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Strasbourg attaque l'État pour sa "défaillance" à héberger les personnes à la rue : "On est moins gêné quand elles vont se cacher sous des ponts", dénonce la maire

Depuis Strasbourg, elle constate "une crise humanitaire qui grandit" et demande de nouvelles places d'hébergement.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg, le 1er septembre 2022. (JEAN-MARC LOOS / MAXPPP)

"Il faut dire stop ! L'État doit prendre ses responsabilités", proteste lundi 5 décembre sur franceinfo la maire EELV de Strasbourg Jeanne Barseghian, après que la justice a ordonné l'évacuation d'un campement de migrants dans sa ville. "L'évacuation aura lieu mardi", annonce-t-elle tout en déplorant que la justice ne se prononce pas "sur la mise à l'abri". La municipalité va attaquer l'État en justice pour sa "défaillance" à mettre à l'abri les personnes à la rue, notamment les migrants, a averti plus tôt dans la journée Jeanne Barseghian. "On est moins gêné quand les personnes vont se cacher sous des ponts", regrette-t-elle. 

franceinfo : Pourquoi voulez-vous attaquer l'État en justice ?

Jeanne BarseghianParce que je constate dans ma ville une crise humanitaire qui grandit, avec plusieurs centaines de personnes qui se retrouvent à la rue pendant des mois, parfois des années, sans qu'aucune solution ne leur soit proposée. Mes collègues maires de grandes villes font le même constat, avec des campements qui émergent un peu partout. Il faut dire stop ! L'État doit prendre ses responsabilités. À Strasbourg, il y a un nourrisson de deux ans qui est dehors depuis plusieurs jours devant la mairie. Il y a des personnes qui suivent des chimiothérapies qui sont à la rue. On est au cœur de l'hiver. Ce n'est pas normal.

L'État ne joue pas son rôle ?

C'est la compétence de l'État de mettre à l'abri les personnes. On a un chef d'État qui s'était engagé en 2017 à ce que plus personne ne dorme à la rue à la fin de cette même année... Cinq ans plus tard, autant dire que la promesse est loin d'être tenue. Il y a quelques semaines, nous avons été une dizaine de maires à signer un appel à la Première ministre et au ministre du Logement pour qu'ils créent de nouvelles places d'hébergement. L'État a fait un premier pas en renonçant à supprimer 14 000 places. Pour autant, le statut quo ne suffit pas. À Strasbourg, nous avons créé 500 places d'hébergement en deux ans, mais nous n'avons pas les moyens de nous substituer à l'État.

Allez-vous faire évacuer le campement comme la justice vous l'a ordonné ?

L'évacuation aura lieu mardi. Nous sommes dans un État de droit. Je suis une élue de la République. Donc, évidemment, je vais mettre en œuvre cette décision de justice. Ce que je dénonce, c'est que la justice demande d'évacuer un campement sans se prononcer sur la mise à l'abri. Il faut proposer de vraies solutions sinon ça signifie qu'on est dans un système parfaitement hypocrite. On serait gêné par un campement un peu trop visible au cœur des villes, mais moins gêné si les personnes iraient se cacher sous des ponts, aux abords des autoroutes, dans des squats ou dans des parcs. Malheureusement, c'est la réalité que nous constatons dans nos territoires.

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