Objectifs, gouvernance, fermetures d'usine... Cinq questions sur la fusion annoncée de Fiat Chrysler et PSA
Les constructeurs automobiles italo-américain et français sont en pleine négociation en vue d'une fusion.
Après l'échec de son mariage avec Renault, Fiat Chrysler Automobiles (FCA) jette son dévolu sur PSA. Les constructeurs italo-américain et français ont officialisé, jeudi 31 octobre, leur projet de fusion. Une opération à 50 milliards de dollars pour unir leurs forces à l'heure où l'industrie automobile connaît des difficultés.
Franceinfo répond aux questions que vous vous posez sur cette fusion.
1Quel est l'objectif de cette fusion ?
En se mariant, les deux constructeurs créeraient le numéro 4 mondial du secteur. A l'heure où le marché automobile est confronté à une conjoncture morose et à des défis technologiques majeurs liés à l'essor des véhicules électriques, "c'est un remarquable rebondissement pour PSA, qui avait frôlé la mort en 2012", observe auprès de l'AFP Michael Hewson, analyste du courtier CMC.
Une fusion permettrait à PSA de revenir par la grande porte sur le marché américain grâce aux Jeep et aux pick-up Dodge Ram de Fiat Chrysler. Le constructeur italo-américain de son côté consoliderait ses positions en Europe, où le groupe souffre de n'avoir pas suffisamment renouvelé sa gamme. Ensemble, FCA et PSA pèseraient 23,2% de parts de marché dans les pays européens, tout proche des 24,2% du leader Volkswagen. Fiat Chrysler, quasiment absent du marché chinois, pourrait également profiter de l'implantation de PSA dans le pays, même si le Français y est en perte de vitesse.
Ce mariage permettrait aux deux groupes de réunir leurs forces dans la recherche et d'amortir des technologies coûteuses. "Ce que peut gagner PSA, c'est d'avoir la masse critique, de vendre beaucoup plus de véhicules, pour amortir tous les investissements faits pour la motorisation électrique, le véhicule autonome et les services connectés", explique à France 2 Arnaud Aymé, expert transport chez Sia Partners. Comme le précise Le Figaro, FCA, très en retard sur la voiture électrique, va par exemple pouvoir profiter des technologies de PSA, qui commence à commercialiser des véhicules électriques.
2Que deviendrait ce nouveau groupe ?
Cette entité entrerait dans le collège des mastodontes du secteur derrière Volkswagen, l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi et Toyota. La valorisation boursière du groupe est évaluée à environ 50 milliards de dollars (45 milliards d'euros). PSA a vendu 3,9 millions de véhicules l'an dernier, pour un chiffre d'affaires de 74 milliards d'euros. FCA a écoulé 4,8 millions de véhicules, pour 110 milliards d'euros.
Les deux constructeurs, qui emploient 400 000 salariés, contrôlent les marques Alfa Romeo, Chrysler, Citroën, Dodge, DS, Jeep, Lancia, Maserati, Opel, Peugeot et Vauxhall. Une alliance leur permettrait donc d'être présents sur toutes les gammes de voiture, du basique au luxe.
3Quelles sont les modalités ?
Dans leur communiqué, Fiat Chrysler et PSA évoquent "une fusion à 50/50", entre égaux, de leurs activités. Cela permettrait aux entreprises de dégager des synergies annuelles pour un montant de "près de 3,7 milliards d'euros". Cette fusion se ferait via la création d'une maison-mère dont le siège sera aux Pays-Bas. Son PDG serait Carlos Tavares, l'actuel patron de PSA, pour une durée initiale de cinq ans. Il fera partie du conseil d'administration, aux côtés de cinq membres nommés par Fiat Chrysler et cinq membres nommés par le constructeur français.
Le conseil d'administration serait présidé par John Elkann, président de Fiat Chrysler et chef de la famille Agnelli. Avant cette fusion, si elle aboutit, le groupe PSA a par ailleurs indiqué qu'il se séparerait de ses 46% du capital de l'équipementier Faurecia.
4Des usines vont-elles fermer ?
Aucune certitude sur ce point. Le communiqué des deux groupes précise que le chiffre de 3,7 milliards d'euros de synergies ne se base pas sur "des fermetures d’usine". Mais ils ne prennent aucun engagement en la matière.
5Comment est accueillie la nouvelle ?
L'idée de cette alliance reçoit un accueil mitigé sur les marchés. A la Bourse de Paris, le titre PSA perdait 10,17% jeudi matin, à 10 heures. A l'inverse, le titre FCA gagnait 9,91% à la même heure à la Bourse de Milan. L'équipementier Faurecia recule lui de 4,08%.
Les syndicats sont eux "assez optimistes". Force ouvrière, premier syndicat chez PSA, a souligné une "dynamique industrielle positive" du projet. "PSA a déjà prouvé qu'il savait intégrer d'autres constructeurs avec Opel. C'est une opération réussie deux ans après ce premier mariage", souligne Patrick Michel, secrétaire général FO du comité de groupement PSA. La CFE-CGC, numéro deux, retient qu'il n'est "pas prévu de fermeture de site en France". Patrick Michel assure toutefois que les syndicats resteront "très vigilants". Ils demanderont à PSA, "cette entreprise qui est rentable, de protéger l'emploi de tous les salariés PSA en Europe et dans le monde, et d'abord en France". "Bien sûr qu'il va sans doute y avoir des économies d'échelle, il va sans doute y avoir des binômes, qui dit binôme, dit suppressions d'emplois", estime au micro de France 2 Jean-Pierre Mercier, délégué central CGT.
Le gouvernement français, si réticent il y a quelques mois lorsque FCA a tenté, en vain, de convoler avec Renault, "accueille favorablement" ce projet de fusion, tout en restant "particulièrement vigilant" sur le maintien de l'appareil industriel en France, selon un communiqué du ministre de l'Economie Bruno Le Maire. Mercredi, le vice-ministre italien de l'Economie, Antonio Misiani, a estimé "vital de préserver les sites" dans son pays. Il a souligné dans le même élan qu'il y avait un "changement de paradigme sur le marché automobile avec le passage à l'électrique", rendant "nécessaires de lourds investissements et des regroupements".
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