DSK : l'homme qui aura "changé" le FMI
Il n'avait plus vraiment le choix. Coincé derrière ses barreaux de Rikers Island et soupçonné de charges extrêmement lourdes, Dominique Strauss-Kahn n'était plus en mesure de diriger le puissant Fonds monétaire mondial. D'ailleurs, son conseil d'administration lui-même le lui avait fait savoir : des émissaires devaient le joindre dans sa prison. L'annonce, par communiqué, de sa démission n'a donc surpris personne mais met un terme net à un "travail précieux" (dixit Berlin) aux commandes du FMI.
DSK n'a en effet pas ménagé sa peine, dès sa prise de fonctions en novembre 2007, pour tenter de redresser une institution qui se cherchait encore.
D'aucun la jugeait inutile. La voilà rajeunie, puissante -elle n'a jamais été aussi riche-, parfois crainte, bref "changée", comme il aimait à le clamer lui-même. L'économiste américain Colin Bradford interrogé par l'AFP acquiesce : "le FMI est clairement devenu l'institution internationale la plus importante aujourd'hui".
De gauche comme de droite, on a souvent loué les compétences d'économiste créatif et audacieux de DSK, assorties d'une grande habileté politique. Mais l'homme a su aussi tirer partie des circonstances, en l'occurrence la crise financière de 2008. "Elle a donné au Fonds une occasion de commencer à réaffirmer sa place dans le monde, et M. Strauss-Kahn a saisi cette occasion", écrivait mardi le directeur général du fonds obligataire Pimco, Mohamed El-Erian, un ancien économiste du FMI.
_ Le ministre suédois des Affaires étrangères Carl Bildt enfonce le clou sur son compte Twitter : "il doit être dit que DSK a servi le monde avec grande distinction au cours d'une période des plus difficiles".
Bilan
Dès janvier 20087, alors que les gouvernements s'échinaient à minimiser l'impact de ce crise, DSK les appelait à mettre en œuvre des plans de relance. C'est aussi lui qui aura écorné l'étiquette d'institution capitaliste occidentale impitoyable, en déclarant notamment la mort du "consensus de Washington" (ultra-libéral). Il parlait "protection des plus vulnérables" et solidarité entre les gouvernements. On lui doit ainsi l'annulation des intérêts des pays les plus défavorisés, décidée en 2009 pour une période de deux ans et demi. Ou la réforme des droits de vote au sein de l'institution pour donner plus de voix aux économies émergentes.
Pour autant, le FMI reste très impopulaire là où il a dû intervenir et imposer des programmes de rigueur, comme en Grèce, Irlande ou Roumanie. Et son image "plus sociale" allègrement revendiquée par DSK laisse sceptique.
Son départ précipité laisse en outre plusieurs chantiers d'envergure inachevés. Telle la réforme du système monétaire international qu'il voulait accompagner. Son rêve d'une autorité budgétaire européenne aussi risque de rester désormais dans les cartons. Enfin, son absence risque de peser lourd dans la gestion de la crise grecque en cours.
Cécile Quéguiner, avec agences
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