Inflation : le secteur de la mode, impacté par la hausse des coûts de production, prévoit une augmentation des prix
Délais d'approvisionnement plus importants, flambée des côuts de l'énergie et des matières premières... Comme dans l'alimentaire ou le bâtiment, la filière de la mode française vit une nouvelle crise qui se répercutera inévitablement sur le consommateur.
Louis Gabriel Nouchi prépare son prochain défilé homme dans les allées du salon made in France Première Vision, Carreau du Temple à Paris. Le jeune créateur retrouve ses fournisseurs, jeudi 31 mars, mais cette année demeure particulière. "Il y a une vraie évolution, explique-t-il. C’est même beaucoup plus compliqué que pendant la crise du Covid." Les vêtements n’échappent pas à la flambée des prix : +3,2% en 2021 selon l’Insee et peut-être 5 à 15% supplémentaires cette année si l’on en croit les professionnels.
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En cause, les tarifs des matières premières qui grimpent et changent tous les jours. "Un tissu acheté il y a un mois 19,5 euros du mètre est passé à 25 euros du mètre, reprend Louis Gabriel Nouchi.
"C’est la première fois où des fabricants disent qu'ils ne peuvent pas assurer les prix ! On sélectionne mais on ne sait pas combien ça va nous coûter dans trois mois."
Louis Gabriel Nouchi, créateurà franceinfo
Absolument tous les coûts sont en hausse, selon Alexandra Brousseaud, directrice générale de la maison Brousseaud qui fabrique des chaussettes depuis plus de 80 ans. "Si on prend l’exemple du coton, on a eu 21% d’augmentation sur l’année 2021, puis 28% supplémentaires au 1er janvier 2022, enumère cette responsable.
La flambée des cours du pétrole et des matières premières a un impact direct sur le marché du textile. "Pour le polyamide, on est en train de passer des caps encore supérieurs parce que ce sont des matières issues du pétrole, confirme Alexandra Brousseaud. Avec la crise en Ukraine, le coût du pétrole explose. On a également les colorants qui arrivent des pays de l’Est. Le client final est largement impacté lui-aussi, c’est mécanique."
Les professionnels redoutent en plus une rupture d’approvisionnement. "On fait des blousons, des parkas, des doudounes. On utilise beaucoup de zip et de métalleries, souligne pour sa part Sophie Pineau à la tête du fabricant de vêtements Getex. Actuellement, on a un très fort allongement des délais sur la livraison des zip. Auparavant, c'était de l'ordre de six semaines, aujourd’hui c’est plutôt 16 à 20 semaines. Cela veut dire qu’on risque d’avoir 15 à 20 filles, en fonction des tailles de chaines, à l’arrêt, sans travail. Il y a un risque de chômage partiel. On va devoir beaucoup anticiper."
Relocalisation de la fabrication
Ces crises ont au moins une vertu, selon Sylvie Chailloux présidente de l’Union française des industries mode et habillement (UFIMH) : "La pandémie nous a beaucoup impactés. On s’est rendu compte de notre manque de souveraineté industrielle. Donc c’est vrai que les sourceurs [spécialistes] ont pris peur et rapatrient nettement vers l'Europe et le bassin méditerranéen des fabrications qui étaient faites de façon beaucoup plus lointaines."
La présidente de l’Union française des industries mode et habillement estime que "chaque ménage consacrait de moins en moins de part de son budget à l’achat d’habillement. Là, on va se retrouver dans une mécanique inverse. Il faut aussi que le consommateur accepte de payer ce prix supplémentaire." Et la valse des étiquettes va commencer avec l’arrivée de la collection d’été.
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