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La guerre de la 4G fera-t-elle un mort parmi les opérateurs ?

DECRYPTAGE | Les opérateurs de téléphonie mobile sont en guerre ouverte, depuis le début du mois de décembre. Au cœur des tensions, la 4G. Free a décidé de l'intégrer à ses forfaits sans surcoût. Selon les concurrents, il y a tromperie sur la marchandise, et la 4G de Xavier Niel ne tiendrait pas la comparaison. Ce qui ne les empêche pas de s'aligner sur les prix, comme vient de le faire SFR ce jeudi. Inquiet, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, craint même que cette "guerre des prix ravageuse" ne fasse "un mort" parmi les opérateurs. France Info fait le point.
Article rédigé par Louis Colart
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (Reuters)

"La guerre des prix " pourrait se solder par "la mort " d'un opérateur, a prévenu ce jeudi Arnaud Montebourg, le
ministre du Redressement productif, sur RTL , autour de la bataille que se livrent les opérateurs sur la 4G. Une prévision qui pourrait sembler
étonnante, puisqu'en 2012, quand Free a débarqué sur le marché en cassant les
prix, l'ex-député de Saône-et-Loire avait rendu hommage à ce coup de pouce aux
consommateurs.

Depuis, le ton a changé : "Il est possible que
dans cette guerre des prix nous ayons un mort et que, finalement, on se
retrouve à trois opérateurs
". Et d'ajouter :
"Nous sommes inquiets des dérives du low cost et de guerre des prix qui se
fait au détriment des producteurs
".

Il faut dire que les opérateurs du marché se livrent
ces derniers jours à une surenchère à la baisse. C'est à qui fera le plus baisser
les prix. Comme SFR , qui a annoncé ce jeudi l'intégration de la 4G dans son forfait à bas coût. France Info fait le point.

Le "coup de com' " de Free

Le 3 décembre dernier, le patron de Free , le truculent Xavier Niel,
annonce qu'il proposera à ses clients des forfaits 4G, le très haut débit
mobile, au prix de la 3G. Nouvel épisode dans la guerre des prix que Free mène
depuis son lancement, ou coup de communication ?

"Les fréquences 4G ont coûté 3,6 milliards d'euros. Ramenés sur vingt ans, c'est environ 30 centimes par mois et par abonné. C'est bien loin des 10 euros facturés par les trois opérateurs. Il est naïf de penser que tout le monde va augmenter les prix de 10 euros sur le dos des consommateurs ", lançait, sur un ton de défi, Xavier Niel, à l'occasion d'une interview au JDD.

Stéphane
Richard, lui, crie à la mascarade. Le PDG d'Orange n'hésite pas à dire, dès le lendemain de l'annonce, que "Xavier
Niel est le roi de l'embrouille
", dans une interview au Figaro . Dans une
autre interview, sur RTL , il estime que "le marché finira bien par
arrêter de se faire prendre par ces coups de com' de Free
". Il l'a répété ce mercredi, en expliquant pourquoi, selon lui, Free n'aura "jamais de
couverture nationale en 4G
".

 

Orange et Bouygues s'alignent sur les prix

Le patron d'Orange a beau pousser des cris d'orfraie, il s'aligne sur la tendance à la baisse. De fait, deux des concurrents de Free ont revu leurs plans, en
baissant leurs formules 4G.

Bouygues , le 5 décembre, a promis l'étendue sans surcoût de
sa 4G à tous ses forfaits classiques. Lundi, l'opérateur a même décidé de
l'appliquer à ses forfaits low cost , à 19,99 euros et 24,99 euros.Orange va proposer dès janvier une offre 4G pour ses
forfaits "Sosh", à 24,99 euros par mois. En baisse de 5 euros par rapport au tarif
initialement prévu.SFR a été le dernier à baisser ses prix, mais s'y est finalement plié ce jeudi. Il intègre la 4G dans un nouveau forfait de sa gamme de téléphonie mobile à bas coûts RED, qui sera doté d'un accès illimité au site internet YouTube, pour la somme de 25,99 euros.

Free a-t-il les moyens de ses ambitions ?

C'est le contre-feu déployé sans traîner par Stéphane
Richard, le PDG d'Orange  : Free n'offrirait pas de la 4G "réelle".

Free est effectivement l'opérateur qui possède le moins d'antennes.
700, contre 5.392 (toutes utilités confondues) pour
Bouygues Télécom, 3.879 pour Orange et 1.013 pour SFR. Mais Xavier Niel conteste ces chiffres. "La
4G, c'est du haut débit sur le mobile
, précisait-il au JDD . Pour avoir cette
vitesse de téléchargement au-dessus de 80 mégabits, Free a 700 antennes, contre
530 pour Bouygues Telecom. Pour SFR, c'est 724. Seul Orange en a encore plus.
Les autres antennes ne font pas de haut débit, elles ne servent qu'à afficher '4G' sur votre téléphone.
"

Dans cette histoire de relais, difficile de démêler le vrai
du faux. Mais deux études ont récemment apporté un éclairage sur la fiabilité
des réseaux des quatre opérateurs. D'abord l'UFC-Que Choisir , qui a publié
mercredi une carte interactive, avec la qualité du réseau par zone. En 4G, le
nombre de relevés est encore faible, donc les données ne sont pas encore
très parlantes. Mais, à Paris par exemple, *Free arrive derrière Orange en
4G. L'autre [étude a été produite par
Degroup Test ](http://www.degroupnews.com/actualite/n9134-4g-free-barometre-degrouptest-operateur.html). Elle est sans appel pour
Free Mobile* . La société a analysé, grâce aux relevés de son application mobile,
des données sur la couverture 4G réelle des opérateurs. La boîte de Xavier Niel
est bonne dernière. Que ce soit en débit descendant (le téléchargement)...

Où en débit montant (l'envoi de données).

Quel avenir pour les opérateurs ?

Que ressortira-t-il de cette séquence de baisse des prix entre les quatre principaux acteurs du marché ?   Free ne pourra pas, en tout cas, profiter pour sa 4G d'un accord
d'itinérance avec l'un de ses concurrents. Orange , évidemment, a mis son veto,
vu l'ambiance de règlement de comptes entre les deux entreprises.
Stéphane Richard a même laissé entendre récemment qu'il n'était pas sûr de
renouveler le contrat portant sur la 3G après 2018. A voir... car un tel accord
est extrêmement rémunérateur pour Orange (on estime le chèque à un milliard d'euros
par an). Bouygues ou SFR non plus de devraient pas s'allier à Free .

Alors l'avenir des télécoms ira peut-être vers la consolidation
du marché. Donnant ainsi raison à Arnaud Montebourg, qui craint publiquement l'affaiblissement
généralisé du secteur. Le Monde rapporte en effet que le gouvernement n'y est
plus totalement opposé. Bouygues Télécom et SFR discutent en ce moment de
partager leurs réseaux, mais dans une certaine limite.

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