Les agences de notation dans le collimateur des Etats
Un seul communiqué d'une seule agence de notation financière, et l'économie mondiale danse au bord du gouffre. Une fois encore, les agences de notation financières sont mises en cause par de nombreux acteurs de l'économie pour leur influence supposée trop grande sur les politiques publiques.
Leur puissance est telle, en particulier les trois “grandes”, Moody's, Standard & Poor's (S&P) et Fitch, que les Etats modifient leurs politiques budgétaires pour éviter de voir leur note dégradée. La mésaventure des Etats-Unis montre bien quelles peuvent en être les conséquences. Et encore S&P accorde-t-elle encore une très bonne note à la dette américaine : AA+.
La décision de S&P essuie un feu roulant de critiques. A commencer par les autres agences de notation. Moody's juge “prématurée” la décision de sa consœur. Mais elle précise tout de même qu'elle pourrait abaisser la note américaine avant 2013.
Les Etats sont encore plus sévères, au premier rang desquels... les Etats-Unis. Il ont pourtant jusqu'ici plutôt compté parmi les défenseurs de ces agences. Mis évidement de très mauvaise humeur, le secrétaire américain au Trésor envoie une volée de bois vert sur S&P : “ils ont fait preuve d'un manque effarant de connaissances sur les mathématiques fondamentales du budget des Etats-Unis. Et je pense qu'ils ont tiré exactement la mauvaise conclusion”, enrage Timothy Geithner.
L'administration Obama emboîte le pas, à quelques nuances près. Et derrière elle, les opposants aux système des agences. Ils ne se font pas faute de rappeler que les faits leur ont déjà donné tort, lorsqu'elles attribuaient des AAA à des produits financiers qui se sont révélés toxiques lors de la crise des subprimes. A l'époque, Nicolas Sarkozy lui-même avait demandé qu'elles soient sanctionnées. Et de nombreux politiques réclament la création d'agences publiques, dont l'indépendance devrait alors, soit-dit en passant, être solidement garantie.
En face, les opposants font valoir, que ce haro sur les agences de notation revient à casser le thermomètre pour éviter de voir la fièvre. Le problème, plaident-ils, est d'abord l'endettement des Etats, et les agences ne font que réagir en conséquence.
Il est vrai que les critiques oublient parfois que les Etats agréent tout à fait officiellement les agences de notation, en publiant des listes. Ce faisant, ce sont eux qui leurs confèrent une légitimité. Les relations sont donc plus ambigües qu'il n'y paraît.
Grégoire Lecalot, avec agences
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