Les régulateurs boursiers ont annoncé mardi la création d'une commission commune chargée de l'évolution de la régulation
Les régulateurs américains boursier (SEC) et des marchés des produits dérivés (CFTC) vont se pencher sur le bref plongeon de la Bourse de New York jeudi.
Wall Street a vu jeudi son indice phare perdre près de 1.000 points en séance (environ 9%), un recul d'une ampleur historique aussi spectaculaire que mystérieux.
La création de cette "Commission des nouvelles questions de régulation" avait été recommandée dans un rapport publié l'an dernier sur l'harmonisation des travaux de ces deux autorités, rappellent la Securities and Exchange Commission (SEC) et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) dans un communiqué commun.
"Le premier point dans son agenda est d'étudier les événements de jeudi dernier sur le marché et de faire des recommandations concernant les aspects de la structure du marché qui auraient pu contribuer à la volatilité", ont-elles précisé.
A cet effet, le personnel des deux régulateurs devra fournir ses premières conclusions lundi prochain à la commission.
Elle devra notamment se pencher sur les différences de règles entre les différents marchés: la cotation de certaines actions avait été interrompue brièvement sur le principal opérateur de la Bourse de New York, le New York Stock Exchange, mais pas sur d'autres plateformes électroniques, provoquant des mouvements spectaculaires des prix.
Inversion entre "millions" et "milliards"
Selon les premiers éléments avancés par les médias américains, la déringolade a été causée par l'inattention d'un trader de la banque Citigroup qui aurait confondu "millions" et "milliards".
Si les histoires de doigts ou de coudes appuyés sur un ordinateur qui déstabilisent les Bourses fleurissent dans les salles de marchés, la thèse du trader de Citigroup laisse les observateurs sceptiques.
Pour Pierre-Antoine Dusoulier, président de Saxo Banque France, il est difficile de penser qu'un ordre de Bourse de 16 milliards de dollars passe par une seule personne, sans contrôle au sein de Citigroup, par la maison de courtage qui sert d'intermédiaire ou sur la place de marché.
Pas d'interruption des transactions
La chute de Wall Street a en outre fait tomber certaines valeurs à 1 cent, soit une baisse de 99,99%, sans qu'aucun garde fous se mette en place.
Or, généralement, quand une action connaît une évolution spectaculaire, à la hausse comme à la baisse, les transactions sont interrompues: sur le CAC 40, une évolution de plus de 10% entraîne immédiatement ce type de réponse.
Mais sur le marché américain de Nyse Euronext notamment, ce système est moins contraignant, explique Gunther Capelle Blanchard, directeur adjoint du CEPII, le seuil de limitation n'est par exemple pas appliqué l'après-midi car les acteurs de marché sont plus nombreux que sur les autres places financières.
Le trou d'air de Wall Street met donc en lumière certaines défaillances structurelles des marchés financiers, souligne le professeur de finances, et n'est pas sans rappeler le krach d'octobre 1987 qui avait vu les Bourses s'emballer et Wall Street perdre 22% en une seule séance.
Mise en cause probable de l'informatique et du trading à haute fréquence
"Les raisons de ce krach (en 1987) sont encore mal connues mais l'emballement des marchés était lié à l'introduction des programmes informatiques de 'trading' qui ont alimenté cette baisse vertigineuse", souligne M. Capelle-Blancard.
Même si des zones d'ombre subsistent, la situation a probablement été aggravée, dans le cas de jeudi soir, par la montée en puissance des programmes algorithmiques et du trading à haute fréquence.
Cette technique est utilisée notamment sur la Bourse électronique du Nasdaq. En cas d'emballement, le trading à haute fréquence rend quasi-impossible une intervention humaine.
"Il en va de l'intégrité des marchés de mettre en place des coupe circuits", soit des sortes de pare-feux, estime M. Capelle-Blancard.
La situation constatée jeudi n'est pas qu'une affaire informatique et/ou humaine, elle est née dans un contexte d'inquiétudes sur le devenir de la zone euro, dans un "marché psychologique où les déclarations allemandes ont plus de poids que les résultats de sociétés", souligne Christian Parisot, chez Aurel.
Pour certains analystes, cette situation est assez comparable à celle connue quand la Société Générale a tenté de débloquer les positions prises par son trader Jérôme Kerviel.
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