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Le départ d'Anne Lauvergeon fait débat... et polémique

Les réactions se multiplient depuis l'annonce hier du remplacement de la patronne d'Areva. Anne Lauvergeon ne fera pas un troisième mandat à la tête du géant du nucléaire. C'est le numéro deux du groupe, un inconnu du grand public, Luc Oursel qui va occuper le poste.
Article rédigé par franceinfo
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Matignon l'a annoncé hier soir, mais pour beaucoup c'est en fait l'Elysée qui depuis des mois souhaitait démettre Anne Lauvergeon de ses fonctions.

"Mme Lauvergeon a fait deux mandats, dix ans à la tête d'une entreprise. C'était la fin de son mandat, le gouvernement a pris la décision de nommer à la tête de l'entreprise le numéro deux de l'entreprise, il y a donc de la continuité ", a déclaré Nicolas Sarkozy, depuis Berlin où il rencontre aujourd'hui la chancelière allemande Angela Merkel.

Nicolas Sarkozy a par ailleurs annoncé qu'il s'entretiendrait avec Anne Lauvergeon lundi.

Cette décision politique fait débat depuis hier. Mais pour le secrétaire national de l'UMP chargé des énergies, Alain Gest, elle était nécessaire.
Pour lui, les relations tendues entre Areva et EDF "étaient préjudiciables aux intérêts français".

Anne Lauvergeon soutenue par des politiques de tout bord

Hier une dizaine de députés de tout bord (UMP, PS, PCF, NC) ont signé une tribune de soutien à Anne Lauvergeon (à lire ici).
"Areva applique un seul concept à toutes ses démarches: surêté, sécurité et transparence", écrivent-ils. "Anne Lauvergeon a toujours refusé de transiger sur ces sujets. C'est sa marque de fabrique", ajoutent-ils.

Parmi les signataires une majorité sont des députés socialistes.

Parmi eux, Christian Bataille, député socialiste du Nord, spécialiste des questions nucléaires. Pour lui, il s'agit d'une décision éminemment politique. Le but : raviver le projet cher à Nicolas Sarkozy d'une plus grande unité de la filière nucléaire française, au coeur de la vieille querelle entre la patronne sortante d'Areva et son rival d'EDF Henri Proglio.

"C'est le fait du Prince, une nouvelle fois c'est le président de la république qui décide parce qu'une tête ne lui convient pas qu'il faut la changer", réagit également le député socialiste Jean-Yves le Déaut. "Anne Lauvergeon a refusé à Nicolas Sarkozy d'être ministre et a voulu garder son indépendance, ça n'a pas plu à Nicolas Sarkozy, car il fonctionne en monarque absolu", ajoute ce spécialiste des questions scientifiques et technologiques au PS.

"Dans notre pays comme dans le monde entier, sa compétence est connue et reconnue, par-delà les clivages politiques. Partout sauf... à l'Elysée", a déclaré Benoît Hamon, porte-parole du PS. Pour Arnaud Montebourg, député PS et candidat à la primaire, il s'agit également d'une "grave faute stratégique contre nos intérêts industriels nationaux".

Face à cette éviction, les députés sont inquiets pour le devenir de la filière nucléaire en France.
Le député-maire socialiste de Cherbourg Bernard Cazeneuve a signé cette tribune. Il craint que le départ d'Anne Lauvergeon ne préfigure l'émergence d'une filière nucléaire low cost.

Du côté de l'UMP également, certains regrettent cette décision. Jean-Paul Anciaux, député UMP de Saône-et-Loire, est à l'initiative de la tribune publiée hier.

Hormis les politiques, Anne Lauvergeon est aussi soutenue du côté des salariés d'Areva, et des syndicats.
Jean-Pierre Bachmann est coordinateur CFDT à La Hague. Même si il reconnait des points de désaccord avec la future ex-patronne d'Areva, le départ d'Anne Lauvergeon reste selon lui un mauvais choix.

Enfin, pour l'association Sortir du nucléaire, "Anne Lauvergeon part, les problèmes de la filière nucléaire restent. Son départ illustre la crise morale dans laquelle la filière nucléaire s'enferre. Les casseroles s'accumulent et l'éviction d'Anne Lauvergeon consacre ce délitement".

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