur volonté, leur précision. Jules Romain a dit : "Un patron
c'est quelqu'un qui se mêle passionnément de votre travail
". Il était un peu
comme ça. Il écoutait l'antenne, tout le temps, tout, revenait tôt le matin sur
un mot, un détail.

"J'ai rien compris ce matin ".

Quand c'était bien, il disait rien.

Sa pudeur.

J'évoque rarement les disparitions sur ce blog, je trouve ça déplacé quand le souvenir ne peut pas être partagé. Mais là je dois parce que c'est tellement intime, que ça devrait trouver son chemin pour aller vers vous. Je dois parce que j'ai un souvenir de lui, un souvenir tout court que je n'oublierai pas. C'est une promenade matinale dans Berlin le 20 novembre 2009,
20 ans exactement après l'effondrement du mur. Radio France a fusionné ses
antennes pour l'événement. Ce matin-là, nous avons deux heures à tuer. Il a
couvert la chute du mur en 1989 et il veut revenir sur les lieux des reportages
qu'il y a consacrés. Je le suis dans la ville que je ne connais pas. J'aime
marcher.

Ce sera une marche presque silencieuse. Il ne parlait pas
beaucoup... Une marche silencieuse et studieuse comme on en fait quand chaque
centimètre de terrain parcouru compte, quand chaque pas de la promenade
ressuscite une image ou un son, un morceau d'histoire aussi.

Donc on a marché dans Berlin. Lui semblait retourner sur ses
pas de grand reporter et moi le nez au vent je faisais le touriste, je le
suivais et je l'écoutais. De temps à autre il sortait du silence, et il disait
"c'est marrant... ", et il comparait le présent et le passé, ce qu'il
avait vu des événements et ce qui en restait... On a marché ensemble, mais
séparément, aussi. Il prenait la tangente en pensée, dans ses souvenirs et moi je
dévorais des yeux la ville et puis un détail matériel accrochait sa curiosité,
ranimait ses réflexes et il revenait soudain au réel.

Il a voulu louer des vélos rouges. Il fallait louer des vélos
rouges, les Vélib' locaux. On y a passé 20 minutes et il a fini par laisser
tomber. Voilà. Je l'ai mal connu mais je crois qu'il y a beaucoup de lui dans
cet aller et retour entre le secret de ses pensées et l'envie de louer un vélo
rouge, là maintenant, tout de suite, comme ça dans Berlin, même si c'est
compliqué à 8 heures du mat' et sans mode d'emploi de louer un vélo rouge...

Il faisait froid, sec et beau. Ce furent deux heures en dehors
du temps, quand les choses et les gens tournent au ralenti. J'ai oublié notre
itinéraire, je me souviens des feux, qui s'allumaient, changeaient de couleur
dans des morceaux de rue sans auto. Des feux sans voiture, le calme. Je me
souviens qu'au bout de deux heures nous avons franchi un pont puis entendu le
tempo d'une musique techno dans un entrepôt planté sur un terrain où poussaient
des herbes folles et où station un combi babacool qui vendait des saucisses et
des pommes sautées. Evidemment, il a voulu voir la discothèque. Il voulait tout
voir, il y avait toujours quelque chose à voir, quelque chose qui n'allait pas
de soi et qui pouvait dévoiler tout un monde.

Alors on a poussé la porte de la boîte. "Juste pour voir ",
a-t-il dit en anglais ou en allemand, je ne sais plus, pour convaincre le videur
au look de punk à chien qui nous a laissé entrer sans rien compliquer. On a
pénétré dans l'obscurité moite et chaude d'un after allemand, nous les
promeneurs du matin. Au milieu de la piste deux zombies étaient secoués de
convulsions rythmées par un jour sans fin. Il a souri, vérifié que c'était
l'ordre des choses et on est repartis.

En sortant, la lumière d'or qui baignait la ville nous a
marqué plus encore sous le ciel bleu dur de ce jour de novembre épargné par le
gris.

Une promenade c'est comme une histoire. Elle a un début, un
milieu, une fin. On ne le sait que lorsqu'elle se termine mais on le sait parce
qu'une promenade a sa cohérence, sa vie intérieure, son propre rythme. On se
souvient exactement du sentiment d'excitation et d'urgence que l'on éprouve au
début, l'assurance et le bonheur pleins et tranquilles du milieu et
l'inquiétude vague qui monte quand elle se termine.

C'est une des plus belles promenades de ma vie, sans doute
parce qu'elle correspond à un moment important de mon expérience
professionnelle, sans doute parce que je voyais Berlin pour la première fois,
également parce que l'histoire guidait nos pas, qu'elle était à portée de
mémoire. J'aurais dû lui dire que ça m'avait rendu heureux - et fier, aussi -
de le suivre comme ça dans Berlin comme un bleu, car mine de rien, je le
suivais et il avançait dans son souvenir de l'événement. J'ai dû lui dire que
"c'était super", à la fin, mais trop vite, au moment où l'on se
séparait, lui pour aller par là, moi pour aller par ici.

Quelques mois plus tard j'ai quitté France Info, un peu comme
un voleur, c'est la vie du travail, (pas la vie des voleurs). Je repense
souvent à cette promenade. C'est un souvenir, un vrai de vrai. Si vous
réfléchissez bien, on a peu de souvenirs, je veux dire de ces tableaux complets
et apaisés que le temps et la conscience laissent intacts dans notre mémoire et
qui sont comme des repères pour les hommes que nous finissons par devenir un
jour, quand même.

Avec, comme cette promenade dans Berlin, un début, un milieu
et une fin.

Chloé Leprince, journaliste à la Direction des Nouveaux Médias de Radio France

Une bonne fée lui avait dit : "Tu devrais la voir ", on avait rendez-vous, je n'en menais pas large,  je n'avais jamais fait de radio. Une minute plus tard, Francis était là ; trois minutes plus tard encore, ils disaient tous les deux : "Banco, tu démarres dans quinze jours ." Interloquée, j'ai bredouillé que je devrais faire un essai, la voix, tout ça, leur avis, leurs attentes ... Philippe m'a regardée de son drôle d'air de quand il était déjà passé à autre chose.
Alors on a parlé d'autre chose, je suis repartie avec de la musique haïtienne sous le bras, et mon horizon de boulot a changé pour de bon. La confiance, totale, durable ; la latitude, aussi : "Bouche-toi les oreilles et fais ce que tu sais ", et puis c'est tout. Après cette première saison de bonheur professionnel, la délicatesse de sa fidélité ensuite. Merci Philippe, je sais ce que je te dois.

Laëtitia Heuveline, journaliste à France Info

Je n'ai pas beaucoup connu Philippe, je n'ai pas eu le plaisir de partager de nombreuses journées de travail à ses côtés... Pourtant je le connaissais, comme on connait tous une aussi grande figure de notre maison. C'est un personnage qui s'en va et je m'associe à la douleur de sa familles, ses amis, ses proches, tous ceux pour qui la radio ne sera plus la même sans lui.

Isabelle Raymond, journaliste

au service économique de France Info

Ils m'ont tous les
deux recrutée il y a moins de deux ans, ils sont tous les deux partis.

Deux piliers de
France Info, deux hommes avec lesquels j'aurais tellement aimé travailler plus
longtemps. Deux frères siamois sur bien des choses à commencer par ce sens inné
de l'actu, cet œil qui brille et cette audace qui font que, pendant des moments
fugaces, on a l'impression de toucher à quelque chose de plus grand,
l'impression de faire de la grande radio. Deux hommes pour lesquels on a envie
de se dépasser, se surpasser. On attend leur jugement tel un gamin angoissé.
Car ce qu'ils pensent de notre travail compte plus que tout.

Jamais je n'ai eu
autant de respect et d'admiration pour des chefs. Je voulais travailler pour
toi Chaff, mes copains d'Info parlaient de toi des lumières dans les yeux, ils
se vantaient presque d'être dirigés par toi.

Je t'ai vu te démener en paritaires pour obtenir une augmentation
pour tel ou tel journaliste et tu disais : ben oui, je sais, il y a
un budget, mais il ou elle a tellement bien travaillé l'année dernière... Quand
tu m'as appelée pour me dire que j'étais retenue, tu m'as dit : "Je pense qu'on a fait le bon
choix
". J'ai répondu : "Je pense aussi ",
et tu as ri.

J'espère ne pas
t'avoir déçue. Moi en tout cas, tu m'as nourrie et appris avec cette infinie
bienveillance au-delà de mes espérances.

Cécile Quéguiner, journaliste au servie Multimédia de France Info

Philippe Chaffanjon, un boss sur ressorts, un courant d'air
(chaud), larguant dans le long couloir de la rédaction, paquets d'idées et vives
colères vite oubliées. Un sourire lumineux et une énergie redoutablement
contagieuse. Une manière d'être toujours là et déjà reparti. Et désormais ce
vide, des voix étranglées sur l'antenne d'Info hier soir et ce matin.

Et moi, un
air dans la tête, chanson ramenée d'Haïti que tu avais bien voulu traduire
depuis tes vacances. TA chanson désormais.

Orevwa Chaff !  

Sophie Parmentier, reporter à France Info

Philippe,

Je me souviens de ton premier jour à France Info. D'abord, j'ai remarqué ton
sourire franc. Et cette grande bonté qui se dégageait de toi. J'ai vite compris
que tu n'étais pas seulement bon, tu as été le meilleur des directeurs. Avec
Francis, vous avez formé un duo magique, unique, de surdoués de l'info, avec la
même passion des vraies gens, du bout du monde ou du coin de la rue. Toi et lui,
ensemble, vous avez fait tant de merveilles pour France Info. Vous m'avez tant
donné. Tant appris.

Tu m'as offert mes plus beaux reportages, Philippe. Partout, tu étais déjà
passé. A Berlin, tu avais couvert la chute du mur. A Goma, tu avais témoigné du
génocide rwandais. En Haïti, tu connaissais le pays depuis déjà longtemps quand
la terre a tremblé, en janvier 2010. Tu as envoyé là-bas presque tous tes
reporters, et tu nous as transmis le virus de cette Haïti chérie. Tu nous as
même accompagnés, pour l'une des éditions spéciales, dans l'île encore en
ruines. Tu n'étais pas vraiment venu pour nous donner des ordres sur place, non,
tu vibrais surtout avec nous sur le terrain. Eternel grand reporter.

Je me souviendrai toujours du tout dernier quart d'heure de cette édition
spéciale d'avril 2010 à Port-au-Prince, sous un soleil de plomb, au bout d'une
nuit quasi blanche et d'une journée harassante. Tous les reportages étaient
bouclés, et tu as appris à la dernière minute que le président haïtien d'alors,
René Préval, allait donner une conférence de presse. Tu m'as demandé de foncer,
pour tenter de rapporter une interview qui pourrait encore enrichir l'antenne de
France Info. Avec le technicien, on est partis et revenus ventres à terre,
épuisés et dépités : l'interview qu'on avait eu le temps d'enregistrer était en
créole, notre traducteur n'était plus là et on n'était plus qu'à cinq minutes de
l'antenne ! Tu as dit : "pas de problème". Tu parlais toi-même créole. Tu as su
où couper le son à toute allure, puis tu l'as aussitôt traduit en direct, sous
nos yeux ébahis et admiratifs. C'est rare, franchement, un directeur de radio si
talentueux et si modeste à la fois, si humain et si juste que toi.

Merci pour tout, Chaff. Tu resteras pour moi un guide. J'espère que là-haut,
tu as retrouvé Tys. Peut-être qu'au paradis, y a un comptoir des reporters où on
peut boire du rhum Barbancourt en écoutant Bélo.

 

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